Dormir, nous l’avons vu dans le premier volet Japon, est un art qui se conjugue différemment suivant les lieux. Et la literie aussi. Ce qui s’explique, sans nul doute, par l’environnement : la faune, la flore et le climat. Au Brésil, par exemple, où s’étendent 60 % de la plus grande forêt au monde, la forêt amazonienne – elle compte, selon les experts, quelque 400 000 milliards d’arbres –, ainsi que les forêts Atlantique et Caatinga et la savane du Cerrado, le peuple a adopté comme mode de couchage le hamac. En effet, traditionnellement et jusqu’aujourd’hui, les Brésiliens pour la plupart ne dorment pas dans des lits, mais au creux de ces tissus, souvent joliment bariolés, tendus entre deux arbres – et, à défaut, d’un pic ou d’un mur à l’autre.
J’ai bien dit « adopté », car le hamac est né ailleurs. En Haïti d’après certains, en Amérique centrale pour d’autres : chez les Mayas. Les Indiens y auraient dormi suspendus au-dessus du sol, à l’abri des serpents, de la vermine et de l’humidité. Si son origine se discute, celle de son nom s’impose : les peuples de Haïti, Taïnos et Arawak, l’appelant hamacu. Le mot hamac par ailleurs désignerait dans leur langue l’écorce d’un arbre qui servait à la fabrication d’une fibre textile. Tout se tient.
À la suite des grandes découvertes, le hamac fut introduit dans la marine, marchande puis militaire, où il porta le nom de « branle », pas franchement poétique, qui nous donna cependant l’expression branle-bas de combat – on décrochait son hamac et l’enroulait pour s’en protéger en cas d’attaque. Ce couchage, entre autres avantages, prévenait le mal de mer.
C’est à Christophe Colomb, qui l’avait baptisé « nid des anges », que nous devons son arrivée en Europe, où de manière générale l’on s’y couche en long plutôt qu’en rond, comme les natifs d’Amérique, pour se détendre voire sommeiller le temps d’une petite sieste, mais non pour y passer la nuit. Pourtant, il s’en dit beaucoup de bien. Selon une étude menée par des neurologues suisses, bercé par son mouvement, on s’y endormirait plus facilement que dans un lit. Outre les neurones, il détendrait aussi le dos. Enfin, dans son creux, les bébés s’y sentiraient en sécurité, comme dans le ventre maternel.
Et pour terminer, quelques faits :
- En Amérique centrale et dans les Caraïbes, il n’était pas rare d’utiliser le hamac, outre pour dormir, pour pêcher – tel un filet.
- Au XIXe siècle, les prisons britanniques avaient remplacé les lits par des hamacs pour économiser en place et en coût.
- Enfin, le vaisseau spatial Apollo 12 était équipé de hamacs pour assurer un meilleur sommeil aux astronautes.
Catherine Fuhg