Préambule : parfois, lorsque l’on évoque des « personnes de couleur », on est accusé de propos racistes, car le blanc est aussi une couleur. Il faudrait donc dire « noirs » ou « blancs » (mais faut-il désigner les Asiatiques comme des « jaunes » ?) Parfois, lorsque l’on évoque les « noirs », parce qu’il n’y a pas que les Africains qui ont la peau foncée, on nous dit qu’il vaut mieux les désigner comme des… « personnes de couleur » ! L’hypocrisie, tout comme le racisme, étant une « qualité » humaine, universelle et ancestrale, nous avons fait le choix, certes très réducteur, de désigner par « noirs » ceux qui ont la peau foncée et par « blancs » ceux qui ont la peau claire. Nous nous excusons par avance auprès des jaunes, des (peaux) rouges, des basanés, des métisses, des albinos, des mutants et des martiens…
Sur un plateau de télévision, un médecin indique que nous ne sommes pas tous égaux devant le (l’Académie française recommande, un peu seule, l’emploi du féminin) Covid-19 : les chances de contracter la maladie et plus encore d’en mourir varient selon plusieurs critères, selon le sexe, l’âge, l’état de santé, l’hygiène de vie…, et – ajoute-t-il, l’ethnie. Personne ne relance le médecin. Qu’a-t-il donc voulu dire ?
Hors plateau, nous lui demandons quelques explications, et avons ultérieurement demandé confirmation à d’autres médecins hospitaliers confrontés au Covid-19.
Les réponses sont toujours anonymes, ne serait-ce que parce qu’en France, toute statistique ethnique est formellement interdite, et que de toute manière, l’idée même que certains pourraient être plus touchés que d’autres déclencherait sur-le-champ un flot d’accusations de racisme sur fond de malentendu.
Dans les hôpitaux franciliens, et pas seulement au nord de Paris et en Seine Saint-Denis, les noirs, en particulier d’origine africaine, et dans une moindre mesure les Maghrébins sont proportionnellement plus nombreux que les blancs parmi les victimes du Covid-19. Mais il ne faut surtout pas le dire ! Certes, en Alsace, il n’y avait que peu de noirs selon les témoignages de plusieurs soignants. Mais le fait est suffisamment avéré en Ile-de-France pour s’étonner qu’il n’en soit fait état dans aucun média.
Ce n’est donc qu’en « off » que des médecins français se demandent si seuls les facteurs de poids, de tension artérielle et de diabète dus aux habitudes alimentaires et culturelles nord-africaines ou subsahariennes, pas plus que les explications sociales, expliqueraient à eux seuls un pareil différentiel… ethnique. Le mot est chuchoté presque honteusement.
Pourtant, l’Afrique est moins sévèrement atteinte par la pandémie, si l’on se fie aux données officielles (sujettes, il faut le dire, à grande suspicion). Au Cameroun, les chiffres officiels tournent carrément au mensonge d’Etat. Ce ne doit pas être le seul pays ! La jeunesse de la population et l’emploi massif de traitements génériques comme la chloroquine ont certainement permis d’atténuer la pandémie.
Peut-il donc exister une explication médicale à ce que les noirs d’Europe et d’Amérique soient plus touchés par le Covid-19 que d’autres populations occidentales ? Un éminent médecin français nous parle de possibles carences immunitaires mais refuse d’approfondir en opposant l’interdit français sur toute étude ethnique.
Rien dans la littérature française donc puisqu’il est interdit de proposer des analyses par critère ethnique ou communautaire. Le très sérieux British Medical Journal (BMJ) a publié deux études qui montrent qu’en Grande Bretagne les personnes d’origine africaine seraient plus touchées. Notamment 60% des soignants contaminés par le coronavirus seraient noires. La raison est peut-être simple : les aide-soignants et les infirmières, en contact direct avec les malades, y sont en grande majorité des noirs. Et c’est souvent le cas en France. La nation devrait leur en savoir gré et reconnaître que nos premiers de cordée sont souvent de couleur !
Aux Etats-Unis, les Afro-Américains sont nombreux parmi les victimes du coronavirus à New York et dans plusieurs Etats. Les articles y ont été très nombreux et quelques médias français, faute d’oser parler de l’Hexagone, ont repris les analyses de la presse américaine, comme celle du New York Times. Le site américain afro.com, après avoir rappelé que d’éminents scientifiques rejettent toute explication biologique à la forte mortalité des Afro-Américains infectés par la Covid-19, évoque la piste de la carence en vitamine D. Rien n’est sûr.
On le sait, aux États-Unis, les Afro-Américains sont d’abord victimes de graves inégalités sociales. Dans un pays dépourvu de sécurité sociale, ils sont plus nombreux à ne pas avoir accès au soin. Leurs métiers sont souvent peu qualifiés et incompatibles avec le télétravail.
Cette réalité américaine est en partie transposable en France car la réalité est que toutes les personnes qui ont dû continuer à travailler dans les métiers vitaux (soignants, caissiers, transporteurs, éboueurs, logisticiens…) sont parfois, souvent, des Français d’origine africaine ou nord-africaine.
Cependant, si en France, la proportion de pauvres est plus importante dans les communautés issues de l’immigration, si les migrants clandestins sont dans une situation particulièrement précaire, il serait absurde de prétendre que les noirs, pas plus que les autres Français, sont des exclus sociaux et sanitaires.
Si la pauvreté et la promiscuité sont indéniablement propices à la transmission du virus, certains comportements communautaires peuvent également être soulignés, sans que cela doive provoquer l’ire des prétendus antiracistes (ceux qui comme les Indigènes de la République, en ont fait un fonds de commerce, oubliant que leur aversion des blancs et leur antisémitisme sont aussi des formes de racisme). Promenez-vous depuis le 11 mai à Château-Rouge et Château d’Eau près des gares du nord et de l’est à Paris et vous verrez les quartiers africains de Paris : les personnes ne portent pas de masques et sont agglutinées les unes contre les autres. C’est la première cause des risques de contamination.
Comme le rapporte le site citylab.com, la rumeur d’une immunité naturelle des noirs face au coronavirus courrait toujours au sein de la communauté afro-américaine au début de l’épidémie, jusqu’à ce que deux joueurs de basquet de la NBA soient déclarés positif. La rumeur a peut-être continué à circuler.
Dans les années 1980, une plaisanterie avait cours en Afrique et parfois au sein des communautés africaines d’Europe, comme quoi le SIDA serait un « Syndrome Inventé par les blancs pour Décourager l’Amour »).
Aujourd’hui, à en juger par les attroupements sur les berges des canaux parisiens, on se demande si ce ne sont pas les jeunes qui se considèrent naturellement immunisés (et peu soucieux de transmettre le virus à leurs anciens).
On l’aura vu avec le coronavirus : dans les quartiers communautaires, les gestes-barrière et les distanciations sociales ne sont que peu respectés. Le gouvernement a même ordonné de ne pas les faire respecter dans les « quartiers » pendant la période de Ramadan.
Peut-être qu’expliquer aux populations concernées qu’elles pourraient être particulièrement vulnérables au Covid-19 eut été un moyen de les convaincre de l’importance des gestes-barrière. C’est pourquoi ce silence des médecins est choquant, en termes de simple prévention sanitaire.
Le refus de l’approche ethnique, comme l’interdiction des statistiques ethniques, est une aberration qui se retourne contre toutes les minorités, et qui compromet une bonne administration territoriale (comment, par exemple, anticiper la construction de mosquées si on ignore ou feint d’ignorer le nombre de musulmans ?).
La France a-t-elle peur que sa diversité et son multiculturalisme pourtant évidents soient corroborés par des chiffres ?
Le coronavirus a peut-être eu une approche ethnique. Ce n’est pas le moindre de ses défauts !
Michel Taube