Dans le nouveau testament, au sixième chapitre du livre de l’apocalypse, ils étaient quatre cavaliers qui inauguraient le commencement de la fin du monde pour faire périr les hommes par le glaive, par la famine, par la peste et par les bêtes sauvages.
Le parallèle s’arrête là car les cavaliers dont je veux vous entretenir sont au nombre de trois.
Trois personnages, présidents de leurs États, qui bousculent, choquent modifient les relations internationales tout autant que la relation des dirigeants à leur peuples.
Ils se nomment Donald Trump, Jaïr Bolsonaro et Recept Erdogan.
Depuis 2016, ils se sont illustrés par leurs discours populistes, leurs comportements autocrates, leurs modes de gouvernance, leurs conflits intérieurs ou extérieurs et la remise en cause du multilatéralisme et du chaos climatique. Et tout particulièrement leur attitude irresponsable face à la pandémie du Covid-19. Le virus les rassemble dans le mensonge et l’incompétence, lesquels vont conduire à des bilans humains épouvantables dans chacun de leur pays.
Commençons par Trump. Emporté par son célèbre slogan, « America First », il a d’abord nié la pandémie l’assimilant à une « grippe » puis il a choisi l’économie contre la vie de ces concitoyens. Malgré l’hécatombe, il veut le déconfinement et en appelle à l’insurrection armée de ses partisans dans les Etats démocrates qui s’y refusent. Voilà un Président prêt à une guerre civile pour ne pas subir un effondrement économique synonyme de non réélection présidentielle en novembre 2020. Les hommes d’État sont toujours ceux qui font passer l’intérêt général avant leur intérêt particulier. Il y a longtemps que nous n’avions guère d’illusions à ce sujet concernant le milliardaire américain.
Le Président brésilien est un « remake-latino » du Président américain. Conservateur, homophobe, populiste, cet héritier de la dictature militaire des années 70-80 a toujours ignoré le Covid-19 considérant comme son homologue nord-américain que la prière des évangélistes détournerait le virus de son pays.
Après avoir limogé son ministre de la santé qui le traitait d’irresponsable, il a aujourd’hui contre lui la moitié de son gouvernement, une partie de l’armée et son peuple qui, tous les soirs, le fête par un concert de casseroles.
Malgré sa majorité parlementaire au Congrès, le spectre de sa destitution plane, indexé sur le nombre de morts journaliers.
Le troisième cavalier de l’Apocalypse est le dictateur d’Ankara. Englué dans ses guerres en Syrie et en Libye, dans son chantage aux réfugiés avec l’Union européenne, tourmenté par le chaos de son économie, Erdogan a lui aussi nié la pandémie. Au point de refuser l’état d’urgence et le confinement de la population. Face à la propagation du virus il a dû se résoudre à confiner brutalement les 16 millions d’habitants d’Istanbul pour le week-end il y adix jours, provoquant la ruée de milliers de personnes vers les commerces alimentaires, ruinant ainsi tous les efforts de distanciation réalisés précédemment et aboutissant à une vraie-fausse démission du ministre de l’intérieur.
Mieux, dans un souci de vider les prisons, il a libéré 90 000 détenus de droit commun mais gardé en cellules 70 000 prisonniers politiques (journalistes, fonctionnaires, intellectuels, blogueurs) dont 37% en détention provisoire. Avec le secret espoir que le Covid-19 décime ses opposants ?
Ces trois chefs d’État ont surtout en commun de gouverner par la peur pour fracturer et cliver leur peuple en niant les faits, en truquant le récit national de leurs pays. Comme l’écrivait le Général allemand, le baron Kurt von Hammerstein
: « la peur n’est pas une vision du monde ».
Et si le Covid-19, pour les trois peuples concernés devenait une peur plus terrifiante que ces trois cavaliers de l’Apocalypse ?
Michel Scarbonchi