La détection de la désinformation dans les réseaux sociaux en ligne grâce à des modèles d’apprentissage en profondeur inspirés de la nature, tel est le credo de cette scientifique nigériane.
Pour Funmilola Fagbola, le goût pour l’informatique lui est parvenu lorsqu’elle était adolescente dans la ville d’Osogbo, dans l’État d’Osun. Alors qu’elle assistait à l’installation d’un distributeur automatique de billets. « Le déclic de devenir informaticienne a eu lieu à ce moment précis. Et mon frère aîné, étant lui-même, un scientifique était, bien sûr, très favorable à cette idée. »
Pour réaliser son rêve, Funmilola Fagbola s’est d’abord inscrite en informatique et en génie pour obtenir son diplôme de premier cycle et son diplôme d’études supérieures. Mais la poursuite de son parcours académique, notamment sa maîtrise qu’elle a complétée avec distinction, « n’a pas été sans travers ». « Conceptualiser efficacement les problèmes de recherche et l’approche méthodologique d’une solution efficace était un véritable défi. » De même, la rédaction d’une thèse de recherche et d’articles destinés à être publiés dans des revues réputées n’était pas chose facile. Le manque de fonds de recherche a empêché l’utilisation de données réelles pour ses travaux menant Funmilola à s’appuyer uniquement sur des ensembles de données open source, des interfaces de serveur de moteur de recherche en ligne, des plateformes de développement intégrées ouvertes et des bibliothèques gratuites en ligne pour mener à bien son projet de recherche tout en réduisant les dépenses financières associées à ce dernier.
Les études doctorales de Funmilola Fagbola, qu’elle terminera en 2021, se concentrent sur la détection de la « désinformation » sur les réseaux sociaux en ligne. C’est une tâche très difficile en raison du manque de crédibilité et de vérifiabilité de ses expéditeurs ; et, d’autre part, parce qu’il y a tellement d’informations envoyées chaque jour et, parmi elles, de nombreux « bots », « fausses nouvelles », « rumeurs » et désinformation pure. « La plupart des solutions courantes de détection de la désinformation adoptent des modèles d’apprentissage en profondeur en raison de leur grande efficacité et précision informatique. Bien que ces approches soient très proactives, la prolifération récente de la désinformation axée sur la confrontation, par exemple les Deep Fake, a révélé des tendances alarmantes quant à la capacité d’adaptation croissante de la désinformation à la détection. Deep Fake est une catégorie de fausse nouvelle fondée sans qu’aucun élément ne soit avéré. »
Par conséquent, elle a mis au point un modèle adaptatif d’extraction et d’apprentissage des caractéristiques qui pourrait (i) saisir les caractéristiques révélant le poids de crédibilité des données et (ii) générer une inférence de crédibilité et un modèle à l’épreuve des confrontations avec des algorithmes inspirés de la nature et des modèles d’apprentissage profond. Les caractéristiques préoccupantes comprennent les caractéristiques du contenu (n-grammes, lisibilité, ponctuations et syntaxe), l’information propre à l’utilisateur et à la source URL. « Un ensemble de données sur les spambots sociaux, contenant 8 386 comptes et 11 834 866 tweets, est utilisé à des fins expérimentales. Ce travail est mis en œuvre à l’aide de Python et utilisera la précision de détection, l’efficacité temporelle et la matrice de confusion pour l’évaluation avec des approches de base. »
Funmilola Fagbola a obtenu, en 2018, une bourse Philips, au centre eScience, à Amsterdam. En 2019, elle a reçu la bourse Google Europe Moyen-Orient et Afrique Women Techmakers. Elle a également obtenu trois bourses de voyage : la bourse de voyage Indabax de l’Université du KwaZulu-Natal ; la bourse de voyage ACM/SIGIR AFIRM de l’Université du Cap et la bourse de voyage ACM/FAT, FAT 2019, pour aller à Atlanta en Géorgie (États-Unis).
Lauréate 2019 du Prix des femmes dans la science Unesco – L’Oréal, Funmilola Fagbola se voit devenir professeure d’informatique et écrire des publications de recherche au sujet du machine learning et portant sur des applications pertinentes à des problèmes de la vie réelle. « Je me vois aussi posséder une organisation non gouvernementale (ONG) où des jeunes filles seraient formées dans le cadre de Science pour le développement de l’Afrique. » La science étant encore un domaine dominé par les hommes, elle le sait, mais elle reste confiante et déterminée à changer cette réalité.
Michel Taube