Edito
06H49 - vendredi 1 octobre 2021

Visas du Maghreb : une bien mauvaise solution pour un vrai problème ! L’édito de Michel Taube

 

Emmanuel Macron ne rechigne donc à aucune mesure pour s’imposer comme le candidat de la droite (et du centre) à l’élection présidentielle. Après quatre années de politiques empreintes souvent d’angélisme sinon de mesurettes présentées comme des révolutions, voilà que le président durcit le ton. La France vient donc d’annoncer la réduction drastique des visas consulaires en provenance du Maroc, de Tunisie et d’Algérie.

Les réactions au Maghreb sont très vives : le ministère algérien des affaires étrangères a convoqué, mercredi 29 septembre, l’ambassadeur de France François Gouyette en Algérie pour protester contre la décision de Paris de réduire le nombre de visas accordés aux ressortissants algériens.

Cette mesure vise à rétorquer au refus de ces pays de reprendre leurs ressortissants condamnés en France pour divers crimes et délits et frappés par des “obligations de quitter le territoire français” (OQTF).

Selon le ministère de l’Intérieur français, 22 expulsions vers l’Algérie ont pu être effectuées entre janvier et juillet 2021, sur un total de 7731 obligations de quitter le territoire français (OQTF) prononcées par la justice, soit un taux d’exécution de 0,2%. Pour le Maroc, ce taux a été sur la même période de 2,4% et de 4% pour la Tunisie. 

La décision du gouvernement français est profondément injuste et souligne la surenchère de démagogie dont nos politiques ne manqueront pas de faire preuve dans les prochains mois.

Bien sûr qu’il y a un problème d’immigration en France. Bien sûr que les milliers de fichiers S de nationalité étrangère devraient être expulsés de notre territoire : ils sont pour la plupart attachés plus à la Chariah qu’aux valeurs et aux lois de la République. L’immigration n’est cependant pas le seul problème puisque la plupart des personnes qui se marginalisent de plus en plus de la société française sont Français et non étrangers.

Mais sanctionner des innocents, des citoyens de pays partenaires et voisins, qui voyagent vers la France pour affaires ou tourisme, et qui ne le pourront plus par la restriction arbitraire du nombre de visas, c’est se priver du soutien de nombreux Maghrébins convaincus de la pertinence du durcissement de l’opinion publique française contre l’islamisation de la société.

De surcroît, dans la lutte contre le terrorisme, la France a besoin du Maroc et de la Tunisie (avec l’Algérie, convenons que c’est bien plus compliqué) pour coordonner la lutte internationale contre le terrorisme. Il en va de même pour maîtriser les filières de migration clandestine.

Plutôt que de couper net les allers-retours de Maghrébins vers la France, une autre méthode pour amener nos partenaires à accepter d’exécuter les “obligations de quitter le territoire français” (OQTF) serait bien plus efficace : imposer à l’Agence Française de Développement (l’AFD) de suspendre tous les crédits et subventions français sur les projets d’infrastructure dans ces pays tan que les OQTF n’auront pu être exécutées dans ces pays. Cette mesure d’Etat à Etat serait moins aveugle en direction des populations et conduirait ces pays à accepter de gérer les expulsions décidées par la France.

Depuis des années, la politique des visas de la France est incomprise et vécue comme arbitraire dans des pays partenaires en Afrique dont les ressortissants les plus influents et compétents préfèrent voyager vers l’Angleterre, l’Allemagne ou les Etats-Unis, discréditant l’image de la France.

Un moratoire sur l’immigration, prôné par de nombreux candidats à l’élection présidentielle, ne pourra jamais être total et devra reposer sur une politique de visas entièrement revisitée pour permettre aux seuls étrangers qui veulent travailler dans les secteurs du marché du travail français en tension, faire des affaires ou visiter la France de continuer à le faire. Dans leur intérêt. Et dans celui de la France.

 

Michel Taube

Directeur de la publication

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