Si la pandémie du Covid 19 a été un formidable accélérateur de l’unité et de la solidarité des 27 pays membres de l’Union européenne tout autant que leur émancipation » des totems » des règles budgétaires et de la dette, la mise en place d’une véritable politique sociale en est une nouvelle conséquence.
Les dirigeants de l’UE, réunis à Porto, sous la présidence portugaise de l’Union, ont décidé de bâtir une Europe plus sociale, encouragés en cela par l’importance des dégâts économiques et financiers dans tous les pays, provoqués par le virus chinois. Certes, le plan de relance de 750 milliards va aider les Etats et les entreprises à accélérer la sortie de crise et permettre à l’Europe de retrouver les chemins de la croissance. Mais quand il y a plus de 20 millions de travailleurs vivant dans la pauvreté, près de 700 000 personnes dormants, chaque nuit, dans les rues des villes européennes et le risques d’insurrections sociales, il faut « corriger cela ».
« Il est temps d’agir pour développer le pilier social » a affirmé le premier ministre Antonio Costa. Bien que les politiques sociales relèvent des compétences nationales, le Sommet de Göteborg, en 2017, avait adopté le socle européen des droits sociaux à travers trois chapitres, l’égalité des chances et l’accès au marché du travail, des conditions de travail équitables et plus de protection et d’insertion sociales.
Ces recommandations doivent maintenant être transformées en mesures concrètes, ce, malgré les résistances classiques des pays » frugaux », les pays du Nord attaché à leur modèle de négociations collectives et les pays de l’Est qui, eux, ont peur de perdre leur compétitivité ; la France, l’Italie, l’Espagne, le Portugal et la Grèce étant eux, favorables à l’harmonisation sociale.
En attendant, les 27, soutiennent le « plan d’action » de la Commission européenne, lequel, prévoit pour l’UE, à l’horizon 2030, de permettre à 78% des personnes entre 20 et 64 ans d’avoir un emploi, la formation, chaque année, de 60% des adultes et la réduction de 15 millions (dont 5 millions d’enfants) du nombre de personnes menacées de pauvreté.
Un consensus se dégage, sous la houlette du président Emmanuel Macron, sur le salaire minimum, le droit à la formation, l’égalité homme-femme, des conditions de travail décentes. La présidence française de l’UE au premier semestre 2022, au nom d’un » capitalisme responsable », tentera de faire respecter dans l’UE, le droit international du travail et du fait de ses standards sociaux élevés, favorisera la convergence des modèles sociaux pour empêcher le « dumping social »
Nombreux sont ceux qui pensent que cette politique sociale ambitieuse ne pourra se concrétiser sans repenser le modèle économique de l’UE.
Néanmoins, ce Sommet de Porto aura permis de faire mentir la prédiction du philosophe allemand, Peter Sloterdijk sur « l’Europe qui tiendrait de l’Association de consommateurs » et d’affirmer « l’Europe puissance » sur les vaccins en faisant la leçon aux Etats-Unis et à la Grande-Bretagne leur demandant qu’avant la levée des brevets des vaccins, il fallait, comme l’Union européenne, être solidaire des pays pauvres en leur envoyant des millions de doses au lieu de les garder !
Michel Scarbonchi
Ancien député européen, consultant international