Edito
06H55 - samedi 8 janvier 2022

Parrainages de candidats à la présidentielle : ne confisquons pas la démocratie. L’édito de Michel Taube

 

 

Jean-Luc Mélenchon, Éric Zemmour, Marine Le Pen, Arnaud Montebourg, Jean Lassalle, Georges Kuzmanovic, le parti animaliste pourront-ils concourir au premier tour de l’élection présidentielle ?

Le propos n’est pas ici de défendre tel ou tel candidat. Il est de défendre la démocratie. Il serait en effet choquant et inadmissible que des candidats à l’élection présidentielle ayant un potentiel de plusieurs millions de voix, voire deux d’entre eux qui sont peut-être même en situation se qualifier pour le second tour, soient empêchés de se présenter pour ne pas avoir obtenu les 500 parrainages d’élus, nécessaires à candidater.

Lors des précédents scrutins présidentiels, on a vu se présenter des candidats marginaux, et encombrer les débats de la campagne, alors qu’ensemble, ils ne totalisaient pas 5 % des voix. Pour l’édition de 2017, citons Jacques Cheminade (0,18 % des suffrages exprimés), François Asselineau (0,92 %), Jean Lassalle (1,21 %). On peut ajouter toute une brochette de représentants de l’extrême gauche, comme Nathalie Arthaud (0,64 %) ou Philippe Poutou (1,09 %). Ces chiffres posent également la question du partage du temps de parole. L’équité réside-t-elle dans l’égalité ?

Au micro de Sonia Mabrouk (Europe 1) hier, Éric Zemmour a lancé un appel à David Lisnard, nouveau président de l’Association des maires de France et maire de Cannes : « Je lui propose de demander aux maires de faire un pool de signatures et de donner les signatures à tous les candidats qui sont au minimum, je ne sais pas, à 5 ou 8 % dans les sondages, c’est lui qui décidera. Je pense que ce serait une mesure démocratique et je ne parle pas seulement pour moi ».

Certes, il est toujours délicat de prendre les sondages comme critère. Lesquels d’abord, et à quel moment ? N’y aurait-il pas une alternative au parrainage d’élus ? Cela fait une dizaine d’années que fusent des idées alternatives, en particulier le parrainage par un collectif de citoyens, idée chère à Jean-Luc Mélenchon. Mais la vraie difficulté vient de ce que ces parrainages d’élus ne sont plus anonymes, depuis une loi de 2016 initiée par François Hollande. Cette publicité soumet les élus, en grande majorité des maires (36 658 au total) aux pressions des appareils politiques et au qu’en dira-t-on local. Les maires deviennent des objets de chantage, sur l’échiquier des « grands » partis, grandeur que ne partagent pas toujours leurs candidats.

Au train où vont les choses, Anne Hidalgo, investie par un Parti socialiste finissant, mais encore forte d’un reste d’implantation locale, recueillera peut-être plus de parrainages que de voix au premier tour de l’élection présidentielle !

Ce n’est évidemment pas à trois mois du scrutin que l’on changera la règle, raison pour laquelle ce sont les petits jeux politiques qui permettront peut-être à Éric Zemmour de se présenter. Si Marine Le Pen, officiellement contre l’anonymat des parrainages, a tout intérêt à ce que son concurrent soit écarté, c’est exactement le contraire pour Valérie Pécresse : sans la présence d’Éric Zemmour au premier tour, les chances de la candidate LR d’en franchir le cap s’en trouveraient compromises, du moins en l’état actuel de l’opinion, si on en croit les fameux sondages. La campagne, et notamment les débats télévisés, lui donneront peut-être la possibilité de se frayer un chemin entre la droite nationaliste et Emmanuel Macron, candidat (encore officieux) du fameux « En même temps », se voulant représentant du peuple silencieux des vaccinés.

La question essentielle n’est pas ici celle des personnes. Il serait tout aussi inacceptable que Jean-Luc Mélenchon ou Marine Le Pen soient écartés de la course à l’Élysée pour les mêmes raisons. En cette année 2022, la problématique concerne particulièrement Éric Zemmour, et l’équité commande qu’il puisse se présenter. Le candidat communiste Fabien Roussel n’aura aucune difficulté à réunir ses 500 parrainages, alors qu’il ne peut espérer beaucoup plus de 1 %, peut-être 2 % des suffrages en avril prochain.

Et puisque la gauche est en lambeaux et sans boussole, suggérons aux maires de donner leurs parrainages à un candidat de gauche, courageux et audacieux, qui a le mérite de proposer un projet intraitable sur la laïcité et le respect de la laïcité et dont nous avions déjà publié un appel aux parrainages : Georges Kuzmanovic, président du parti République souveraine.

Il est souhaitable que le prochain président, même s’il s’agit d’Emmanuel Macron, remette en cause l’actuel mécanisme de parrainage. Mais pour le moment, la responsabilité de l’équité électorale pèse sur les maires. À eux d’avoir le courage de résister aux pressions pour que démocratie se fasse.

Michel Taube

Directeur de la publication

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