Etonnante prestation que celle d’Emmanuel Macron, lors de son « grand » (à peine plus de 3000 participants, selon les organisateurs) meeting de Marseille, dans un cadre qu’on aurait pu croire choisi par l’office de tourisme : les vertes voiles de l’écologie furent déployées sur les bords de la Méditerranée, avec détermination et emphase. Le candidat n’a pas annoncé que Yannick Jadot ou le jardinier de l’Élysée serait son futur Premier ministre, mais que celui-ci aura la main si verte, et que la mère patrie en deviendra la fille ainée de mère Nature.
Petit rappel historique…
2017 : Emmanuel Macron vient d’entrer à l’Élysée, et nomme l’ancien animateur de télévision Nicolas Hulot ministre de la Transition écologique et solidaire. Le nouveau président se fend d’un vibrant « Make Our Planet Great Again », paraphrasant son confrère Donald Trump qui vient de se retirer des accords de Paris, cette COP 21 dont nous, Français, avons bien raison d’être si fiers.
2018 : Nicolas Hulot, incarnation de l’écologie bobo, claque la porte, lassé de n’être qu’une potiche. Le vide fut comblé par Barbara Pompili, transfuge d’EÉLV, un parti à la dérive dans les eaux wokistes et islamogauchistes, au point de sombrer au premier tour de la présidentielle de 2022, malgré, certes, un capitaine de circonstance pas vraiment en phase avec le positionnement radical de la plupart des cadres et adhérents de son parti.
2020 : Emmanuel Macron lance la Convention citoyenne sur le Climat. C’est un peu du RIC (référendum d’initiative citoyenne) avant l’heure, même si l’initiative est ici macronienne et très scénarisée. Fin juin, le Président approuve toutes les propositions de la Convention, à trois exceptions près. Le peuple a tranché : la France sera verte ou ne sera pas. Les associations de lutte pour le climat et la biodiversité crient à la trahison et à la récupération.
Avril 2022, donc : « La politique que je mènerai dans les cinq ans à venir sera écologique ou ne sera pas » lance le candidat plus vert que jamais. Objectif : rallier les électeurs de Mélenchon et Jadot tentés par l’abstention et le vote blanc !
Emmanuel Macron est le roi des grand-messes façon Grenelle contre les violences faites aux femmes ou Ségur de la Santé, et des lois à gogo : climat, violences faites aux femmes, santé, sécurité, valeurs républicaines…
Bref, nous avons le ramage, la berceuse peut-être, et le plumage. Il nous manque le fromage que le corbeau tient dans son bec, dans la fable « le corbeau et le renard », de Jean de la Fontaine, fable qui s’achève ainsi :
« Apprenez que tout flatteur Vit aux dépens de celui qui l’écoute :
Cette leçon vaut bien un fromage, sans doute.
Le Corbeau, honteux et confus,
Jura, mais un peu tard, qu’on ne l’y prendrait plus. »
Mais oui, Maître Corbeau, nous allons nous laisser prendre, car face au renard Macron se dresse un tout autre animal. Et on aimerait tant que pour une fois, le fromage soit à la hauteur du ramage et du plumage.
Car Emmanuel Macron a dit ce qu’il fallait dire et décrit ce que doit être l’écologie du XXIème siècle : une formidable opportunité économique. Alors que 600 projets de centrales à charbon sont annoncés en Asie, détruire notre économie et notre industrie en optant pour une décroissance dogmatique serait un sacrifice inutile, donc absurde. En revanche, la France peut donner à l’Europe et au monde l’exemple d’une transition écologique intelligente, source de croissance vertueuse et de progrès technologique qui profitera à l’humanité… et à notre balance commerciale dramatiquement déficitaire (à quand les meilleurs panneaux solaires made in France, par exemple ?).
Ce quinquennat vert n’arrêtera pas le réchauffement climatique et ne suffira sans doute pas à épargner aux jeunes générations des défis dont nous peinons à imaginer l’ampleur, mais cela aura le mérite d’accélérer l’avènement d’une nouvelle économie et de renouer avec l’universalité du modèle français : après les droits de l’homme et la laïcité (ici, ramage, plumage et fromage ne font plus bon ménage), la France peut devenir la verte patrie éclairant le monde englué dans une marée noire comme le pétrole et le charbon.
La profession de foi écologique d’Emmanuel Macron, celle d’avril 2022, on veut y croire, on doit y croire. Il faudra la lui rappeler chaque jour de son éventuel second mandat.
Et il faudra se dire que la clé de notre avenir ne tient surtout pas dans les mains d’un seul homme, fut-il président de la République française. Que le premier ministre soit Madame ou Monsieur écologie, avec deux super-ministres à ses côtés ? Pourquoi pas.
Mais l’essentiel est ailleurs : dans la capacité de tous les Français (citoyens, entreprises, collectivités locales, organisations publiques…) à se mobiliser pleinement. Et pour l’Etat de les laisser faire contre une bureaucratie étouffante. Encore une promesse qu’Emmanuel Macron n’a pas tenue… Encore une chance de mieux faire, bien mieux faire, ces cinq prochaines années.
Michel Taube
RDV mardi 26 avril pour le Live du Mardi avec Opinion Internationale
Je m’inscris Mardi 26 avril à 19h sur Zoom : bilan de l’élection présidentielle / Débat Pour un « McKinsey public » au sein de l’Etat dans le cadre de la rubrique « Solutions pour la France » avec Patrick Pilcer, Philippe Latombe et des décideurs engagés au coeur de l’actualité.