Santé / Covid
07H43 - samedi 26 juin 2021

Emilie Jaumain décédée il y a deux ans : quand l’INRAE se comporte comme le laboratoire de Wuhan en matière de Covid ! L’édito de Michel Taube et Raymond Taube

 

Article paru le 17 juin 2021

Alors que l’hypothèse d’un accident de laboratoire qui serait à l’origine de la pandémie de Covid-19 continue de faire son chemin, principalement du fait du black-out imposé par les autorités chinoises, une autre affaire, cette fois bien française, met en cause l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAE), dont une salariée, Emilie Jaumain, est décédée dans d’horribles souffrances le 17 juin 2019 à l’âge de 32 ans, des suites de la maladie de Creutzfeldt-Jakob, dont tout porte à croire qu’elle l’a contractée lors d’un accident de laboratoire. 

Le conjoint de la victime ainsi que ses parents ont déposé plainte pour « homicide involontaire » et « mise en danger de la vie d’autrui », reprochant à l’INRAE plusieurs manquements graves en matière de sécurité de ses salariés. Leurs avocats, Maîtres Marc et Julien Bensimhon, nous ont apporté quelques édifiantes précisions qui en disent long sur l’état d’esprit qui règne au sein de ce laboratoire public. 

Esprit de Wuhan (ou de Tchernobyl), es-tu là ? On peut effectivement se poser cette question, non seulement du fait de l’attitude de l’INRAE, mais aussi des suites de l’enquête nationale diligentée par le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Ses conclusions, comme on s’en doutait, sont que tout va bien, Madame la Marquise : les laboratoires où sont manipulés des agents toxiques et même mortels sont parfaitement sûrs. C’est digne du gouvernement chinois, mais le rappel à la catastrophe nucléaire de Tchernobyl, et au génie des douaniers français qui n’ont pas laissé le nuage radioactif franchir nos frontières, nous ramène bien à une culture nationale de l’opacité, voire de l’omerta. Cela rappelle également le début de la crise du Covid-19 et les mensonges sur l’inutilité du port du masque.

Outre la plainte sus-évoquée, toujours à l’instruction, une procédure est en cours devant le tribunal administratif, en tant que juge des relations entre l’administration et ses agents (le conseil de prud’hommes de la fonction publique, en quelques sortes). Son but est la reconnaissance du lien de causalité (de cause à effets) entre la coupure accidentelle subie par Emilie Jaumain et le fait qu’elle ait contracté la maladie de Creutzfeldt-Jakob. Force est de déplorer l’acharnement dont fait montre l’INRAE pour nier ce lien de causalité, malgré l’accumulation des indices et même des éléments probants. Ceci a quelque chose de profondément choquant, à certains égards, de ridicule. En effet, l’INRAE a reconnu qu’il s’agissait d’un accident du travail. Ensuite, il fait obstacle à l’établissement de la vérité en refusant de communiquer au juge administratif les éléments qui la révèlerait, au point que le président du Tribunal administratif de Paris lui a fait injonction de les communiquer. S’ajoute le fait que la plainte, initialement déposée au parquet de Versailles, a été transmise au pôle santé publique du parquet de Paris, eu égard à sa gravité et à sa dimension nationale, et qu’il en résulte une enquête confiée à la section de recherche de la gendarmerie. 

Le seul moyen de défense de l’INRAE consiste à nier le lien de causalité au motif qu’Emilie aurait peut-être, comme potentiellement tous les Européens, consommé de la viande contaminée lors de la crise de la « vache folle ». Non seulement ce positionnement est contredit pas les faits, en particulier la reconnaissance d’accident du travail par l’employeur, mais le rapport établi par l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris, où Emilie Jaumain avait été prise en charge, a confirmé que la maladie peut trouver son origine dans une contamination accidentelle par exposition à un agent bovin ou à l’agent de la maladie de Creutzfeldt-Jakob. L’équipe médicale avait alors admis qu’eu égard à la période d’incubation de 8 ans, et au fait qu’Emilie Jaumain s’était coupée en 2010 en manipulant des prions contaminés avec une pince coupante non règlementaire (elle aurait dû être en plastique), sans porter de gants anti-coupure obligatoires, cet accident de laboratoire semble bien être la cause unique et directe de la maladie qui l’emporta. 

Comme Maîtres Marc et Julien Bensimhon l’ont indiqué à Opinion Internationale, tout accable l’INRAE : outre le matériel non règlementaire dans un tel laboratoire, les personnels qui manipulent des prions mortels ne sont pas formés et pas même encadrés, même s’ils débutent dans ces missions périlleuses, comme ce fut le cas d’Emilie, âgée de 25 ans au moment de l’accident. Ces jeunes chercheurs ou laborantins sont quasiment livrés à eux-mêmes et ni alertés, ni protégés contre les dangers qui les guettent. 

Cerise mortelle sur le gâteau, après la coupure de la jeune femme, le protocole consistant à désinfecter la plaie sur-le-champ à l’eau de javel n’a pas été respecté. Elle fut sortie du laboratoire (autre imprudence !) et dut attendre 15 longues minutes avant le nettoyage de la plaie, sans avoir été examinée par un professionnel de santé. 

Négligences en cascades, accumulation d’impudences relevant de l’amateurisme et du mépris pour la santé et la sécurité des personnels, on ne voit pas comment l’INRAE pourrait échapper à ses responsabilités. Car même si la justice devait estimer qu’il demeure une infime possibilité qu’Emilie ait contracté la malade de Creutzfeldt-Jakob en ingérant de la viande contaminée, l’ensemble des éléments versés au dossier, et le refus obstiné de transparence de la part du laboratoire public ne donnent à cette thèse qu’une valeur purement hypothétique. A minima, les manquements de l’INRAE ont occasionné à Emilie une perte de chance, comme il se dit en langage juridique, de ne pas tomber malade et donc de vivre. Cette perte de chance est si immense qu’elle en devient le lien de causalité entre « le fait dommageable » (la coupure) et le préjudice fatal qui est a résulté.

Cette affaire est exemplaire et mérite le plus grand retentissement, car on (la France) ne peut s’ériger en donneur de leçons à l’égard des autorités et des laboratoires chinois si on ne se comporte de la même manière en France. Emilie Jaumain a eu tort de faire confiance à l’institution de recherche publique. Ses ayants droit, mais aussi tous les citoyens français ne peuvent accepter que ladite institution refuse de faire toute la transparence sur un accident du travail d’une pareille gravité, qui plus est après l’avoir reconnu. C’est grotesque et absurde. À moins qu’il s’agisse de dissimuler une situation globale, ce qui en ferait une affaire politique, peut-être une affaire d’État.

Ce 17 juin, deux ans après le décès d’Emilie, l’association Emilys constituée en sa mémoire, manifestera devant le laboratoire où elle s’était mortellement blessée. Elle demande que la transparence soit faite et que le lien de causalité soit reconnu par l’INRAE, indépendamment de la procédure judiciaire. 

Mais l’INRAE n’est-il pas déjà dans une logique de fuite en avant, d’omerta, de Wuhan ou de Tchernobyl ?



 

Michel Taube et Raymond Taube, rédacteur en chef et directeur des contenus d’Opinion Internationale, directeur de l’IDP – Institut de Droit Pratique

 

 

 

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