Edito
05H39 - samedi 5 décembre 2020

L’Écho du silence avec Anne Bassi et « Le Silence des matriochkas ». L’édito de Catherine Fuhg et Michel Taube

 

Elle est chroniqueuse littéraire pour Opinion Internationale. Anne Bassi, amoureuse des livres au point de leur y consacrer presque une deuxième vie, a commis son premier roman. Un petit bijou qui méritait un dossier à la Une d’Opinion Internationale et surtout d’être lu.

Avant-goût en trois parties avec un dossier signé Catherine Fuhg, journaliste et romancière elle-même :

L’Echo du silence avec Anne Bassi et « Le Silence des matriochkas ». L’édito de Catherine Fuhg et Michel Taube

« On ne sait jamais ce que réserve le passé » : entretien avec Anne Bassi, auteure de « Le Silence des matriochkas »

Des Matriochkas au Transgénérationnel. Entretien avec Salomon Sellam

 

Le silence est d’or, nous enseigne la sagesse populaire, qui tire cette inspiration du Talmud paraît-il, nous intimant de celer nos hontes ou peines au fond de nous. Le silence est de plomb, lui répond Anouchka, l’héroïne d’Anne Bassi, qui a payé de son mal-être, le silence de sa grand-mère.

En psychogénéalogie, on parle de ces douleurs indéchiffrables, étrangères, qui nous occupent, nous envahissent, jusqu’à devenir nous. Ces douleurs que l’on ressent sans qu’elles nous appartiennent.

Tout commence par la clé de soi, égarée quelque part entre les générations. Dans le fatras des événements dont on ne peut se souvenir car on ne les a pas vécus, et qui pourtant nous oppressent à travers le silence de nos parents, nos grands-parents, les leurs, et les leurs avant eux. Car les émotions se transmettent au-delà des âges et des lieux par cette « langue riche et complexe que les siècles [ont] formée et bien plus signifiante que les paroles » comme la décrit l’auteure du Silence des matriochkas. Une langue qu’on n’apprend ni ne désapprend. Innée et immuable. La langue de la vérité. Qui s’entend en silence dans les regards de nos anciens.

Mais attention, ne pas confondre avec la langue de l’omission. Qui lui ressemble comme deux gouttes d’eau. Celle des mots que l’on tait. Qui pèseront sur nous, nos enfants et leurs descendants. Car la souffrance d’un seul être peut jeter son ombre néfaste sur des générations.

Ce labyrinthe du non-dit, Anne Bassi invite le lecteur à l’explorer à travers Anouchka, femme chargée d’un silence né dans les années trente, quarante-cinq ans avant elle dans une ville qu’elle ne connaît pas. Son mal-être, l’héroïne l’a hérité de cette ancêtre dont on a voulu oublier les circonstances de la mort. Est-ce à dire que nos âmes nous survivent en nos enfants ? Ou seulement notre vécu qui, se mêlant au leur, nous confondra dans une histoire. Toujours la même. Tous pour toujours indissociables.

Désespérément ? Non. En effet, Anouchka nous montre qu’il est possible de se défaire d’un passé qui étouffe et entrave. Nous suivons sa démarche, grâce à la plume d’Anne Bassi. Nous la voyons attraper le secret par un bout et le dérouler patiemment jusqu’à en défaire les nœuds. Un jeu de persévérance. La liberté le vaut bien.

Dans cette histoire particulière et pourtant si commune, parce que nous nous ressemblons, Anne Bassi ne s’attarde pas sur le détail, l’anecdotique. Elle se concentre sur l’essentiel, ponctuant son récit de formules fulgurantes comme, par exemple, celle-ci, sans doute ma préférée : « On ne sait jamais ce que réserve le passé ».

 

Catherine Fuhg et Michel Taube

 

Commander « Le silence des Matriochkas », Ed. Bérangel, 2020, 16 € 

 

 

 

 

 

 

 

 

Écoutez « Ouvrons la fenêtre », le podcast aéré de Sophie Nouaille consacré à Anne Bassi :

https://podcast.ausha.co/ouvrons-la-fenetre/anne-bassi-le-silence-des-matriochkas

 

 

 

 

 

 

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