Emmanuel Macron a donc entamé une tournée diplomatique dont la cohabitation avec une Assemblée impossible ne pourra lui retirer son pré carré international : Bruxelles, Bavière, Madrid, Lisbonne. Le chef de l’Etat arrivera-t-il dans ces capitales affaibli par son échec électoral ? Le Time magazine avait été prémonitoire en 2017 en titrant : « Emmanuel Macron sera un nouveau leader de l’Europe si la France se réforme ».
Car pendant que la France s’enlise dans ses querelles idéologiques, cet « étau lepéno-mélenchoniste » que l’excellent Le Point qualifie de tragédie française (parlons plutôt du vrai suicide français), le monde tourne, bouge et connaît des crises majeures qui vont accélérer l’entrée dans le monde d’après.
En tout cas, la première étape bruxelloise du périple d’Emmanuel Macron a été un succès. L’Europe a enfin le courage de tenir tête à de grandes puissances concurrentes et, plutôt que de louvoyer sous prétexte de discuter avec tout le monde, de choisir son camp. Emmanuel Macron va pouvoir clôturer en beauté la présidence française du Conseil de l’Union européenne. Jeudi et vendredi derniers, nous avons assisté enfin au réveil de l’Europe avec la décision des chefs d’Etat et de gouvernements d’accepter la candidature immédiate de l’Ukraine et de la Moldavie en vue de leur adhésion à l’Union Européenne.
Aux détracteurs de cette décision, ceux que nous appelons les nouveaux munichois, rappelons que l’Espagne, le Portugal, tous les pays de l’Est de l’Europe sont entrés dans l’Union europénne dans les dix – quinze ans qui ont suivi l’effondrement de leurs dictatures respectives. Avec Kiev, la perspective de l’adhésion vise à prévenir le risque de dictature sous le joug de laquelle Poutine voudrait soumettre l’Ukraine. Le peuple ukrainien a réveillé l’Europe. Les Européens sont enfin au rendez-vous de leur propre histoire. C’est la seconde grande défaite de Poutine depuis le 24 février : la première fut de souder le peuple ukrainien, de provoquer le réveil de la résistance ukrainienne que personne n’avait imaginé.
Après une photo de famille un peu trop people en Bavière pour le Sommet du G7, direction Madrid du 28 au 30 juin pour le Sommet de l’OTAN, en vidéo-présence de Volodymyr Zelenzky, qui achèvera de reconstituer le bloc occidental, n’en déplaise aux Munichois qui dominent l’intelligentsia française.
Cela dit, le bilan de la présidence française de l’Union europénne qui s’achève le 30 juin est mitigé : le projet de créer une union politique de l’Europe, annoncé à Strasbourg le 9 mai, a déjà fait flop. La France a organisé, au titre de cette présidence européenne, des dizaines de conférences thématiques, souvent très peu suivies, qui sont parties dans tous les sens. Certaines, pourtant annoncées en grande pompe, n’ont même pas eu lieu : Macron avait annoncé devant Robert Badinter le 9 octobre 2021 au Panthéon, lors des 40 ans de l’abolition en France, un Sommet sur l’abolition universelle de la peine de mort. Elle n’aura même pas eu lieu. Triste. La République tchèque, qui prend le relai le 1er juillet, fera peut-être moins dans la grandiloquence, plus dans l’efficacité.
Après un week-end forcé à Paris où le chef de l’Etat devra peaufiner le casting de son prochain gouvernement, Emmanuel Macron se rendra à Lisbonne jeudi 30 juin pour le Sommet onusien des océans. Après Brest en février dernier, organisé par l’ambassadeur de la République française et représentant personnel du président de la République, Olivier Poivre d’Arvor, la France va défendre dans la capitale portugaise la candidature de la France pour la prochaine Cop maritime prévue en 2025. Une façon de promouvoir un capitalisme bleu et la prise de conscience auprès des Français que la France est la seconde puissance maritime au monde.
Europe relancée, rayonner par-delà les océans… De quoi espérer français malgré tout !
Michel Taube