La chronique de Patrick Pilcer
09H27 - vendredi 25 septembre 2020

Immobilier et Construction, les secteurs mal-aimés du quinquennat Macron. La chronique de Patrick Pilcer

 

L’Immobilier et la Construction, voilà deux secteurs complètement absents du Plan de Relance économique du Président Macron. Deux secteurs qui sentaient le soufre depuis le début du quinquennat.

Souvenons-nous. L’immobilier est le seul support d’investissement à rester taxé par feu l’ISF, en devenant l’IFI. Baisse des APL. Ponction d’une partie de la trésorerie d’Action Logement. A croire que le gouvernement depuis trois ans cherche à casser toute dynamique d’investissement dans la construction et dans l’immobilier.

Vous me direz, par nature, l’immobilier est « immobile », les actifs ne peuvent bouger contrairement aux liquidités monétaires ou aux sièges sociaux des entreprises. Pourquoi moins taxer l’immobilier puisque les propriétaires ne peuvent le déplacer ? Autant les presser comme un citron jusqu’à la dernière goutte ! Les locataires auront toujours besoin d’un toit pour s’abriter ; autant diminuer les APL de 5 €, ils n’ont pas d’autres choix que de payer la différence de toute façon.

Inutile de penser, moderniser et mettre en place une politique de l’investissement en immobilier, autant supprimer le Prêt à taux zéro et restreindre le plus possible les programmes Pinel, la perspective de plus-value fera que les investissements arriveront toujours.

Sauf que la pandémie a rebattu les cartes. Bien malin qui sait si l’immobilier, qu’il soit basé sur le résidentiel, sur les commerces, sur les bureaux ou sur la logistique, va continuer à s’apprécier. Ajouter à cela une dose de maires écolo-bobo, obnubilés par l’artificialisation des sols, oubliant que l’agriculture est un artifice quand la jungle est naturelle, acceptant moins de permis de construire et augmentant fortement les contraintes environnementales, et c’est tout un secteur économique qui peut tomber du jour au lendemain dans une crise profonde.

Pas besoin d’un Haut-Commissariat au Plan, pas besoin d’être un grand stratège, pour prévoir que si rien n’est mis en place avant la fin 2020, ce secteur connaîtra une forte récession.

Ce secteur devrait pourtant être choyé par le gouvernement. Il emploie directement et indirectement des centaines de milliers de personnes ; les emplois sont locaux et difficilement délocalisables ; ce secteur emploie à la fois un personnel hautement qualifié comme une main d’œuvre faiblement qualifiée ; il y a un manque important de logements ; les logements neufs sont le plus souvent BBC, bâtiment à basse consommation, comme les programmes de rénovation d’ailleurs ; les taxes que ponctionne l’Etat, que ce soit taxes foncières, taxes sur les bureaux, taxes lors d’une construction, droits de mutation, TVA, impôt sur la plus-value, etc. rapportent des sommes considérables au budget de l’Etat. Et pourtant rien ou presque rien.

Pourquoi tant de haine… ?

Est-ce par haine des propriétaires ? il aura fallu une action forte de quelques propriétaires âgés victimes de squatteurs, avec l’aide des médias, pour que l’Etat réagisse enfin et décide de mieux faire respecter ce droit constitutionnel de la Propriété. N’en déplaise à Proudhon, la propriété n’est pas le vol, occuper sans titre un appartement ou ne pas payer ses loyers, par contre, sont des délits. Haine des propriétaires par l’Etat aussi lors de la pandémie. Rappelons que l’Etat a incité les locataires de bureaux et commerces à ne pas payer leurs loyers, sans mettre parallèlement en place une indemnisation. L’employé a légitimement le droit au chômage partiel ; le commerçant retraité qui vit du loyer des murs de son ancienne boutique, le médecin retraité, l’infirmière retraitée qui louent les murs de leur ancien cabinet, l’artisan retraité qui loue son entrepôt pour améliorer sa maigre retraite, eux, n’ont que leurs yeux pour pleurer. Ils sont propriétaires, ils sont donc riches et forts, quand le locataire, lui, est forcément le pauvre et faible.

Est-ce par haine de la rente ? Pourtant, un loyer, dans le monde réel, est loin de ressembler à une rente. Il y a des risques importants, et le principal risque, en immobilier, s’appelle le locataire. Quand on est propriétaire, il y a toujours une fuite à traiter, une porte à réparer, des travaux à financer, des loyers et des charges à récupérer. La rente, ce n’est pas percevoir un loyer. La rente, ce serait plutôt acheter des obligations d’Etat et attendre les coupons.

L’Etat souhaite-t-il favoriser ainsi un monde basé sur l’usage et pénaliser le monde basé sur la propriété ? Surtout si l’Etat, directement ou indirectement, détient tous les biens et les loue, ou les met à disposition aux citoyens, comme dans une économie collectiviste. Ne devenons pas le dernier pays communiste du monde. Ce serait ne pas connaître et comprendre la France et les Français. A un moment où l’on va remettre pour la centième fois sur la table les réflexions sur la retraite, ce serait oublier que la retraite par capitalisation existe depuis longtemps en France, elle s’appelle investissement immobilier ! Et elle est moins dangereuse pour l’épargnant qu’une retraite en fonds de pension. La chute des bourses de ces derniers jours nous le rappelle avec force.

Il est grand temps que le Président Macron propose une réelle politique économique sur l’immobilier et la construction. Une telle politique n’est pas forcément très coûteuse, surtout au regard du retour sur investissement pour les caisses de l’Etat. Non, ce n’est pas tant une question de politique de défiscalisation et d’incitation à l’investissement qu’une politique basée sur la restauration de la confiance qu’il convient de mettre en place.

 

Des mesures concrètes et fortes

Cela commence à mon sens par deux mesures simples et peu coûteuses : suppression de l’IFI et exonération des plus-values immobilières au bout de 20 ans, comme avant le quinquennat Sarkozy.

L’IFI stigmatise à tort l’investissement immobilier, il est temps d’y mettre, enfin, un terme. Le passage de l’exonération de 20 à 30 ans sous Nicolas Sarkozy a eu comme conséquence première d’augmenter la durée de détention des biens sans rapporter vraiment plus à l’Etat. Mieux vaut augmenter la liquidité du marché immobilier, surtout dans un siècle où la mobilité géographique est encouragée. On pourrait également exonérer les plus-values si la vente d’un bien immobilier est suivie dans les 12 ou 18 mois d’un achat immobilier ou d’un investissement dans les fonds propres d’une société. Là encore, on facilite la mobilité comme l’investissement dans nos entreprises, qui ont besoin aujourd’hui encore plus qu’hier de capitaux. La mobilité en immobilier crée de l’activité. Changer de logement donne du travail aux promoteurs, aux agents immobiliers, aux architectes, aux déménageurs, aux peintres, aux plombiers, aux décorateurs, aux vendeurs de meubles, aux banques, aux assureurs, aux notaires… et rapporte des taxes à l’Etat.

En supprimant l’IFI, en revenant à une exonération de plus-values au bout de 20 ans, ou en cas de réinvestissement, l’Etat redonnerait confiance dans l’investissement immobilier, sans grande perte pour le Budget, juste avant que ce secteur ne s’écroule à son tour. L’Etat peut bien sûr aussi doper l’investissement dans la Pierre ou les aides à la location en fléchant habilement ces aides vers des investissements immobiliers verts, ou vers des zones à reconquérir.

Ce serait alors la cerise sur le gâteau. Mais faisons d’abord en sorte qu’il y ait encore un gâteau sur la table…

 

Patrick Pilcer

Conseil et Expert sur les Marchés Financiers

 

 

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