Mais non, je n’ai pas confondu midi avec minuit. Loin de moi de vouloir parler des galipettes en chambre de mâles de cinquante ans, de retour d’âge, d’adultère ou autres marivaudages. Les démons de midi et leurs exploits, ou pas, au lit ne m’intéressent aucunement. On en a tellement croisé, dans la vie ou les romans, de ces hommes qui se lancent sur le tard dans la chasse à la jeunette avant le plus souvent de retourner dans le giron de leur compagne de trente ans. Car il ne suffit pas de l’attraper, la jeunette, il faut ensuite suivre son rythme. Aussi, andropause ou pas, la plupart jettent l’éponge et rentrent à la maison, parce que le confort, la routine ont finalement de bons côtés. Des histoires peu excitantes, donc, surtout comparées à celles des incubes et succubes, que je vais vous narrer.
Qui sont donc ces démons aux noms géométriques ?
Commençons par le succube – honneur aux hommes, pour changer – femme ailée de fatale beauté à laquelle les mâles succombent alors qu’assoupis dans leur lit. Le dessein de ce démon est de séduire ses victimes avant de les abandonner pour les punir. De quoi ? Mystère. Sournoise, elle peut aller, pour arriver à ses fins, jusqu’à prendre les traits de l’épouse chérie disparue. Diantre ! On rencontre cette créature dans de nombreux pays, mais toujours dans un lit, sous des noms différents. Ainsi, en Mésopotamie, elle s’appelle Ninsikila, chez les Hébreux Lilith, première femme présumée d’Adam, Szeged pour les Hongrois, Iakout en Sibérie, ou encore Dorlisse aux Antilles. Irrésistiblement mauvaise, elle ne se contente pas toujours de faire subir à ses victimes, endormies, les derniers outrages. Elle étouffe dans certaines légendes ceux qui lui ont cédé, voire dévore leurs enfants. Aussi, les gars, un conseil, si elle débarque dans vos rêves, virez-la, et sans hésiter.
Côté démon de minuit, les femmes ne sont pas en reste. Mais attention, que ces dames ne se réjouissent pas trop vite. En effet, contrairement à son pendant féminin, l’incube – petit nom savant de celui qui les assaille au milieu de la nuit – ne se foule pas pour soigner son apparence. Pourquoi se mettre en frais, alors qu’il s’impose par la force ? Il est velu, débraillé, avec des pieds de bouc. Parfois, il se présente même sous la forme d’un animal. Cerise sur le gâteau, il se montre vicieux, s’attaquant plus volontiers aux nonnes et aux femmes mariées. Le traître !
Décidément, n’est-on jamais vraiment tranquilles dans la vie ? Mais si, ne nous emballons pas. Nous savons tous, voyons, que les démons n’existent pas. Ne gâchons pas notre plaisir de retrouver notre lit avec des superstitions. Morphée, un beau jeune homme, aux ailes de papillon, nous y attend les bras ouverts avec ses fleurs de pavot…
Catherine Fuhg