La bataille des présidentielles a commencé.
Face au Président sortant qui compte bien se faire réélire, quel est le paysage politique ?
Une droite empêtrée dans une primaire de plus en plus illusoire, le principal candidat, Xavier Bertrand refusant d’y concourir. Les Verts qui eux tiennent leur primaire à 80 000 électeurs prennent le risque—le passé faisant référence—d’une surprise désagréable, à savoir la désignation non pas du favori des sondages, Jadot, mais d’une Rousseau, d’un Piolle ou d’une Batho qui scellerait définitivement leurs ambitions présidentielles.
Quant à la Gauche, point de primaire. Hidalgo qui avait promis de n’être que maire de Paris, se découvre, une fois réélue, un destin national. Mais, le précédent Chirac et les Jeux Olympiques, suffiront-ils à faire oublier son autoritarisme et sa personnalité clivante ? …A s’en tenir aux sondages actuels, rien n’est moins sûr !
Les candidats sérieux de gauche sont « encalminés ».
Jean Luc Mélenchon poursuit sa « longue marche », étranger à tout rassemblement qui ne se ferait pas autour de sa personne. Manuel Valls, « discrédité » par ses « aller-retour France-Espagne » ne suscite aucun désir et Arnaud Montebourg, vrai politique, est handicapé par l’absence de soutien d’un parti.
Dans le spectre politique, deux hommes d’Etat, deux anciens Premiers Ministres pourraient mettre en difficulté Emmanuel Macron, s’ils se déclaraient : à droite, Edouard Philippe, qui attend sagement l’après-Macron et lui apporte en attendant son entier soutien ; à Gauche, Bernard Cazeneuve, qui reste volontairement en réserve de la République, probablement convaincu de l’inéluctable réélection du titulaire actuel de l’Elysée.
Pour en revenir aux candidats en lice, hormis Mélenchon et Barnier, ce n’est pas leur faire injure que de constater leur manque de leadership, de charisme, l’absence d’intérêt que suscite leurs projets, ce qui n’enlève rien à la qualité de leur parcours de vie.
Probablement vivons-nous depuis les élections de Nicolas Sarkozy et de François Hollande, une « démonétisation « de la fonction présidentielle, sa banalisation.
Est-ce la qualité des hommes qui ont exercés cette charge suprême ou l’inadéquation de nos institutions avec le monde moderne qui en sont responsables ?
N’oublions pas dans ce paysage, les « marginaux », Philippot et Dupont Aignant, ceux-là même, qui profitant de la pandémie, ont tenté, samedi après samedi, de se constituer, grâce au Covid, un pactole électoral.
Enfin il y a le cas Zemmour ! Pré-candidat mais non encore officiel, il reste un mystère. Roule-t-il pour lui avec un socle électoral déjà à plus de 10% ou pour autrui ? N’est-il pas, en fait, le « candidat masqué » de la Droite !
En effet, si sa candidature est en capacité d’affaiblir celle de la Présidente du Rassemblement National, n’a-t-elle pas pour véritable objectif de permettre au candidat de la Droite d’être présent au second tour, seule hypothèse qui mettrait en danger la réélection de Macron…
Mais, toute ces stratégies ou tactiques risquent de se heurter à des réalités passablement sous-estimées par nos éditorialistes et autres analystes, à savoir l’impact réel de la pandémie, la qualité du « rebond » de notre économie, et les conséquences de la future présidence française de l’Union européenne.
Les jokers de Macron
En effet, au-delà de son statut de chef d’Etat qui lui permet d’être en campagne permanente, Emmanuel Macron dispose de » trois jokers ».
Le joker sanitaire. Nombreux sont ceux qui spéculaient, après un début de « guerre sanitaire » calamiteux, que la pandémie serait le « chemin de croix » du Président et condamnerait ses chances de réélection. Or, le « passe sanitaire » n’est-il pas en train de devenir son bonus pour un second mandat, une majorité de Français lui étant gré, malgré quelques réductions de libertés, de leur avoir évité un nouvel enfermement.
L’absence de quatrième vague ou une simple « vaguelette » dans les prochaines semaines ne fera qu’amplifier ce soutien de l’opinion.
Le joker économique. Alors que Droite et Gauche annonçaient à la sortie de la pandémie le chaos économique et social du pays, d’aucuns prédisant même que le « Grand Soir » emporterait le Président, tous les instituts spécialisés annoncent un « rebond » de notre économie avec un taux de croissance, un taux d’emplois supérieurs aux bons résultats de l’année 2019, d’avant pandémie. Nous n’aurons pas les faillites et les chômeurs qui nous étaient prédit…
Ce résultat obtenu, grâce aux « airbags » du système social français, à nul autre pareil, mais aussi et surtout grâce à la politique du « Quoi qu’il en coûte » magistralement orchestré par le Président et le Ministre de l’Economie, Bruno Lemaire nous éviterons probablement les défilés de gilets jaunes et autres manifestations.
Le joker Europe enfin. En janvier 2022, la France présidera l’Union européenne pour six mois. La Chancelière allemande Angela Merkel, à la retraite, Boris Johnson, hors de l’UE, le Président aura « champ libre » pour tenter de transformer ses discours européens réformateurs en réalités.
Sa partition d’une Europe fiscale, sociale, environnementale et de la Défense va lui permettre d’asseoir un leadership dont il rêve et auquel les Français sont sensibles. Ils lui en seront d’autant plus reconnaissants.
« Docteur pandémie », « Chef économiste », « leader européen », voilà les trois atouts du Président qui devraient lui permettre de briguer un second mandat présidentiel.
Sauf que, comme souvent en politique, rien n’est jamais écrit d’avance !
Michel Scarbonchi
Ancien député européen, consultant international