N’en déplaise aux souverainistes de tout bord, l’Euro a permis à l’économie française de surmonter la crise économique dans de très bonnes conditions. L’Euro a doté notre économie des anticorps qui lui ont permis de résister. Regardons cela au microscope.
La dette de la France en 2020 se monte à environ 2 650 milliards €. Notre Etat emprunte depuis quelques mois grâce aux actions efficaces de la BCE à environ -0,25% sur les échéances dix ans, un peu moins encore sur des échéances plus courtes, un peu plus sur des échéances plus longues. Si nous faisons un rapide calcul, certes très approximatif, en rapportant ce taux à la dette globale, on voit que notre dette nous fait gagner 6,6 milliards € par an ! Notre dette finance ainsi une bonne partie du plan de survie mis en place par le gouvernement.
Imaginons à présent que nous ne soyons plus dans la zone euro, que nous soyons la Grande Bretagne, un pays aux finances relativement saines, apprécié de la plupart des investisseurs. Nous aurions alors à nous financer non plus à un taux négatif de -0,25% mais à un taux positif de +0,50% environ. Le calcul est facile à faire, la dette nous coûterait 13 milliards € par an, autrement dit sortir de l’euro et battre sa propre monnaie, comme le suggère les souverainistes, nous coûterait 20 milliards de plus par an en comparaison de la situation actuelle, 20 milliards d’impôts en plus en fait à ponctionner sur notre économie, sur nos entreprises, sur les particuliers… Nous pouvons aussi nous dire que, au vu de la panade dans laquelle la France était au printemps, sans masque, sans respirateur, sans places suffisantes en services de réanimation, avec nombre de banlieues en territoires perdus de la République, avec des attaques terroristes répétées, et avec une économie fortement confinée, ce taux de financement se serait envolé au-delà des 1%, ce qui est encore raisonnable, mais 1% de taux d’emprunt , c’est 26 milliards € à sortir tous les ans, soit 33 milliards de plus qu’actuellement, soit environ la moitié de l’impôt sur les sociétés, 20% des recettes de TVA… Nous aurions dû augmenter ces impôts pour payer les intérêts de notre dette…
Bien sûr, les souverainistes pourraient arguer que nous aurions pu dévaluer ce nouveau franc. Mais alors, comment payer notre facture pétrolière, le pétrole se négocie en dollars, comment payer les ordinateurs américains, coréens ou chinois, eux aussi facturés en dollars, comment télé-travailler quand téléphones et ordinateurs sont vendus en devises fortes, et comment payer ce nouveau vaccin de Pfizer et BioNtech sinon en dollars ou en nouvel euro, sans la France en son sein ? et là, ce n’est pas à 1% mais à 3%, voire 5% que nous aurions dû nous financer ! de quoi mettre le pays en faillite et créer les conditions d’une révolution…pour revenir dans la zone euro !
La Souveraineté n’est pas le souverainisme. Il est vital pour notre pays de garantir sa souveraineté, sur le plan sécuritaire, sur le plan alimentaire, sur le plan énergétique, sur le plan de la santé et sur de nombreux plans économiques, mais la souveraineté n’est ni l’autarcie, ni le repli sur soi, ni le rejet du progrès. La recherche de la souveraineté peut être progressiste, les souverainistes sont réactionnaires. Ils prônent le retour au franc, la dévaluation, le repli. L’euro nous aura également vaccinés contre ces anciennes et mauvaises habitudes de dévaluer notre monnaie ; l’euro a profondément modifié l’ADN de notre économie, et de nos dirigeants, en nous préservant de cette tentation de la dévaluation à tout va.
Je ne sais pas si le vaccin de Pfizer, ou celui de Moderna, sera efficace, mais il y a une chose dont nous sommes certains, c’est de l’efficacité de l’Euro. Grâce à l’Europe, grâce à la BCE, et grâce aux Pères fondateurs, notre économie a été épargnée, immunisée contre une grande partie des maux économiques générés par ce virus. Réjouissons-nous que grâce à l’Euro, une partie de notre plan de survie soit financée par les marchés financiers, si honnis par certains. Et en 2022, n’oublions pas que les Onfray, Mélenchon, Le Pen et consorts vociféraient lors des dernières présidentielles contre l’euro et souhaitaient le retour au franc ! N’oublions pas…
Patrick Pilcer
Conseil et Expert sur les Marchés Financiers