Au XIX e siècle, l’imaginaire de l’écrivain, Jules Verne avait éclairé l’aventure de la conquête spatiale, au même titre que l’univers de la science-fiction contemporaine a enfanté les balbutiements du « métaverse ».
Le métaverse, cette révolution immersive qui donne à percevoir une réalité enrichie de dimensions nouvelles au moyen d’un ensemble de technologies numériques. C’est une expérience unique d’intégration, de fusion physique et mentale au travers d’un contenu digital qui nous engage émotionnellement et sensoriellement, et modifie en conséquence notre rapport direct à notre environnement quotidien. Cette nouvelle ère composite se mêle aux modes d’hybridation aux frontières de la réalité physique et de la réalité virtuelle. Ce qui était hier en gestation dans nos récits futuristes, les plus audacieux se réalise à présent sous nos yeux.
Aujourd’hui, la réalité augmentée avec ses contenus digitaux surimprimés sur le monde physique, la réalité mixte et ses interactions d’environnements physiques et virtuels, ou bien encore la réalité virtuelle, redessinent nos vies et questionnent sur les capacités humaines à appréhender un environnement multidimensionnel, mélange de réalité et de virtuel.
La pandémie mondiale actuelle a précipité les choses : quand les mesures de confinement nous ont empêché de voyager, de travailler ensemble, de se rencontrer dans un café ou de se retrouver à une exposition, nous nous sommes aperçus que l’internet mobile seul ne suffisait plus pour animer les relations entre individus. C’est non sans une immense satisfaction que nous avons basculé vers les univers augmentés : salles de réunion virtuelles, plateaux de jeu en ligne, visites interactives virtuelles… ces nouvelles dimensions nous ont permis d’accéder au monde, lorsque dehors, presque tout était clos.
La réalité immersive se situe à la croisée des chemins entre science-fiction et réalité. C’est un espace où nous pouvons nous exprimer, parfois par le truchement d’avatars, et communiquer, pour travailler, discuter, ou jouer, sans les barrières sociales de la vie réelle.
Au même moment, de l’autre côté de l’Atlantique, la société Facebook, pionnière du web social, prenait le tournant des nouvelles dimensions disruptives. Marc Zuckerberg, son Pdg annonce qu’il emploie des milliards de dollars d’investissements et une équipe de pas moins de 10 000 personnes uniquement dédiée au « metaverse ».
Autour de l’Europe de saisir l’opportunité de cette nouvelle frontière qui est également un nouveau relais de croissance, dont une des promesses est de satisfaire le triple objectif de la création de valeur, de l’invention de sociabilités bénéfiques et du développement durable.
La bonne nouvelle, c’est que notre pays, la France, a un rôle à jouer dans cette évolution structurelle de la nouvelle économie du « metaverse », car les talents sont là et les fondamentaux aussi, il est temps que la France se joigne structurellement à ce bouleversement naissant de l’économie digitale, en initiant et en mutualisant les efforts à échelle européenne. Une telle opportunité, ce défi, à la fois sur le plan économique et sur le plan culturel, ne se présente que tous les vingt ans !
La première édition du Knowledge IMMERSIVE Forum vous propose un premier voyage, une plongée en immersion : un “kif”, parce que le forum porte l’empreinte de l’enthousiasme face aux perspectives que tracent les nouveaux continuum réalité virtualité dans la vie de tous les jours. Sont affectés le monde de la culture, du jeu vidéo, de l’éducation et de la formation, de la santé, du retail, du financement et de la distribution — soit autant de secteurs qui expriment l’intensité des échanges humains toutes générations et milieux confondus, et cela à échelle mondiale.
Le Metaverse : une technologie qui interroge sur le modèle de développement de nos sociétés
Mais, les technologies qui permettent le métaverse sont pharmacologiques : le remède peut s’avérer devenir un poison s’il est mal employé et mal dosé. Un savoir augmenté, une amélioration inédite des capacités humaines, s’accompagne d’un risque de surveillance augmentée. Symétrie, semblable à l’utopie d’un nouveau monde expansif, la dystopie d’un monde sclérosé où les utilisateurs sont surveillés en permanence via des capteurs de plus en plus nombreux se dresse comme un avertissement pour les années à venir : si la formidable industrie de la réalité immersive n’est pas réfléchie et régulée, elle entraînera le pire pour l’humanité.
La première édition du KIF 2021 ne sera pas naïve : Il y a lieu de s’interroger quant au sens et la valeur de l’offre culturelle en réalité immersive. L’accélération du développement des technologies d’immersion peut être ressentie, non comme un enrichissement, mais comme une aliénation. Et si ces expériences revenaient à de simples « shoots » de technologie pour fuir une réalité suffocante, un univers des paradis artificiels ? Ou au contraire, autant de façons de se détourner du monde actuel pour mieux le consacrer, en lui offrant des prolongements bénéfiques ?
Nous en sommes convaincus : l’élargissement de la perception que rendront possible les nouvelles créations en réalité immersive est de nature à permettre de construire un rapport plus authentique à la réalité, vis-à-vis de soi-même comme à l’égard des autres. La maîtrise d’une nouvelle industrie du numérique, dont on ne connaît pas encore tous les tenants et les aboutissants, exige qu’elle s’accompagne d’un développement des Humanités pour que la poussée technologique représente un effort de civilisation. La France, animée par son histoire et par ses valeurs, forte de la diversité de ses talents, a les moyens de créer des synergies entre les différents secteurs de l’industrie et ceux de la création culturelle.
A nous d’inventer une convergence inédite entre le génie civil et le génie artistique français !
Alexandre Michelin
Président fondateur du Knowledge Immersive Forum