J’entends, et je lis, depuis des jours et des jours, dans tous les médias, que ce soient des radios, des télévisions, des journaux papiers et autres, des réclamations de sanctions, de peines exemplaires, de peines immédiates, etc… etc…
Ces réclamations n’émanent pas seulement du peuple (comme l’on dit) mais de la plupart, pour ne pas dire toutes, des élites ou soi-disant telles, de notre pays.
Le pire, est que lorsque d’autres prétendues élites, sont contre ces réclamations, ce n’est pas pour les modérer, les nuancer, non, c’est pour sanctionner les sanctions. Pas de sanctions.
Les deux positions sont exaspérantes.
Notre pays est entrain de se soumettre à l’inacceptable, (merci Monsieur Mitterrand qui a remplacé la Liberté, par les Libertés) en radicalisant sa soumission devant toutes les entraves légales de ses libertés. Le pouvoir dit, donc c’est légal. On se plie. On respecte. Et plus encore, on s’y fait.
Notre pays admet désormais le mensonge, la promesse non tenue, la trahison, le non-respect des engagements ; tout cela n’est pas grave, tout cela fait partie du « jeu », seule compte la soumission radicalisée.
Et lorsqu’une des élites est prise en flagrant délit de fautes, il y a la prescription, (pour certains évidence de non-lieu) ou l’édulcoration, quand ce n’est pas l’excuse. Mais attention !!! ces explications ne viennent pas seulement de la justice, non ; Elles viennent des élites en place. Donc le pays accepte, parfois sanctifie (par le vote) se plie, et respecte.
Jusqu’à quand ?
Nous apprenons, selon un sondage, qu’un français sur deux serait pour le retour de la peine de mort.
Ceci rejoint le bloc des réclamations ; de ceux qui veulent sanctionner, et ceux qui veulent annuler les sanctions.
Les deux ont une notion de la sanction totalement radicalisée (vous noterez que j’emploie ce terme à dessein, puisque désormais c’est le terme retenu par tous, et pour tout et tous).
Dans les deux cas, cette radicalisation tend à prendre pour les pro-sanctions, le Code pénal, viser l’article qui réprime la faute, et appliquer la peine qui y est mentionnée.
La sanction devenant un effacement du délinquant. Au suivant !
Pour les anti-sanctions, c’est le contraire, on ne lit pas le Code pénal, on regarde ailleurs, on excuse. On n’explique même plus.
La sanction devenant un moyen (fasciste) de « totalitarisation » du pays. (Barbarie)
Quand sera-t-il laissé aux avocats le soin de faire enfin leur métier ? et aux juges de l’exercer ?
Plus loin encore, quand, enfin, le rôle de l’avocat cessera -t-il d’être méprisé par l’institution judiciaire, majoritairement, par les élites, qui en raisonnant comme elles le font, n’en tiennent donc pas compte, et pour finir, par voie de conséquence par le peuple lui-même.
Depuis des décennies, je préside la Nuit de la Justice, et je m’égosille à clamer que les Avocats sont le dernier rempart de la démocratie. Est-ce pour cela que nous ne sommes pas aimés ? appréciés ? respectés ?…
Oui nous défendons des criminels, des délinquants, mais aussi des victimes de ces auteurs… et chaque fois quel est notre rôle ?
Notre rôle, est celui de défendre notre client, victime, ou présumé voire reconnu coupable. Dans les deux cas, nous parlons de droit, et quant il le faut de morale…ce qui n’est pas du rôle des magistrats, mais que nous, nous pouvons évoquer, parce que c’est notre devoir. Nous croyons à la personnalisation des peines, et non à l’automaticité de celles-ci. L’exemplarité de la peine ne doit pas être l’effacement de celle, ou celui qui est condamné. Pas être en fonction de l’air du temps. Car elle ne doit pas être à géométrie variable selon que l’auteur, ou la victime, est d’un bord ou d’un autre.
L’avocat, lui, comme le médecin, ne demande pas la carte du parti de celle ou celui qu’il assiste.
La différence qu’il y a entre avocat et magistrat, c’est qu’un avocat n’a pas d’autre prise que son talent, voire son absence de talent, sur la décision du magistrat, qui lui, prend la décision qu’il estime devoir prendre, quelles qu’en soient les conséquences, puisque dans tous les cas, il ne peut en être tenu pour responsable. Or c’est au nom du peuple français, donc à notre nom à tous, qu’il rend sa décision… la justice.
Un avocat, même adepte de l’air du temps, ne peut (sauf écoute bienveillante du tribunal) dicter son avis et rédiger les jugements du magistrats, alors que ce même air du temps peut être nuisible à la décision elle-même…
Alors, Mesdames, Messieurs les Elites, l’exemple venant d’en haut, laisser les avocats faire leur métier, et plus encore, donnez leur ce pouvoir que nos institutions leur refuse depuis si longtemps, d’avoir les mêmes droits, que le parquet, ( le procureur) qui s’autorise toutes les enquêtes, toutes les expertises, alors que les avocats n’ont aucun droit à cet égard, et que lorsqu’ils ont l’outrecuidance de demander des actes ou actions, ils sont obligés de le faire auprès d’un juge qui refuse la plupart du temps, sachant pratiquement à l’avance que la cour d’appel, en sa chambre de l’instruction, lui donnera raison. Et seulement tort s’il n’est pas dans l’air du temps, et heureusement il y en a de ces juges.
Apprenons aussi à nos journalistes, que ce n’est pas le « procureur » qui rend la justice. Celui qui rend la justice, c’est le juge du siège. Le procureur, dont certains voudraient qu’il ait tous les pouvoirs, n’a que celui d’obéir à la politique pénale décidée par le pouvoir. Il ne peut pas condamner, pas encore aujourd’hui…Il représente l’état, il en est l’avocat, ce qui est son titre devant les cours d’assises, « avocats général »…le juge lui, s’adresse au peuple, applique la loi, dit le droit, au nom du peuple français. Et il est indépendant du pouvoir. Il doit l’être, et le rester, y compris en refusant l’air du temps, qu’il provienne du pouvoir, ou de certains médias qui font du droit, comme parfois de la médecine.
Le procureur est un auxiliaire de justice, qui exécute son rôle, en fonction, ou pas, des incitations du pouvoir, voire de l’air du temps, et même encore de l’idéologie qui serait la sienne. Peu importe. Il n’en reste pas moins que c’est au juge du siège, du fond, de décider, pas au procureur.
Rappelons-nous toujours, l’affaire dite d’Outreau, où la chambre de l’instruction a maintenu mon client près de trois ans en prison, en rendant des arrêts confirmatifs de la décision du juge d’instruction pour le maintenir en détention, « parce qu’il ne reconnaissait pas sa culpabilité ».
Pourquoi avoir oublié ? il s’agissait pourtant bien d’une chaîne de responsabilité des magistrats, du juge d’instruction, au juge des libertés, en passant par le procureur, puis par la cour d’appel. Et cela pendant trois ans, jusqu’à l’acquittement de mon client en cour d’assises à Saint Omer.
Pourquoi oublier cela ? pourquoi ne pas en avoir tiré les conclusions nécessaires, pour revaloriser d’une part le rôle des avocats, et pour mettre enfin les magistrats du siège, dans le rôle de ceux qui disent le droit, après avoir ENTENDU toutes les parties, à égale chance. Et sans prééminence du parquet.
Mesdames Messieurs les Elites, cessez de réclamer des sanctions « exemplaires », ou d’en vouloir la fin. Laissez l’institution judicaire, entière, avocats compris, faire le métier, la mission de justice et donnez-lui tous les moyens de le faire, sans favoriser l’une ou l’autre des parties selon des idéologies qui n’ont rien à faire dans les prétoires.
Ainsi, la démocratie, donc la liberté, l’égalité, et la fraternité, reprendront leur pleine signification dans notre pays.