L’édito de Michel Taube
Dans un communiqué du 25 mai intitulé « Obligation n’est pas un gros mot quand il s’agit de vacciner contre la Covid-19 », l’Académie de médecine exprime son souhait de rendre progressivement obligatoire la vaccination contre le Covid-19, d’abord au bénéfice des catégories professionnelles les plus exposées ainsi que pour les enfants et adolescents. Elle estime que les résistances à la vaccination sont si importantes qu’elles empêchent d’atteindre une immunité collective, et ainsi de sortir de l’épidémie.
Le 9 mars dernier, l’Académie de médecine avait déjà recommandé la vaccination obligatoire des soignants, en écho à l’appel de Daniel Guillerm, Président de la Fédération Nationale des Infirmiers.
En novembre 2020, près de la moitié des Français n’avaient pas l’intention de se faire vacciner. Un record mondial ! Six mois plus tard, la tendance s’est inversée, mais les résistances sont encore fortes, alimentées par d’obscurs et orduriers personnages comme Jean-Marie Bigard (« Buzyn, crève ! » ou « Et pourquoi, ils ne nous colleraient pas l’étoile jaune ? » s’agissant du pass sanitaire…).
On approche du « plafond de verre », ce moment fatidique où les vaccins anti Covid, et pas seulement l’AstraZeneca, imprudemment fusillé par une communication gouvernementale erratique, ne trouveront plus preneurs. Emmanuel Macron, déjà en campagne pour sa réélection, sera alors face à ses responsabilités. La France peut-elle être le seul pays de l’OCDE à ne pas sortir de la crise pour cause de résistance abusive à la vaccination ?
Certaines craintes peuvent se comprendre. C’est le lot de toutes les innovations. On aurait pu notamment proposer des traitements comme l’hydrochloroquine ou l’artemisia tout en développant les vaccins. La pédagogie devraient estomper ces craintes. Hélas, il n’est pas un volet du Covid qui n’ait été un motif de querelle entre scientifiques. Le communiqué de l’Académie de médecine ne fait évidemment pas exception.
Mais sauf quelques exceptions, la communauté scientifique reconnaît l’utilité et l’efficacité du vaccin, quand bien même faudrait-il se vacciner chaque année en raison de la prolifération des variants. Cela n’a rien d’extraordinaire, puisque c’est déjà le cas de la grippe. Et peu importe qu’il en résulte un enrichissement des laboratoires ! La construction d’écoles et d’hôpitaux enrichit les entreprises du BTP. Faut-il renoncer pour autant à bâtir des écoles et des hôpitaux ?
La pédagogie consiste à rappeler l’extraordinaire progrès humain qu’est la découverte des vaccins, d’expliquer les résultats obtenus sur la planète depuis la géniale invention de Pasteur, et d’être transparent sur le ratio bénéfices-risques, non seulement pour les différents vaccins contre le Covid, mais aussi pour tous les autres, notamment ceux qui sont déjà obligatoires, au nombre de onze depuis 2018, dont la plupart sont injectés aux nourrissons ou jeunes enfants. Rappelons-les : la diphtérie, le tétanos, la poliomyélite, – l’haemophilius influenzae B (pneumopathies et méningites), la coqueluche, l’hépatite B, la rougeole, les oreillons, la rubéole, le méningocoque C (méningites), le pneumocoque (pneumopathies et méningites). Aucun de ces vaccins ne présente un risque zéro, mais sans eux, la France (et les autres pays ayant imposé la vaccination) ne serait pas ce qu’elle est.
Alors que plus d’un milliard de personnes sont vaccinées contre le Covid sur les cinq continents, rien ne permet de considérer que les vaccins anti-Covid sont plus dangereux que les autres. En revanche, il est acquis qu’un échec de la stratégie vaccinale serait dramatique. La France n’aurait le choix qu’entre carnage sanitaire (108.000 morts, n’est-ce pas déjà un carnage ?) et effondrement économique et social, qui serait aussi un désastre sanitaire, puis une crise politique, morale, psychiatrique…
Refuser de se faire vacciner au nom de la liberté individuelle procède du même égoïsme que serait l’opposition aux onze vaccins déjà obligatoires. Combien de fois faudra-t-il leur répéter que leur liberté s’arrête là où commence celle des autres, de ceux qui veulent vivre, travailler, s’amuser NORMALEMENT, qui aspirent se protéger et à protéger leurs proches. Si la condition du retour à cette normalité est l’immunité collective, si celle-ci ne peut être atteinte sans vaccination de 80 % au moins de la population, alors les pouvoirs publics doivent assumer leur responsabilité, comme les y autorise la Cour européenne des droits de l’Homme depuis un arrêt du 8 avril dernier (voir article dans Opinion Internationale), CEDH à laquelle les antivax dogmatiques, qui sont souvent aussi des complotistes, veulent donner des leçons de droitdel’hommisme.
Le pire est que la plupart des antivax sont aussi contre le passeport sanitaire (nous avons mentionné Bigard, traité d’alcoolique par Marlène Schiappa), et contre toutes les mesures de restrictions. Ils sont certainement aussi contre les limitations de vitesse, voire contre tout le Code de la route. Ils devraient y ajouter le Code pénal, et finalement, toutes les lois. Vive l’anarchie, en somme. Elle fut toujours l’antichambre de la dictature…
Si le prix du retour à la normalité est la vaccination obligatoire, il faudra écouter l’Académie de médecine. Si l’on peut y arriver avec un passeport sanitaire, alors pourquoi ne pas s’en satisfaire ? Mais il est peu probable qu’on puisse le cantonner aux grands événements (concerts, rassemblements de plus de 1000 personnes…). Tant pis pour ceux qui refuseront à la fois le vaccin et le test PCR. Ils n’iront ni au restaurant ni au cinéma ni dans les magasins. C’est notre liberté qui est en jeu. Et ceux qui la mettent en danger ne sont certainement pas ceux qui veulent rendre le vaccin et/ou le passeport sanitaire obligatoires.
Michel Taube
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