L’oreiller est plus qu’un objet. Il est le support de certains conciliabules, où s’échangent les secrets les plus intimes, parfois celui où un chef d’État peut se voir glisser dans le creux de l’oreille un avis qui changera la face de son pays quand ce n’est pas celle du monde. Peut-être que Brigitte chuchota à Emmanuel, il y a quatre ou cinq ans, que son rêve le plus fou serait de passer une nuit, rien qu’une seule, à l’Élysée…
Que n’a-t-on pas déjà entendu sur un oreiller, lorsque les lèvres se rapprochent dans un moment d’extase : « veux-tu m’épouser ? », « on fait un bébé ? » ou, moins extatique, « demain, je demande le divorce ! ». Tant de tournants (et parfois de tourments) de la vie ont pour point de départ le lit mais aussi l’oreiller, confident privilégié de nos paroles les plus intimes.
Loin du glamour (ou de la tempête), l’oreiller, c’est un peu comme le matelas ou la couette : il y en a pour tous les goûts. Larges, étroits (sans oublier les traversins), carrés, rectangulaires ou de forme plus originale pour le design ou l’ergonomie, plus ou moins épais, rembourrés de matière synthétique ou de plumes. Il existe aussi des oreillers hightech, en latex naturel ou mousse polyuréthane à mémoire de forme, parfois pour des motifs tenant autant de la santé que du confort, lorsque le soutien des cervicales est primordial. Il existe même des oreillers connectés qui analysent notre sommeil. Au train où vont les choses, on sera bientôt tellement connecté que c’est notre smartphone qui nous dira quand faire dodo (« mais je ne suis pas fatigué ! ») et quand se retourner dans son lit. Se coucher en deviendrait stressant et sources d’insomnies ?
Pour retrouver trace des premiers oreillers, il faut remonter à l’aube de l’Antiquité, et il est même probable que l’homme de Cro-Magnon, pas plus bête que l’homo-numéricus, ait compris qu’en position allongée, il était plus confortable de surélever légèrement sa tête, de soulager son cou et son dos, et qu’accessoirement, cela éloignait quelque peu la précieuse tête des bestioles grouillant à même le sol. Si on en juge par la position des momies de l’Ancienne Égypte, les Égyptiens, du moins les plus illustres d’entre eux, appréciaient la surélévation extra-ferme perpétuelle : en guise d’oreiller, le rêveur scrutait l’éternité la tête posée sur une sorte de repose-tête rigide. En Asie, en particulier en Chine, l’ancêtre de l’oreiller était aussi à mille années-lumière de nos produits high tech, malgré les matériaux nobles, comme la porcelaine, qui furent parfois employés. Il est vrai que la literie chinoise traditionnelle est plutôt spartiate. On dort, du moins on dormait « à la dure » !
Finalement, ce sont encore les Européens qui furent les initiateurs du farniente dans un lit pourvu d’un oreiller douillet. « Un homme oisif est l’oreiller du diable », dit même un vieux proverbe italien. On ne s’étonnera pas que ce furent les Romains, et sans doute aussi les Grecs antiques (eurêka !) qui eurent l’idée d’utiliser la paille et même la plume pour que la rencontre avec Morphée se déroule dans la plus délicieuse plénitude. Une plénitude que l’on voudrait parfois prolonger au-delà du raisonnable. Ne dit-on pas qu’oublier de se réveiller est une panne d’oreiller ?
Au-delà de toute considération historique ou romantique, l’oreiller n’est pas un simple accessoire. Il participe significativement à la qualité du sommeil, à sa fonction réparatrice. La literie est une chaîne dont chaque maillon mérite la plus grande attention : sommier, matelas, oreiller, et même la couette dans laquelle nous nous abandonnerons prochainement avec délectation…
L’oreiller assure la transmission entre le cerveau et le reste du corps en ménageant, en confortant notre nuque. Il est vital pour notre santé au sens global et plein du terme.
Alors, Mesdames, Messieurs, au moment où rouvrent les magasins essentiels (ils n’étaient non essentiels que pour un quarteron de hauts fonctionnaires zélés), pensez à vous offrir un nouvel oreiller pour Noël, chez Maison de la Literie par exemple qui, entre autres actualités, ouvre une nouvelle boutique sur la superbe place des Victoires au centre de Paris…
Raymond Taube