Selon une étude de l’Insee, huit emplois à temps partiels sur dix sont pourvus par des femmes. Il s’agit souvent de postes dans les métiers des services, plus exactement dans le ménage, l’entretien, le soin, la garde d’enfants ou de personnes âgées… Ce sont des secteurs qui peinent à recruter : il faut dire que les conditions particulièrement difficiles de travail ainsi que la rémunération peu attractive n’attirent guères.
Ces prestations sont généralement proposées par de grands groupes déployés en multitude d’agences dans toute la France. Leur modèle économique vise à facturer à des particuliers des prestations à l’heure. Pour ce faire, ils emploient souvent des femmes avec peu d’expériences ou de qualifications qui, elles, heureuses de trouver un emploi, sont prêtes à maintes concessions.
Souvent l’une des conditions d’accès à ces emplois, est d’être véhiculé afin de se rendre chez les clients pour y réaliser la prestation. A l’embauche, les promesses d’évolution ou de formation notamment vers des postes de responsables ou d’aides-soignants constituent un facteur de motivation important.
Ces entreprises prônent le « travailler plus, pour gagner plus », mais dans les faits, font peu travailler leurs employés en volume horaires mensuels, ce qui crée de facto des emplois précaires. En France, un temps complet représente 151.67 heures. Or le temps de travail mensuel des salariés de ces agences se situe autour de 100 heures mensuelles par mois. Le deal entre l’employeur et l’employé est le suivant : apporter satisfaction aux clients proposés en début de contrat pour ensuite aller vers une augmentation du nombre de clients par mois afin d’aller progressivement vers plus de temps de travail et ainsi un salaire plus important.
Au SMIC horaire brut actuel, la rémunération est de 11.27€, soit un salaire net de 879€ pour un volume mensuel de 100 heures. A cette rémunération, viendront ensuite s’ajouter des remboursements partiels de frais kilométriques. Comme souvent, dans les entreprises avant la signature du précieux CDI, il y a une double période d’essai de trois mois chacune.
En amont de la signature du fameux sésame, un entretien-bilan sur les mois passés dans l’entreprise est réalisé avec l’employé. Des conclusions sont tirées, c’est notamment l’occasion de mettre en avant les forces, mais surtout d’y pointer les faiblesses et axes d’amélioration.
Lors de ce fameux rendez-vous, Sylvie, aide-ménagère depuis six mois, qui intervenait pour une agence d’entretien à domicile, qui sillonnait les domiciles des clients dans un rayon de 40 Kilomètres autour de chez elle, a été poussée à la démission. Sans-emploi depuis plusieurs mois, elle avait saisi l’opportunité qu’on lui proposait de faire dans un premier temps « peu d’heures de ménages par mois », nous explique-t-elle pour ensuite évoluer comme on lui avait promis lors de son entretien d’embauche vers un poste d’aide-soignante pour laquelle l’entreprise devait la former. A l’issue de sa double période d’essai, l’employeur lui a fait comprendre « qu’elle n’était pas encore à la hauteur pour pouvoir augmenter son temps de travail mensuel » et l’a ainsi invitée à mettre un terme à sa période d’essai arrivant pourtant à son terme « si son objectif était d’obtenir un temps complet ».
L’observatoire des inégalités pointe que malgré une baisse des temps partiels subis en France, plus d’un quart des personnes dans cette situation souhaite comme Sylvie travailler plus. L’étude confirme que les principales victimes de ces contrats sont des femmes.
En plein contexte de réforme des retraites, ces contrats dans le secteur des services à la personne contribuent à faire croître la fracture sociale.
Radouan KOURAK
Rédacteur en chef d’Opinion Internationale