Edito
10H49 - mercredi 10 juin 2020

Belloubet ridiculisée par le collectif Traoré : la justice aux ordres de qui ? L’édito de Michel Taube

 

En 2015, nous étions tous Charlie, sauf ceux qui samedi criaient leur haine de la France place de la Concorde, et quelques autres…

Aujourd’hui, nous sommes tous Floyd, même si l’on peut subodorer quelque hypocrisie dans cette subite compassion planétaire, qui risque d’être encore plus éphémère que celle de 2015, surtout si elle conduit à tous les amalgames (genre Floyd=Traoré), qu’elle sert de prétexte à la haine de la police et vire à l’autoflagellation des méchants blancs et à l’aveuglement face à une violence sociale exacerbée, parfois teintée d’autres racismes et d’antisémitisme de la part de ceux qui se présentent comme d’éternelles victimes.

La preuve ? Pour l’hommage à George Floyd, ils n’étaient que 2000 hier place de la République à l’invitation de SOS Racisme et des partis et des syndicats de gauche. Pour Adama Traoré mardi 2 juin, ils étaient dix fois plus. Tiens, les 20.000 de la porte de Clichy n’ont pas rendu hommage à Floyd hier ? Le rapport de force est très clair et pèse en faveur des plus radicaux.

Ces chiffres prouvent bien que le sort de l’Américain Floyd n’était qu’un prétexte pour le collectif Traoré aux fins de créer un rapport de force médiatique et peser sur la justice française. Partie gagnée pour le moment, de sorte que le collectif Traoré et ses stars de salon se sentent pousser des ailes et appellent le peuple français à une nouvelle journée de manifestations samedi.

Car l’empressement subit du ministre de l’intérieur à dégainer (dans un très bon discours, d’ailleurs) pléthore de mesures de confinement des policiers dans l’exercice de leur fonction régalienne est une preuve de faiblesse face à la contestation de 20 000 ou 30 000 personnes aussi bruyantes que minoritaires.

Et voilà pire : la garde des Sceaux, Nicole Belloubet, se ridiculise en invitant la famille Traoré, dont le palmarès judiciaire de certains membres circule sur les réseaux sociaux, soit-disant pour lui rendre personnellement compte de l’avancée de la procédure, au mépris de la séparation des pouvoirs et de l’indépendance de l’autorité judiciaire. Rappelons qu’Adama Traoré est décédé en 2016 (événement tragique) après avoir tenté de se soustraire à un contrôle de police, que trois expertises ont conclu à l’absence de responsabilité des forces de l’ordre dans son décès, et que répéter à qui veut l’entendre (ou pas) que sa mort, si tragique soit-elle, est un crime raciste, c’est-à-dire qu’il aurait été tué sciemment par des policiers parce qu’il était noir, et parce qu’il ne peut en être autrement dans leur esprit, est une accusation lourde de conséquences politiques plus que pénales.

Non seulement Nicole Belloubet s’est ridiculisée, mais elle a même été snobée par les Traoré qui ont refusé son invitation. Autre signature de leur radicalité et de leur mépris des institutions de la République. Lorsqu’on vous tend la main, on la serre, quitte à exposer ensuite ses griefs.

Nicole Belloubet ferait mieux de se préoccuper de la lenteur de la justice (qui, rappelons-le, s’était quasiment arrêtée durant tout le confinement). Sur ce point, on ne peut qu’être d’accord avec les Traoré. Quatre ans après les faits, ils attendent toujours un jugement, même s’il est évident qu’ils ne l’accepteront que s’il va dans leur sens. La lenteur de la justice est une plaie française et un encouragement au sentiment d’impunité qui augmente dans notre pays.

À vrai dire, la garde de Sceaux aurait agi sur ordre du Président de la République. Maintenant que la famille Traoré l’a éconduite, peut-être qu’Emmanuel Macron tentera sa chance ! Va-t-il nous faire une Leonarda, du prénom de cette jeune Roumaine que François Hollande avait appelé pour lui accorder son hospitalité suite à l’expulsion de toute sa famille ?

En janvier dernier, nous étions tous Mila, du moins à Opinion Internationale, du nom de cette jeune fille menacée de mort pour avoir « blasphémé ». La garde des Sceaux, Nicole Belloubet, qui pensait que le blasphème était un délit dans le Code pénal, avait diligenté une enquête à l’encontre de cette jeune fille, ce qui ne fut ni son premier faux pas de ministre de la Justice, ni hélas son dernier.

Emmanuel Macron tenterait-il de séduire certaines minorités déçues par sa politique ou panique-t-il à l’idée que le rêve mélenchonien puisse devenir réalité ? La convergence des déceptions, des ressentiments, des haines, et non des luttes, la giletjaunisation ethnique de la société. Black, (gilets) Jaunes, Beurs, même combat ! Les damnés de la terre ligués pour faire tomber la République… ou porter au pouvoir une Marine Le Pen que les Français préféreront au stalinisme que nous promet l’islamo-gauchisme.

Le ministre de l’Intérieur a parfaitement raison de rappeler que le racisme dans la police (et non de la police) n’est pas acceptable et que l’usage de la force par la police (et par elle seule) est légitime s’il est proportionné. Mais il faut se garder de donner à certains extrémistes qui vomissent les valeurs de la France le sentiment que leur violence, verbale ou physique, paye. Si l’État flanche comme il l’a fait en décembre 2018, quand les rues de nos villes étaient le terrain de violences insurrectionnelles, alors de mauvais jours nous attendent.

La France doit se relever d’une crise économique qui ne vient que de commencer et d’une crise sanitaire dont on ne sait si elle est vraiment sur le point de se terminer. Elle ne peut se permettre de nouvelles émeutes, un nouveau chaos, sauf à en subir des conséquences sociales si graves qu’elles en deviendraient insurmontables et peut-être irréversibles.

Face aux dérives sociales, identitaires et insurrectionnelles, la France a besoin d’une main de fer dans un gant de velours. En tout cas pas de l’inverse !

  

Michel Taube