Ça y est. Nous ne sommes pas encore à Noël qu’on entend les chefs de service des urgences appeler au confinement. Ils craignent à juste titre la saturation de leur service de réanimation avant la mi-janvier. Et comme il serait insupportable de voir des malades mourir étouffés dans leur voiture, dans une salle d’attente, sur un brancard, devant la porte de l’hôpital ou à leur domicile, il faudra les écouter. Et donc confiner.
Tant pis pour les entreprises et leurs salariés, ceux qui vont perdre leur travail en particulier. Tant pis pour les Français qui vont payer longtemps les aides publiques, si tant est qu’elles perdurent. Tant pis pour les femmes et les enfants battus, bien plus nombreux en période de confinement. Tant pis pour ceux qui n’en peuvent plus, qui sombrent dans l’alcoolisme, la dépression ou qui se suicident. Tant pis pour le lien social qui se désagrège. Tant pis aussi pour ces malades qui diffèrent leur prise en charge, dont certains mourront plus tôt du cancer, ou d’un accident cardio-vasculaire qui aurait pu être évité… 5000 places en réanimation. C’est tout ce qui compte. Et oui, personne n’accepterait qu’il en soit autrement, au moment où l’on s’approche du seuil fatidique, et où les grands pontes de l’hôpital tirent la sonnette d’alarme.
Et après ? Après, au moment du déconfinement, on ne les entend plus. Mais Emmanuel Macron continue de ne jurer que par eux. Ils ne savent rien, ne s’intéressent pas même aux méthodes permettant de retourner à la vie normale. Ils passent le relais aux administratifs. La haute fonction publique hospitalière, les ARS, les huiles du ministère de la Santé.
Pourquoi Emmanuel Macron (son gouvernement ne fait qu’exécuter ses volontés) ne prépare-t-il pas chaque déconfinement en coopération avec les professionnels de santé non hospitaliers ? Les médecins de travail qui savent comment organiser le lieu de travail : négligés. Les infirmiers, les pharmaciens, les médecins de ville, généralistes comme spécialistes : négligés. Ils travaillent pourtant en symbiose avec des syndicats professionnels pour mettre en place des protocoles sanitaires préventifs, qui permettront, enfin, de réussir le prochain déconfinement, celui de février ou de mars 2021. Pour qu’on ne soit pas à nouveau confiné en mai. Pour que l’on ne se retrouve pas avec un total de 100.000 morts et 2 millions de chômeurs de plus à l’été.
Alors oui, écoutons le Conseil scientifique et les chefs de service des hôpitaux quand le navire prend l’eau et qu’il faut écoper à tout va pour éviter le naufrage. Mais dès maintenant, écoutons les autres, professionnels de santé non hospitaliers en particulier, qui savent comment éviter une nouvelle avarie. Une de plus. Une de trop. Le navire France finira par couler si la seule voix qu’entend le Président est celle des services de réanimation. Combien de fois faudra-t-il le répéter ? Comment faudra-t-il le crier, le hurler pour qu’il l’entende ?
Raymond Taube