Trump remporte le Texas et la Floride, mais Biden s’adjuge l’Arizona… Alors que l’Europe s’éveille et que l’Amérique compte encore les bulletins de vote, l’élection présidentielle américaine est loin d’être jouée. Elle l’est d’autant moins que le sortant a déjà annoncé qu’il était victorieux, que les démocrates ont triché, que « tout s’arrête » (le décompte des bulletins ?) et qu’il saisira une Cour suprême politiquement à sa solde.
Dans certains États, sans doute comptera-t-on et recomptera-t-on les bulletins au moins jusqu’à vendredi, avant que Donald Trump, s’il perdait, n’entame un parcours judiciaire de plusieurs semaines.
En 2016, Donald Trump n’aurait jamais dû devenir le dirigeant de la grande démocratie que demeurent les États-Unis. Le personnage, l’homme, on le connaît. Inutile d’y revenir.
En 2020, Donald Trump aurait été réélu haut la main, s’il n’avait méprisé le coronavirus (à chacun sa grippette !) qui a déjà eu la peau de 233 000 Américains et envoyé au chômage, du jour au lendemain, des millions d’autres. Certes, il n’y a pas qu’aux États-Unis où la vérité et la transparence n’ont pas guidé l’action publique ! Sur le bilan sanitaire et l’ampleur de la récession, l’Amérique de Trump, qu’on se plaît à moquer, s’en sort mieux que la France, même si nous avons artificiellement évité, pour le moment, une vague massive de chômeurs.
Le Covid-19 a privé Trump d’une victoire massive qui lui était promise. Macron le sait.
En 2020, Joe Biden n’aurait jamais dû être candidat. Âgé de 77 ans, son parcours politique est entaché d’échecs, de tergiversations, de renoncements. Le jeune Barak Obama l’avait choisi comme vice-président pour rassurer l’Amérique blanche, mais certainement pas pour proposer à son colistier un tremplin vers la Maison-Blanche. En revanche, Biden s’est inscrit dans la vraie logique chronologique en choisissant Kamala Harris comme colistière. L’avenir n’est jamais comme on le prédit, mais nombreux sont ceux qui voient un bel avenir à cette Indo-Africaine américaine, surtout si Joe Biden est élu. Sans manquer de respect au candidat démocrate, à le voir et à l’entendre, on n’imagine pas qu’il serait candidat à sa réélection dans quatre ans, quand on ne s’interroge pas sur sa capacité à mener à son terme un premier mandat.
Joe Biden, auquel la folle gestion de la crise sanitaire par Donald Trump aurait pu ouvrir un boulevard vers la Maison-Blanche, n’est pas seulement un second couteau et un éventuel président de transition. Il a par trop, comme l’élite démocrate depuis dix – quinze ans, méprisé l’Amérique profonde, qui n’est pas seulement constituée de blancs, obèses, racistes et abrutis, possédant vingt mots de vocabulaire, et dégênant leur colt plus vite que Lucky Luck.
Biden a voulu surfer sur la vague du mouvement Black Lives Matter, croyant que les grandes manifestations contre le racisme (certes totalement légitimes) et l’embrasement de nombreux centres villes, avaient fait de cette thématique un enjeu électoral majeur, alors que les enquêtes indiquent qu’il ne l’était que pour environ 8 % des Américains.
Le mouvement Black Lives Matter a généré son lot de violences comme les Gilets jaunes français ont entraîné les blacks blocks dans leur sillage. Au pays où la propriété est un droit sacré, les destructions en marge des manifestations ont choqué beaucoup d’Américains. Joe Biden a peut-être été trop influencé par l’aile gauche du parti démocrate, plus visible et bruyante que représentative. Erreur majeure : le covid est de loin la préoccupation majeure des Américains, devant l’économie, même si nombreux sont ceux qui ont désigné le covid pour ses implications économiques, loin devant le racisme.
Le « socialisme », comme on dit outre-Atlantique, les Américains n’en veulent pas. Cela changera peut-être quand les jeunes démocrates qui imposent souvent leurs positions très à gauche sur les campus universitaires accéderont au pouvoir. Reste à savoir s’ils seront toujours à gauche. Les hippies de Woodstock ne sont-ils pas devenus les traders de Manhattan et les startupers de la Silicon Valley ?
Pour le moment, le suspense reste donc entier. Les sondeurs et prévisionnistes ont une fois encore perdu : ni large victoire de Biden, ni scènes de violence, pour le moment du moins. Quel que soit le résultat, le vrai nouveau départ se fera plus vraisemblablement dans quatre ans, avec du sang neuf. Comme en France avec Emmanuel Macron ?!
Michel Taube