Lorsque vous lirez ces lignes, Joe Biden aura peut-être franchi la barre des 270 grands électeurs devant faire de lui le prochain Président des États-Unis. Il faudra néanmoins attendre l’issue de sévères joutes judiciaires avant que ce résultat soit confirmé ou infirmé, ce qui serait tout de même une énorme surprise, malgré la domination des pro-Trump à la Cour suprême.
La victoire de Joe Biden semble donc se dessiner, comme une revanche sur l’histoire de celui qui est dans la politique depuis un demi-siècle, échouant jusqu’à ses 78 printemps à accéder au poste suprême. Les Européens, gavés à l’anti-trumpisme par ses élites et leaders d’opinion, vont pouvoir célébrer la victoire du politiquement correct, comme une parenthèse dans leur dure réalité faite de Covid-19 et d’islamisme.
Il est vrai que Donald Trump, en tant qu’homme, ne mérite aucune considération, aucun éloge, aucune excuse. C’est un goujat, un manipulateur, un homme de clan qui ne peut avoir d’ami, car on ne trahit pas ses amis, un homme imprévisible auquel il n’est pas possible d’accorder sa confiance. Pour ces raisons seules, Donald Trump n’aurait pas dû devenir président des États-Unis. Mais combien de crapules dirigent le monde ? Et qu’attend-on d’un chef d’État ? Une exemplarité morale ?
Le président meilleur que l’homme
Le bilan du président Donald Trump, c’est une augmentation du pouvoir d’achat, et pas seulement celui des « riches ». Les revenus des Afro-Américains (aux États-Unis, les statistiques ethniques existent) ont augmenté plus que sous l’ère Obama.
Trump a aussi instauré une forme de protectionnisme intelligent, en particulier à l’égard de la Chine, mesures dont l’Europe (et non la trop faible France, n’en déplaisent aux souverainistes) pourrait s’inspirer. Sans Donald Trump, nous étions prêts à nous abandonner à Huawei, à livrer à vitesse 5G toutes nos données au régime chinois.
Trump, c’est aussi une fiscalité incitant les multinationales de son pays à rapatrier leurs capitaux.
Sur le plan diplomatique, il a osé dénoncer l’accord avec l’Iran sur le nucléaire, accord dont la France et les autres européens n’ignorent pas que s’il a peut-être été respecté dans la lettre, il ne l’a jamais été dans l’esprit par ce régime théocratique et impérialiste. Il a partiellement désengagé son pays du bourbier moyen-oriental et facilité le rapprochement d’Israël et du monde arabe.
Donald Trump, ce fut America first. Et alors ? N’est-ce pas la mission d’un chef d’État que de défendre les intérêts du pays dont il est le plus haut représentant ?
Durant les quatre années de son mandat, toute la bien-pensance américaine s’est déchaînée contre Donald Trump, jusqu’à tenter vainement une procédure d’impeachment. CNN, le New York Times, le Washington Post ne sont que quelques exemples de médias ayant procédé à un acharnement quotidien contre ce président qu’ils considéraient comme illégitime.
En février dernier, avant que le Covid ne s’abatte sur les États-Unis, la réélection de Donald Trump semblait d’autant plus acquise que son adversaire était une pièce rapportée, au mieux un candidat de transition qui permettra à Kamala Harris, la vraie nouvelle star de la politique américaine, de faire ses classes à la Maison-Blanche.
Et le Covid arriva…
Février-mars 2020. En France, chaque jour, Jérôme Salomon, directeur général de la santé annonce comme une litanie le nombre de morts en rappelant que le pays qui en compte le plus, c’est les États-Unis, feignant d’oublier que, rapporté à la population totale, la France était bien plus sévèrement touchée. Il en va de même pour l’économie : la récession américaine est moins sévère aux États-Unis qu’en France.
Pourtant, Donald Trump fauta, lourdement, et sa faute lui aura peut-être été fatale.
Trump se croyait invincible, plus fort que Biden (les résultats si serrés le prouvent), mais aussi plus fort, jusque dans sa chair, que le Covid ! Là fut sa faute, la cause de sa chute !
Depuis février 2020, alors qu’en France, Emmanuel Macron évoque solennellement la guerre contre le Covid tout en laisser ses ministres asséner quelques contre-vérités, notamment sur l’inutilité du port du masque, Donald Trump snobe le virus, minimise la gravité de l’épidémie, puis fait de la Chine le bouc émissaire de ses grossières erreurs, de ses mensonges, de son arrogance. Les morts, les familles endeuillées, les malades, les villes confinées, les chômeurs laissés sans aucune indemnisation du jour au lendemain… Trump arrange le coronavirus, rechigne à porter le masque, et finit par contracter la maladie dont il se remet comme un homme en pleine force de l’âge. Biden se protège, se masque, se terre. Mais il prend la mesure de la gravité du mal. Il ne joue pas les matadors devant un virus qui secoue la planète entière.
Dans les études d’opinion, le Covid devient la première préoccupation des Américains, et leur premier critère de vote à la présidentielle, devant l’économie, même si les deux thèmes sont très liés. Donald Trump ne l’a jamais compris, ou du moins, n’a-t-il jamais admis que face à un tel virus, il fallait faire preuve d’humilité.
En 2016, Donald Trump ne pouvait gagner, pensait-on. En 2020, face à un pareil adversaire, il ne pouvait perdre. Mais son vrai adversaire s’appelait Covid.
Michel Taube