Edito
12H30 - mardi 12 janvier 2021

Et pendant ce temps, en Chine… L’édito de Michel Taube

 

La disparition de la Covid-19 en Chine, et les images de Wuhan « ville libre » (du Covid !), l’insolente santé économique de l’atelier du monde, suscitent quelques sarcasmes chez les autres terriens dont les libertés sont restreintes. Il est vrai que côté privation de libertés, le Covid est plus efficace que le régime chinois !

Pourtant, la Chine n’en a pas fini avec la Covid. Quelques cas ont été détectés dans plusieurs villes pas très éloignées de Pékin. La réaction des autorités fut fulgurante : les agglomérations de Shijiazhuang et de Xingtai se retrouvent isolées et leurs quelques 18 millions d’habitants confinés. En Chine, on ne badine pas avec le confinement : suspension des transports (trains, métros et autoroutes), fermeture des écoles, omniprésence policière et même dans certaines zones, assignation à résidence des habitants pour une semaine. Et ceux qui sont encore autorisés à se rendre dans la capitale doivent produire un résultat de dépistage négatif de moins de trois jours. Et tout pour un taux de positivité de… 0,03 %, chiffre résultant d’une intense campagne de dépistage engagée à Shijiazhuang, si l’on en croit le maire de la ville ! Officiellement, la Chine compte 4.634 victimes du Covid, alors que la France s’approche inexorablement des 70.000 décès. Et elle semble tout faire pour que le bilan ne s’alourdisse pas, quitte à user des méthodes les plus radicales.

En France, à la table des restaurants (du personnel), les discussions dérivent parfois vers l’évocation d’une grande machination chinoise pour dominer le monde : Xi Jinping ordonne la mise au point d’un virus peu létal, mais très paralysant pour l’économie. On en minimise la gravité, puis on met en place autoritairement des mesures de confinement drastique. On boucle les frontières, ou au moins on s’assure qu’aucun étranger positif n’entre en Chine, mais on fait un scandale à l’évocation de la moindre restriction en sens inverse. Enfin, on reprend l’activité économique à pleins gaz, alors que l’Occident s’enfonce dans la dépression, tant mentale qu’économique, parce qu’en démocratie, il est impossible de mettre en prison tout individu qui ne respecterait pas le confinement ! Ainsi, sans tuer ses clients, mais en les affaiblissant juste ce qu’il faut, on devient la première puissance économique du monde, bien plus rapidement que ce qui était initialement prévu. CQFD !

Ces élucubrations relèvent certainement du complotisme. Du fantasme en tout cas, car un complot implique une entente et ici, le « projet » serait purement chinois. Dans cette dictature obsessionnellement déterminée à dépasser les États-Unis, et dont même la diaspora vivant en démocratie ne désapprouve ni le deal « boucle-là et enrichis-toi » ni l’hyper-surveillance des Chinois, cette hypothèse ne relève certes pas de l’absolu impossible. Du reste, quelques médias et commentateurs chinois ne se sont pas gênés pour accuser les États-Unis d’avoir fabriqué ce virus et de l’avoir introduit en Chine durant les Jeux olympiques militaires de Wuhan, en octobre 2019. 

On relèvera aussi que les autorités chinoises s’évertuent à faire obstacle à toutes les enquêtes sur l’origine de l’épidémie, et même à effacer toutes les traces s’y rapportant. L’Oms est largement empêchée de venir enquêter à Wuhan. Cette volonté de dissimulation ne peut qu’alimenter les rumeurs les plus folles, même si l’on songe davantage à l’accident de laboratoire qu’à l’intention malveillante. Il faut (espérons-le !) être bien plus fou que Xi Jinping (ou Donald Trump) pour jouer à la guéguerre bactériologique, qui finit toujours par se retourner contre celui qui l’a déclenchée. Les analyses de l’origine de la pandémie s’affinent et vont dans une autre direction : les élevages chinois de visons et de chiens viverrins, deux animaux à fourrure, sont désormais dans le collimateur. 

Toujours est-il que la Chine est un des rares pays de la planète à être en croissance économique (8% attendus pour 2021), les autres étant même en forte récession et peut-être rapidement en dépression si les confinements devaient s’enchaîner et les pouvoirs publics toujours incapables d’imposer le dépistage, l’isolement des positifs, le télétravail partout où cela est possible, le port effectif du masque dans les transports, le nettoyage des mains à l’entrée des magasins, etc. 

Le Covid-19 est né en Chine. Cela semble acquis. Rien ne permet de subodorer que ce soit un accident de laboratoire et encore moins une arme bactériologique, utilisée comme telle. Et rien ne permet de douter que la place de la Chine sur l’échiquier économique et même géopolitique mondial ne cesse de s’améliorer depuis le début de la pandémie.

 

Michel Taube

 

 

 

 

 

 

 

Directeur de la publication