Elle a expédié son petit déjeuner, pour se poser cinq minutes sur le canapé du salon et rattraper les dizaines de messages et de posts, sur Instagram, Twitter, Whatsapp, TikTok, Telegram et autres réseaux sociaux, arrivés pendant qu’elle dormait. Autant dire des urgences.
« Va faire ton lit ! » lui lance son père qui l’aperçoit oisive, par la porte entrouverte. En réponse, elle marmonne un « ouaich » exaspéré. Faire son lit maintenant ! Alors qu’elle est débordée… Elle sait qu’elle n’y coupera pas, mais grappille quelques instants avant que le paternel repasse par là et lui répète son « va faire ton lit » énervant, cette fois d’un ton impatient : le signal pour elle d’y aller.
N’est-ce pas à cette injonction qui sonne comme une punition que beaucoup, même adultes, doivent le sentiment que faire son lit est une corvée ? Car tout, ou presque, nous le savons, est question de présentation. Par exemple, pour faire avaler du foie à son enfant, rien de tel que le coup de la fourchette avion. Vroum vroum, la voilà qui décolle avec son chargement « le foie, berk, c’est dégoûtant », elle s’envole de l’assiette, virevolte en sifflant avant d’arriver à larguer le morceau de viande exécré, dans la bouche bée de l’enfant. Et ça passe. La plupart du temps.
Ainsi, j’en suis convaincue, un brin d’imagination pourrait aisément transformer cette corvée du « faire son lit » en un rituel convivial. Ou pourquoi pas en un jeu – avec ou sans récompense pour intéresser la partie. Ou encore en un art. « Pfft, c’est ça, pensez-vous, comme si on avait le temps pour ce genre d’exercices, avant de partir au boulot ?! » J’entends cet argument. Mais je vous répondrai : pourquoi ne pas essayer, si cela permet d’échapper à un des frittages quotidiens avec nos adolescents ?
Je ne prétends pas vous dévoiler ici toutes les solutions, mais proposer des pistes. La première est d’en faire une activité ludique, à pratiquer en famille. Tous ensemble, chacun dans sa chambre. On crie à travers la maison : « À vos marques, prêts… » Et c’est parti. Il y aura des ratés et au moins des bâclés, mais certainement aussi des rires. Et petit à petit, avec le temps et l’entraînement, les résultats seront là et ces instants laisseront sans doute d’excellents souvenirs.
On peut aussi s’amuser à faire le lit à deux, un parent avec un enfant, et profiter de ce moment pour se raconter ses rêves, des histoires qu’on aura lues ou des anecdotes vécues. Oups ! c’est déjà fini. On regrettera souvent d’en arriver au couvre-lit et de n’avoir qu’un seul lit.
Ma dernière piste du jour, ma préférée, je l’avoue, consiste à commencer par créer le désordre. Les enfants adorent ça. Dès le lever, on rabat couvertures et couettes, on retire le drap housse, pour aérer la literie, on bat les oreillers et on laisse la chambre en bazar – le bazar, c’est la vie –, le temps du petit déjeuner. Revenus, rassasiés, on mettra de la musique et, en dansant et chantant, on étendra les draps au-dessus de nos têtes, à la manière d’un dais nuptial, on les posera, les tirera, les bordera, et le temps d’une chanson, on en aura terminé.
Quant à ceux qui ignorent le B.A. BA de cette pratique, ou qui veulent se perfectionner, je leur recommande une visite sur le site wikiHow, une encyclopédie en ligne du « comment faire ». Des milliers de tutoriels. Dont des dizaines sur « faire le lit ». On y trouve par exemple : « comment faire un lit au carré », « comment se motiver pour faire son lit », et bien d’autres encore.
Amusez-vous bien.
Catherine Fuhg