Edito
15H30 - mercredi 28 juillet 2021

Et si le pass sanitaire était un argument commercial pour les restos ?

 

Les restaurateurs et cafetiers du Calvados, du moins ceux de la Côte Fleurie, ont-ils tout compris ? À Deauville ou à Trouville, la plupart d’entre eux exigent de leurs convives un passe sanitaire pour s’installer à leur table. L’initiative appartient à la préfecture, mais l’expérimentation est basée sur le volontariat. Si elle fait parfois perdre quelques clients aux établissement concernés, combien leur en fait-elle gagner ?

La majorité des Français, que l’on n’entend pourtant jamais, aspire à retourner à la vie normale. Ils ont bien compris que le vaccin réduit significativement le risque de transmettre, et bien plus encore celui de contracter le Covid, a fortiori une forme grave. La protection n’étant pas totale, il est tellement plus rassurant de se retrouver dans un environnement sain, quand on sait que le variant Delta est extrêmement contagieux, et qu’il suffit d’une brève exposition à une personne infectée pour l’être à son tour.

Sur la Côte Fleurie, la perte de clientèle dans les restaurants est par conséquent compensée par la sécurité qu’offre le pass sanitaire à ceux qui seraient, à juste titre, réticents à fréquenter un établissement d’où il pourrait ramener la maladie. C’est encore plus vrai hors lieu de villégiature, où la tendance des vacanciers est naturellement de prendre quelques aises avec les contraintes du quotidien.

Au lieu de pester contre le pass sanitaire, les restaurateurs ne devraient-ils pas s’en réjouir et même en faire un argument commercial avant même qu’il devienne obligatoire, et ce même si le Conseil constitutionnel, animé par des considérations plus politiques que juridiques, devait censurer cette disposition ? Ces mêmes restaurateurs, auxquels il a été fait grâce du contrôle de l’identité de leurs convives (cela se fait pourtant très bien, très vite et à plusieurs reprises, avant d’emprunter un avion) ont été parmi les mieux protégés par le « quoi qu’il en coûte », et ont obtenu l’extension des terrasses, parfois au-delà du supportable pour les riverains. Et voilà que se diffuse l’argument de l’immense perte de temps résultant du contrôle des pass sanitaires, avec un considérable préjudice économique à la clé. Un prétexte à une nouvelle demande de subvention ? Préfèrent-ils un couvre-feu en septembre, aux frais du contribuable ?

En dépit de sa nature contraignante, le passe sanitaire peut s’avérer une chance pour les restaurateurs et tous les établissements accueillants du public, même si sa pertinence est discutable en terrasse. En Israël, premier pays à l’avoir mis en place (mais pas en terrasse !), il fut supprimé grâce à la vaccination massive, avant d’être récemment réintroduit pour cause de variant Delta. Il en ira de même en France. Ceux qui crient à la dictature sont des imposteurs et des autocrates. D’ailleurs, dans les manifestations contre le vaccin et le passe sanitaire, ils s’en prennent aux journalistes, comme dans les pays totalitaires.

Les restaurateurs doivent donner le bon exemple et transformer le passe sanitaire en argument commercial. Avec plus de 50 % des Français pleinement vaccinés, et une campagne de vaccination qui ne faiblit pas, cet argument pourrait être gagnant. Et même la chute soudaine de fréquentation des parcs d’attractions ne doit pas être un prétexte au relâchement. Le pass sanitaire n’est pas la panacée. Il eut été plus rationnel de rendre la vaccination obligatoire (sauf bonnes raisons, notamment médicales), comme c’est déjà le cas de nombreux autres vaccins.

Dans quelques semaines, nous saurons si c’est le prix à payer pour éviter un désastre sanitaire, puisque les observateurs affirment majoritairement que les Français n’accepteront pas un nouveau confinement…

En attendant, bon appétit, dans un restaurant aussi sûr que possible, avec pass sanitaire, en attendant le certificat de vaccination, comme on l’exige contre la fièvre jaune pour se rendre dans plusieurs pays africains ou sud-américains (une atteinte aux Droits de l’homme et aux libertés ?!).

 

Michel Taube

Directeur de la publication