Le Nouvel An chinois est l’occasion d’adresser nos vœux de bonne santé et de joie à tous les Asiatiques d’Asie, d’Europe et du monde. Et de nous pencher sur cet objet familier, le lit, qui souligne, lui aussi, à la fois les différences culturelles et les formidables rapprochements entre la civilisation chinoise et l’Occident.
En matière de literie, la culture asiatique n’est pas celle de l’Europe, ou plus généralement de l’Occident. Le futon est généralement associé au Japon, même s’il y fut en réalité importé d’Inde et de Chine. Les Chinois, notamment en zone rurale, sont parfois restés fidèles au futon ou à ses dérivés : pas de sommier, mais un matelas fin, en général de moins de dix centimètres d’épaisseur, qui se roule et se range au levé. Même si les matelas en mousse peuvent aujourd’hui être extrêmement fins et néanmoins amortissants, à l’instar d’un tatami de judo, la couche chinoise est généralement plus ferme, bien plus ferme que la couche européenne. On dort à la dure, peut-être comme on travaille !
Mais en Chine aussi, la tradition se fissure. Les Chinois, les jeunes en particulier, sont friands de haute technologie, de modernité, de voyage… de confort. Mais celui-ci restant encore marginal au pays des mandarins et des dragons (surtout ceux qui défilent dans les rues à l’occasion du Nouvel An chinois), les colonnes vertébrales chinoises privilégient encore la literie ferme, même lorsqu’elles lorgnent vers le modèle occidental, l’ensemble sommier matelas privilégiant le confort.
Ceci dit, doivent-ils abandonner si vite leur tradition car dormir sur du dur, ce serait bon pour le dos…
Erwan Donval, directeur général du groupe Maison de la Literie, partenaire de notre Saga du Lit dominicale, connaît bien la literie chinoise. L’entreprise est implantée en Chine et réussit le tour de force d’y vendre du made in France en Chine, alors que les Chinois savent évidemment fabriquer des lits. Mais en matière de confort nocturne, de haut de gamme, de luxe, en haute couture comme en literie, le made in France, c’est une distinction que s’arrachent ceux qui en ont les moyens. Une literie française, arborant avec la fierté du coq gaulois le drapeau bleu blanc rouge, c’est comme une montre suisse : ce qui se fait de mieux.
Bien sûr, il a fallu adapter les produits au marché : le plus souple des matelas vendus en Chine serait considéré comme une planche de bois par la plupart des Français, alors que notre conception de l’ultra-fermeté appliquée à la literie leur donnerait l’impression de s’enfoncer dans la vase !
Le lit chinois, ce n’est pas que la fermeté du matelas. C’est aussi des draps colorés (du rouge, notamment), des fleurs, des idéogrammes. Le design évolue, et les Chinois en sont aussi friands que de nouvelles technologies. Mais tout en conservant leur héritage culturel et le respect du savoir-faire importé.
L’homme d’affaires de Shanghaï qui peut s’offrir un lit français à 80.000 euros est comme celui qui s’offre une montre Rolex ou Patek Philippe, et non une montre connectée.
À chacun son univers ! Mais tous se rejoignent pour se souhaiter mutuellement un Nouvel An chinois prospère et libéré de la Covid.
Michel Taube