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07H45 - mercredi 27 janvier 2021

Châlits d’Auschwitz, lits de torture

 

Le lit évoque le repos, la détente et la paix. L’amour et l’intimité. On rêve de s’y réfugier à la fin d’une rude journée. D’y inviter celle, ou celui, objet de tous nos désirs. On sait qu’il nous attend, au carré ou en bataille, bras ouverts pour nous accueillir. On se jette sur lui, le corps las ou recrus de douleur, on lui confie notre âme, ses peines, il y remédiera. À l’occasion, on s’y ébat. Le lit est toujours notre allié.

Il y a soixante-seize ans aujourd’hui, l’Armée rouge entrait dans Auschwitz libérant 7 000 survivants, malades ou invalides, laissés là pour mourir par les soldats de la SS.

À Auschwitz Birkenau, Buchenwald, Mauthausen, Treblinka, Theresienstadt, et trop d’autres encore… dans les camps de concentration ou d’extermination, le lit appartenait à un monde disparu. Avait-il vraiment existé ? Dans ces lieux monstrueux, maudits, aucun recoin tranquille, aucun abri possible contre la barbarie. Le mal s’infiltrait partout entre les planches, les briques, des châlits, des baraquements, à travers les paupières, jusque dans le sommeil.

Sur chacun de ces grabats, superposés sur trois à six étages suivant les camps, s’entassaient quatre déportés, six en période d’affluence, c’est-à-dire lorsque du sang neuf arrivait par convoi. Sous les températures glaciales de l’hiver d’Europe centrale, le chauffage des dortoirs, dans lesquels tentaient de dormir entre huit cents et mille personnes, consistait en une cheminée à chaque extrémité des constructions rudimentaires. Il ne s’agissait pas de pourvoir au confort des prisonniers la nuit, mais de limiter le nombre de morts par hypothermie – on en sortait environ, de chaque baraquement, une dizaine par nuit.

Vêtus du tristement célèbre uniforme rayé qui leur servait à la fois le jour de tenue de travail et la nuit de pyjama, les détenus enroulés dans une mince couverture subissaient, outre le froid et la promiscuité, le supplice de la vermine – poux, puces ou punaises – qui infestait le camp, y propageant la maladie.

Dans ces lits de l’enfer, seuls les morts trouvèrent le repos.

 

Catherine Fuhg

 

 

 

 

 

 

 

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