Le Congrès des Républicains a livré son verdict : ce sera Valérie Pécresse qui portera les couleurs de la Droite et du Centre pour la prochaine élection présidentielle. Les militants ont choisi. C’est bien sûr une surprise. Xavier Bertrand était le grand favori non pas des militants, mais des sympathisants, et un tandem Bertrand/Ciotti aurait pu séduire du centre gauche à la droite très conservatrice. Mais ce ne sont pas les sympathisants qui votent. À quelques voix près, les militants se sont partagés entre les quatre grands candidats, à parts égales, et Valérie Pécresse a su trouver le petit plus pour l’emporter. Bravo à elle.
À croire que cette dernière semaine aura été la semaine des femmes. Elle commença par l’entrée au Panthéon de Joséphine Baker et s’acheva par la victoire de Valérie Pécresse.
La semaine aurait pu être celle d’Éric Zemmour, mais le polémiste s’il a réussi à faire le buzz, fit « pschitt » en lançant sa candidature, le jour de l’entrée au Panthéon de Joséphine Baker. Tout a déjà été dit sur les ratés de sa vidéo de candidature : un homme qui parut bien chétif, loin de la stature du Général, écrasé par la présence d’une bibliothèque volumineuse, lisant son texte sans parvenir à l’incarner, des images jetant en pâture des personnes étiquetées « système », des images d’archives qui accentuaient le côté poussiéreux de cette bibliothèque, un micro qui se voulait rappeler l’appel du 18 juin, mais même le micro n’était qu’une pâle copie, aucun souffle, aucun projet d’avenir, des constats que souvent la plupart des hommes politiques de tout bord partagent, des boucs-émissaires classiques, trop classiques, la haine de l’autre, parce qu’autre, aucune véritable proposition, une véritable atmosphère d’enterrement. Et une violence des mots rarement vue en politique en France, une violence qui rappelle celle de Le Pen, père, une violence qui fatalement se traduit dans les actes, comme lors de son meeting de Villepinte. Inutile de tirer plus sur une ambulance.
Dans le même temps, Emmanuel Macron présidait la cérémonie et l’hommage à Joséphine Baker au Panthéon. Je ne suis pas Macroniste, mais chapeau Monsieur le Président. Voilà une cérémonie remarquable, des mots justes, et pas seulement des mots, l’image de ce qu’est la France au travers de cette grande dame, humaniste s’il en est.
Il faut dire que le parcours de Joséphine Baker est exemplaire. Née pauvre, dans une Amérique où la couleur de peau déterminait l’avenir, elle réussit néanmoins à s’en sortir. Venue en France, elle adopta notre pays, devint française par son mariage avec Jean Lion, cacha la famille juive de Jean Lion pendant une bonne partie de la guerre ; elle fut officier de l’Armée de l’Air, espionne au profit de la France Libre, amie du Général, de Grâce Kelly comme de Fidel Castro, réunissant des milliers de spectateurs à Paris comme à Cuba, à Moscou comme à New York…
Pauvre devenue châtelaine, Joséphine Baker montre aussi l’exemple de l’ascenseur social. J’utiliserais plutôt le symbole de l’échelle sociale, plus approprié à mon sens. Car l’échelle nécessite un effort, l’échelle implique une gradation, on y monte barreau après barreau, progressivement. L’échelle permet de déployer notre corps, de détendre nos muscles, de donner un peu plus d’espace entre nos vertèbres, en somme de nous grandir, et Madame Baker s’est grandie, et à travers elle, c’est la France qui se grandit de l’avoir accueillie, de lui avoir accordé la nationalité, même si c’est par mariage, de l’avoir reconnue comme telle, et de l’avoir honorée au Panthéon. Ce n’était pas une atmosphère d’enterrement, mais une ambiance de Fête de la Nation ! Cette femme est exactement l’antidote contre Zemmour, une femme qui accepte l’autre parce que Autre, c’est cela qui fait Nation, en France ! Bravo Monsieur le Président et surtout Merci Madame Baker.
Et la semaine s’acheva en apothéose avec la victoire de Valérie Pécresse, comme si Joséphine Baker lui transmettait le flambeau, le flambeau de ce qu’incarne la France et ses valeurs.
Alors à Valérie Pécresse d’endosser l’habit à présent, habilement car l’habit ment trop souvent. À elle de se dévêtir de l’image d’une énarque cassante, technocrate, dont les paroles sont lancées au rythme des mitraillettes. À elle de rassembler ce qui est encore trop épars. À elle de réunir les partisans tant de Xavier Bertrand que d’Éric Ciotti, et au-delà, d’aller séduire à nouveau les sympathisants du Parti Radical, de l’UDI, de ramener dans le droit chemin les électeurs tentés par les candidats d’extrême droite.
À elle de convaincre l’électorat populaire de revoter à droite comme ils l’ont fait pour Chirac et Sarkozy. À elle de ramener vers les urnes les abstentionnistes qui pensent que la droite et la gauche, c’est du pareil au même, parce que certains leur font croire que l’on peut être, en même temps, de droite et de gauche. À elle de leur prouver surtout qu’elle peut améliorer leur quotidien.
Les équipes de Xavier Bertrand et d’Éric Ciotti ont travaillé dur pour produire des idées et des programmes, car il n’y aura pas que l’immigration comme dossier à traiter le lendemain de l’élection. Il faudra redresser le pouvoir d’achat des Français, relancer la compétitivité de notre économie, faire en sorte que le travail soit à nouveau glorifié, que l’on puisse vivre de son travail, mieux que des allocations, et tout cela en remboursant nos dettes colossales.
Il faut relancer la recherche, créer les conditions pour que les prochains BioNtech ou Moderna puissent être français, et le restent, que les licornes puissent trouver les fonds propres pour assurer leur développement en France et ne soient pas contraintes d’aller à New York ou à Shanghai lever ces fonds.
A elle de recréer les conditions qui permettent à nos étudiants, à nos médecins, à nos infirmières, à nos chercheurs, à nos trouveurs, à nos premiers comme énièmes de cordée de continuer de s’épanouir en France sans avoir besoin d’aller travailler ailleurs. Que l’infirmière de Metz n’aille plus à Luxembourg travailler parce qu’elle y gagne 3 ou 4 fois plus ! que le chercheur sur le Plateau de Saclay n’aille plus à Zurich ou à Palo alto pour y gagner 4 ou 10 fois plus !
A elle de tendre la main, à nous de la saisir !
Ce sont souvent les circonstances qui font l’homme ou la femme. Je suis prêt à parier, aujourd’hui, que Valérie Pécresse fera sa mue et réussira à rassembler largement autour d’elle. Si elle y arrive, elle sera notre prochaine présidente, première femme présidente en France, notre Merkel, notre Thatcher, notre Golda Meir. Et sa victoire sera celle de tout notre pays, la victoire de la France.
Voilà une belle semaine à l’approche du solstice d’hiver. Les jours diminuent encore, mais très vite la lumière sera plus présente que les ténèbres.
Patrick Pilcer