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16H43 - samedi 27 août 2022

#SeptembreRouge : un livre témoignage sur un cancer du sang de Karin Tourmente-Leroux. Bonnes feuilles.

 

Depuis que cette sale bête habite son corps, Karin Tourmente-Leroux a décidé de se battre et a créé lassociation « Vivre avec une NMP ». Elle organise, pour la première fois en France #SeptembreRouge pour sensibiliser les Français à ces maladies. Cette combattante est aussi écrivaine et propose un récit touchant sur sa maladie : « Drôle de voyage dans un pays qui n’existe pas » (éd. Librinova, 2022).

 Bonnes feuilles.

« Je ne savais pas ce vendredi 27 septembre 2019, qu’une fois encore, j’allais changer de vie… Le 27 septembre, j’ai appris que j’avais vraisemblablement une maladie rare : une thrombocytémie essentielle. Je me suis recroquevillée quelques jours. Le temps de… Le temps de je ne sais plus quoi… Cela me semble si lointain. C’était pourtant il y a un peu plus d’un mois…

Le 4 octobre 2019… Un nouvel aller-retour à Neuilly, pour savoir si le traitement a déjà porté ses fruits. C’est raté ! Chou blanc. Nada. Zéro pointé…

Je vais vous mettre sous Hydréa à raison d’un cachet matin et soir, et vous allez faire faire des perfusions de fer dès que possible.

Hydréa : le mot qui tue. Le mot de trop. Je serre les dents. J’suis pas si con… j’ai regardé sur internet comment ça se soignait la thrombocytémie. Ça ne se soigne pas. Ce n’est pas mortel, mais on doit vivre avec. Et quand il le faut, on met les malades sous Hydréa. Hydréa, c’est de la chimio orale… De la chimio… rien que ça. Et merdeeeeeeee… Je ne dis rien. Je range mon ordonnance. Je me casse de la clinique en regardant mes pieds. Je rejoins ma voiture en regardant mes pieds. Ne pas pleurer. Ne pas craquer. Je regarde mes pieds. Démarrer. Quitter Neuilly. Filer sur l’autoroute. Rouler vite, encore plus vite, toujours plus vite ! Je m’en fous si je me fais gauler par un radar. J’expliquerai aux flics que moi je vais me gober de la chimio alors leurs points en moins et leur amende, ils peuvent se les garder… Je roule. Puis j’appelle Céline. Ma Céline à moi, celle qui sait ce que c’est que la chimio. Elle a testé avant moi. En perfusion, elle. Moi, ce ne sont que des cachetons ! Je lui raconte. Je pleure. Je lui raconte. Je pleure.

Pourquoi ? Pourquoi moi ? Pourquoi une maladie rare, dis, tu sais toi pourquoi ? Dis, tu sais pourquoi je n’ai pas un cancer du sein comme ce que tu as eu ? Tu sais pourquoi il fallut que je tombe sur le truc qui touche une personne sur cent mille à tout péter ?…

Je hoquette.

Tu ne pouvais pas faire comme tout le monde, enfin ! Pas toi ! À personne exceptionnelle, maladie exceptionnelle !

Des mots magiques. Les mots magiques de mon amie Céline. Une amie coup de foudre. Vous savez, Céline, cette immense nana (elle doit mesurer au moins tout ça de centimètres, mais vachement plus que moi qui n’en affiche que 156,5) qui a de l’or dans les doigts et fait des chapeaux de fées, qui a un cœur plus grand que l’univers et des mots magiques qui m’ont redonné le sourire. Ses mots, je me les répète quand j’ai un petit coup de mou…

J’ai séché mes larmes. J’ai souri. J’ai ralenti. Je suis rentrée chez moi. Puis… j’ai commencé mon voyage en Thrombocytémie.

 

16 octobre 2019

Ce matin, je me demande si la vie en Papouasie ne serait pas plus facile qu’en Thrombocytémie. En Papouasie, j’aurais au moins un dictionnaire pour essayer de comprendre les habitants – à défaut de Google trad s’il n’y a pas de réseau -.

En Thrombocytémie, les gens sont muets, murés dans leurs corps qui leur font faux bond. Ces corps si lourds parfois, si douloureux. Ces corps que l’on doit remettre dans le droit chemin à coup de médocs de merde qui vous épuisent un peu plus, qui vous donnent la gerbouille…En Thrombocytémie, la Sécu vous envoie une lettre qui ressemble à un permis de séjour. Un permis de long séjour que j’ai découvert ce matin… « l’exonération du ticket modérateur, blablabla, est accordée pour la période du 27/09/2019 au 26/09/2029 ». Comme un coup de massue derrière la tête.Et dehors il pleut… Normal diront certains, j’habite en Normandie ! Et dehors il pleut, mais moi je ne pleurerai pas. Je vais attendre tranquillement que mon corps comprenne ce matin que nous avons ensemble une jolie journée à passer, que mon corps se mette en mouvement sans me faire mal, sans m’épuiser… Puis ensemble, nous bosserons sans regarder la pluie par la fenêtre… Puis ensemble, nous prendrons le temps de savourer l’après-midi avec ma fée qui n’a exceptionnellement pas cours – mais une dissert de philo à terminer -… Puis ensemble,… ah mais oui… Ensemble on fera un goûter-dîner de crêpes ! Voilà une bonne idée… En Thrombocytémie, malgré les nausées, j’ai encore le droit d’être gourmande… Rien que d’imaginer une crêpe savamment fourrée – voire blindée – de chantilly, le gris s’envole ! Bonne et jolie journée… avec chantilly, je l’espère pour vous !

 

4 novembre 2019

Je suis explosée, rincée, mais c’est fait ! Ce matin, j’ai eu une crise… d’aspiro ! Munie de mon engin à moteur fan de moutons et toiles d’araignées, j’ai arpenté les coins et les recoins de deux des étages de la maison. Le troisième ce sera pour un autre jour… une autre crise !

J’avais besoin que tout soit clean pour commencer cette nouvelle semaine. Que tout soit clean pour commencer cette nouvelle vie. Et oui, comme je l’ai réalisé cette nuit, ma nouvelle vie commence vraiment aujourd’hui. Terminé la course aux médecins, l’attente des diagnostics… Maintenant j’attaque la phase « suivi », toujours ponctuée de mes trois cachetons de chimio quotidiens, toujours ponctuée du comptage de mes bleus (je devrais dire hématomes, ça fait quand même plus pro !), toujours ponctuée de « aïe – ouille, putain de merde », sans oublier mon incontournable sieste, mes rendez-vous prises de sang, mes mails au professeur Tournesol en fonction des résultats hebdomadaires..

 

12 novembre 2019

– Il va falloir que tu guérisses vite…

– Je te rappelle que la thrombocytémie est incurable. Pas mortelle. Mais incurable, mon Amour. La maladie va se stabiliser. Puis j’aurai des crises… Puis on verra… Mais pourquoi faut-il que je guérisse si vite ?

– Parce que sinon on va finir obèse !

Rires ! Et re rires !

Il est vrai que le week-end, depuis cette nouvelle aventure, je passe du temps dans la cuisine. Beaucoup de temps. J’épluche. Je fais mijoter. Ou je fais cuire. Je surveille. Je goûte. Et je recommence. On pourrait me qualifier d’hyper active de la casserole ! … Pourtant ce n’est pas vraiment dans mes habitudes. Ou plus justement ce n’était pas. Car c’est devenu presque un rituel. J’aime me retrouver grimpée sur une chaise à la recherche d’une épice dans mes placards toujours mal rangés. Ou la tête dans le frigo, version spéléo en quête de crème fraîche… J’épluche. Je fais mijoter. Ou je fais cuire. Je surveille. Je goûte. Et je recommence. Presque à la chaîne. Jusqu’à ce que mon corps me crie « PAUSE ! REPOS ! » Quelle satisfaction de voir de jolis pots de gelée de coings, des boîtes remplies de soupe de carottes et de patates douces, une casserole où mijotent des carottes à la crème, tout en sentant une brioche en train de cuire… Mais, il va peut-être falloir que je me calme sur les quantités… Nous ne sommes plus que trois à vivre ici !

Je me souviens en 2015 – l’un des rares souvenirs que j’ai de l’été 2015 – de ma frénésie à faire des gâteaux. Burn out. Dévastateur. Mais hyper productif côté gourmandises ! Je ne mangeais pas grand chose et les enfants ne se régalaient pas toujours de mes gâteaux, contrairement à… nos poules !

Je m’imagine bien demander au professeur Tournesol : « Y-a-t-il un lien entre cuisine et maladie ? »… Je vais peut-être m’abstenir, histoire de ne pas finir avec une camisole !

 

18 décembre 2019

Rien ne va plus… Les cheminots grévistes font des émules dans ma carcasse !!! Ce matin, chevilles et pieds ont décidé de faire la grasse mat’. J’ai réussi à les mater, mais il m’en a fallu du temps. Et hop, du coup je suis à la bourre. Imaginez que mes doigts étaient également tentés par un mouvement de protestation ! Quel souk ! J’ai négocié un mi-temps avec eux, mais côté poignets, le blocus est plus violent. Le principal est d’arriver à pianoter sur mon clavier ! Un peu plus lentement que d’habitude, mais ça va le faire… Tout ça parce que j’oblige ma carcasse à continuer d’ingurgiter de la chimio, alors que mon taux de plaquettes a encore baissé et semble stabilisé (résultats de ma prise de sang hier). Le professeur Tournesol m’a même écrit : « C’est parfait chère Madame ! ». C’est pas génial tout ça ? Bon, mis à part que je suis sur les rotules (tiens, elles ne sont pas en grève, elles…. d’ailleurs elles n’ont jamais protesté depuis le début de ce voyage !), la vie est belle. Mis à part aussi que je vais bientôt ressembler à un arc-en-ciel… Je vous explique… Depuis le début de ce voyage, j’ai un peu de bleus, un peu beaucoup selon les semaines. C’est normal. Tout est normal d’ailleurs dans ce pays qui n’existe pas… Et depuis hier, les ongles de mes mains se colorent en… orange ! C’est normal. Effet secondaire de la lumière du jour associée à la chimio… Donc hier, je me suis ruée à la pharmacie. Et voilà que pour freiner cette coloration, il va falloir que je me lance dans la peinture ! J’ai acheté un vernis spécial qui filtre les UV. Je ne savais même pas que ce genre de truc pouvait exister… Moi qui suis archi nulle en manucure, je vais devoir me concentrer un max et faire de sacrés progrès, car, ma chimio et moi, on ne se séparera pas avant la mi mars 2020. Pffff… Et franchement, muter en Schtroumpfette, j’avais accepté l’idée, mais en arc-en-ciel, version licorne, là, je vous l’avoue, j’ai un peu de mal. Encore que… Allez, je vous laisse : j’ai licorne ! Bonne journée.

 

18 mars 2020

Le monde ne tourne pas rond. Il tourne plutôt carré, sous la menace d’un virus tout puissant… Il tourne carré et les hommes ont peur. Il tourne carré et il s’écroule. Chacun se retrouve face à face avec… lui-même !

Pas facile. Pas confortable…

Voilà presque six mois que j’ai déménagé dans un pays qui n’existe pas. Dans un pays où, très entourée et aimée, je suis seule. Seule avec mes doutes. Seule avec mes questions…

De quoi sera fait demain ?

Je ne sais pas. Je ne sais même pas de quoi sera fait ce soir… Tout dépendra de l’état de ma carcasse, de ma fatigue… Je ne sais rien. Pas facile pour quelqu’un qui aimait vivre à 100 000 %, pour quelqu’un qui vivait avec mille projets pour demain, après-demain, après-après-demain ! J’ai appris. J’apprends encore. Avec des rêves plein la tête – car ce n’est tout de même pas ma moelle osseuse qui va m’empêcher de rêver. Non mais… Enfin pour être juste, dans mon drôle de pays, il faisait bien gris depuis vendredi. Depuis les derniers résultats de mes analyses. Même mes lunettes roses n’arrivaient pas à embellir mon petit univers. J’essayais de me préserver des nouvelles de notre monde, tout en m’inquiétant pour ceux que j’aime… Mais le nombre de mes plaquettes occupaient mon esprit, détruisait mon optimisme – ou mon utopisme ? – Jusqu’à plonger à corps perdu dans le gris, dans un gris bien et trop foncé.

« Et si le professeur Tournesol faisait fausse route ? Et s’ il se trompait de traitement ? Et si… »

J’ai partagé – en la tamisant – mon inquiétude avec des amies. Et miracle… J’ai pu, grâce à elles, avoir en ces temps de crise sanitaire, l’avis de deux hématologues sur mon dossier médical. Ma petite personne a été écoutée, entendue, rassurée : mon professeur Tournesol est vraiment un grand chef à plumes au pays des hématos, il a raison d’augmenter mes doses de chimio, etc.

Hier soir, j’ai chassé mes craintes. J’ai décidé de vivre, confiante, et non plus de survivre. Elle est pas belle la vie ? Oh que si… même si nous vivons sous cloche. Et c’est quand même plus rigolo de vivre sous cloche qu’en confinement !

 

19 mai 2020

– Mon voyage dans ce drôle de pays se poursuit. Sans fin. Sans horizon. Juste le quotidien à savourer…

– Mais demain ?

– Demain j’en rêve ! Sans pour autant savoir ce que mon corps me réservera pour cette nouvelle journée. Alors, autant se délecter de l’instant. »

 

Pour acheter l’ouvrage :

https://www.librinova.com/librairie/karin-tourmente-leroux/drole-de-voyage-dans-un-pays-qui-n-existe-pas

 

Septembre Rouge, une première en France pour sensibiliser aux cancers du sang

Dans de nombreux pays, le mois de septembre est dédié à la sensibilisation à tous les cancers du sang. L’association « Vivre avec une NMP », présidée par Karin Tourmente-Leroux, auteure de « Drôle de voyage dans un pays qui n’existe pas » (éd. Librinova, 2022), a décidé de porter haut et fort le sujet en France afin de faire connaitre au plus grand nombre les cancers du sang à travers l’initiative #SeptembreRouge.  Illuminations de monuments, d’hôtels de ville, conférences les 7 et 14 septembre feront de septembre le mois de la mobilisation générale contre les cancers du sang.

Pour soutenir ce lancement, les Maires sont appelés à illuminer un monument en rouge en septembre : Charles-Antoine et Constance de Vibraye, touchés par le récent décès de l’un de leurs filleuls d’un cancer du sang, ont été les premiers à accepter d’éclairer en rouge tous les soirs du mois de septembre, le château de Cheverny dont ils sont propriétaires. 

Ils ont été rapidement rejoints par des communes qui ont accepté de se mobiliser pour #SeptembreRouge en éclairant en rouge hôtels de ville, bâtiments municipaux ou monuments, durant quelques jours ou un mois : La Rochelle, Saintes, Louviers, Houlbec-Cocherel, le Château de Cheverny, Orléans, Arras, Biarritz, Fleurance, Oloron-Sainte-Marie, Barr, Molsheim, Mulhouse, Paris 17e, Saint-Nicolas-d’Aliermont, Viry-Chatillon, Amiens, Toulon, Herblay…

Deux conférences publiques sur Internet auront également lieu, organisées en partenariat avec Dis-moi Santé*, et destinées aux patients, aux aidants et au grand public, les mercredi 7 et 14 septembre prochain, sur « les NMP, trois lettres pour des maladies rares », « Cancers du sang de l’adulte : où en sommes-nous ? ». Avec la participation du Professeur Jean-Jacques Kiladjian (Saint-Louis, Paris), du Professeur Jean-Christophe Ianotto (CHU, Brest), du Docteur Véronique Saada (Gustave Roussy, Villejuif), du Professeur Valérie Ugo (CHU, Angers), tous membres du conseil scientifique de « Vivre avec une NMP ».

Lien d’inscription : https://www.vivreavecunenmp.com/septembrerouge

#SeptembreRouge est soutenue par l’Etablissement Français du Sang, le FIM (France Intergroupe des Syndromes Myéloprolifératifs), lAssociation des Internes en Hématologie (AIH), Dis-moi Santé, le Press Club de France et la rubrique oNEhEALTH d’Opinion Internationale.

Pour cette première édition, #SeptembreRouge compte parmi ses soutiens le campus Saint Marc à Rouen, le site Mes sorties culture, la brigade de Sapeurs-Pompiers de Paris et a la confiance des laboratoires Abbvie, BMS et Novartis.

Pour tout renseignement : https://www.vivreavecunenmp.com/.

 

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