La Guadeloupe est à feu et à sang. La ville de Pointe-à-Pitre suffoque sous les fumées d’incendies. Les routes sont barrées et les entreprises ne sont plus accessibles, mettant en péril les emplois privés. Les magasins sont saccagés et pillés, plongeant leurs propriétaires dans de profonds désarrois. Les écoles sont fermées, sacrifiant une jeunesse malmenée depuis deux ans de crise. Les médecins essuient des crachats quand ce ne sont pas des coups, provoquant leur exode définitif. Les malades sont retenus à domicile, résignés à souffrir un peu plus et à mourir hors des salles de soin. Les touristes sont insultés et ramènent chez eux le traumatisme d’une haine raciale qu’ils pensaient révolue. Les derniers investisseurs referment leurs chéquiers. Les projets collectifs sont abandonnés au profit des aigreurs individuelles. Les constructeurs baissent les bras sous les coups de boutoir des destructeurs. Les violences fleurissent dans le confort d’un grand silence complice. Les fake-news pourrissent ce qu’il nous reste de cerveau. La Guadeloupe se suicide littéralement, et la Martinique s’interroge…
Tout ça à cause, soi-disant, d’un vaccin. Celui que les pays du monde entier ont choisi pour lutter contre la pandémie de Covid. Celui qui, après une légitime période de doute, fait aujourd’hui l’unanimité dans la communauté scientifique mondiale. Celui que la subversion locale a décidé d’instrumentaliser pour nourrir les peurs, premier carburant du chaos social.
Car non. Le vaccin n’est pas responsable de nos malheurs. Il n’est responsable que des vies qu’il sauve. Point. Pas plus que l’État n’est responsable de nos turpitudes. L’État que certains traitent d’assassin, est bien celui qui a mis gratuitement à notre disposition des milliers de vaccins et de tests, quand des centaines de pays pleuraient de ne pas en avoir. C’est bien l’État « assassin » qui a mobilisé la solidarité nationale comme aucun autre État n’a su le faire pour ses populations éloignées. C’est bien l’État « assassin » qui a su, tant bien que mal, protéger nos emplois et maintenir notre système de soin malgré un contexte extraordinairement difficile. Bien sûr, on aurait mille choses à reprocher à l’État. Bien sûr, on pourrait souligner des carences, des manquements et des failles. Surtout quand on refait le film. C’est si facile de conspuer ceux qui agissent, tout en restant à l’écart de l’action pour mieux alimenter les peurs légitimes. C’est si facile de trouver des boucs émissaires en s’exonérant soi-même de toute responsabilité. Et à force de contester systématiquement toutes les autorités, qu’elles soient politiques, républicaines, économiques, scientifiques ou spirituelles, on finit par devenir complice du chaos.
Quand on voit des maisons brûler et des malades mourir devant les barrages de l’hôpital, on comprend enfin la supercherie. On comprend bien que le vaccin n’est pas le problème. D’ailleurs, si nous n’avions pas eu accès au vaccin, notre déliquescence sociétale serait tout aussi forte. Car ce ne serait plus le vaccin, mais l’absence de vaccin qui serait prétextée pour soulever l’indignation.
Les destructeurs ont des rêves séditieux. Pour arriver à leur fin, ils doivent user de démagogie. Ils doivent agréger les peurs, réveiller les haines et défier les autorités. Ils sont comme l’abeille dans l’oreille de l’éléphant. La petite abeille qui vient bourdonner son venin dans la tête du pachyderme pour le rendre fou et destructeur à son tour.
La crise qui sévit en Guadeloupe et en Martinique n’est pas une crise sanitaire. Les tensions qui fractionnent la société n’ont, en réalité, aucun fondement scientifique ou médical. Les destructeurs qui sont à l’œuvre n’ont strictement rien à faire de la santé des Guadeloupéens et des Martiniquais. Ils s’en fichent comme de leur première chemise. Ce qu’ils veulent, c’est le chaos et l’indépendance. Il s’agit clairement d’une crise politique déguisée en crise sanitaire.
Une crise habilement gonflée par les discours antivax qui se confondent désormais aux idéologies de rupture. L’abeille a vrillé nos tympans, et réveillé des forces destructrices. Cessons d’être des éléphants involontaires, briseurs de porcelaine sous l’influence hypocrite des destructeurs masqués.
Cessons une bonne fois pour toute de prêter l’oreille à la subversion, d’entretenir le doute systématique et d’être complices malgré nous du suicide collectif.
Cessons d’être le jouet du carnaval des autres !
Emmanuel de Reynal