Billet de Catherine Fuhg
14H54 - jeudi 22 avril 2021

George Floyd, son meurtrier condamné, ce n’est qu’un début…

 

Il aura fallu au jury des vidéos prises sur le vif, des centaines de manifestations, un procès de 15 jours, l’audition de 44 témoins et dix heures de délibération, pour reconnaître Derek Chauvin, ancien policier de Minneapolis, coupable du meurtre de George Floyd. L’annonce de ce verdict a arraché des cris, de victoire pas de joie, et aussi beaucoup de larmes à travers tout le pays. Le président Biden lui-même, qui avait déclaré prier pour qu’un « bon verdict » soit rendu, s’en est félicité, parlant « d’un pas de géant vers la justice » dans un pays souffrant « d’un racisme systémique ». Il s’agit pour beaucoup d’un moment historique. Car malgré les preuves accablantes, la partie n’était pas, et de loin, gagnée d’avance.

Le 25 mai 2020, soupçonné d’avoir payé avec un faux billet de vingt dollars, George Floyd est interpellé. Son arrestation dégénère, et un des policiers le jette au sol et l’y maintient, un genou sur la nuque pendant neuf minutes et vingt-neuf secondes. À plusieurs reprises, George Floyd se plaint de ne pas pouvoir respirer. Il supplie, pleure, appelle sa mère, puis se tait. Il a rendu son dernier souffle depuis plus de quatre minutes lorsque Derek Chauvin, lunettes de soleil sur le crâne, relâche enfin sa prise.

Dans son plaidoyer, la défense a affirmé que la raison du décès de George Floyd était son cœur « trop gros ». Pour le procureur, il est mort parce que « Derek Chauvin a un cœur trop petit ». Mais sans doute George Floyd a-t-il aussi été victime de l’impunité dont jouissent les policiers aux USA. En effet, chaque année, près de deux cent cinquante Afro-américains, hommes, femmes, adolescents, meurent sous les balles de la police (les Afro-américains sont 13,4 % de la population des États-Unis, 50 % des victimes de violences policières). Selon les statistiques, un homme noir risque cinq fois plus qu’un homme blanc d’être arrêté sans raison. Au point qu’il est normal dans cette communauté d’inviter un jour ses enfants à une conversation – ils appellent ça le « talk » – pour les prévenir du danger que représentent pour eux les forces de police dont la devise est « servir et protéger » et leur expliquer quoi faire et surtout ne pas faire pour survivre en leur présence.

On en parle et on tremble. Car nul est à l’abri. Et il n’y a aucun répit. Ainsi, le 11 avril, en plein procès Derek Chauvin, et à quelques encablures du palais de justice, Daunte Demetrius Wright, 20 ans, est tombé sous les balles d’un policier à Brooklyn Center dans le Minnesota. Il était Noir, désarmé, innocent.

Le nom de George Floyd rejoint ainsi ceux d’Emmet Till, lynché à l’âge de 14 ans pour avoir eu une « interaction » en public avec une blanche, de Rosa Park qui avait refusé de céder son siège à une blanche dans un bus, de Malcolm X et Martin Luther King, dans l’histoire du mouvement pour les droits civils aux USA. Ce mouvement qui en théorie s’est terminé en 1968 semble pourtant avoir encore une immense tâche à accomplir.

 

Catherine Fuhg

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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