La chronique de Patrick Pilcer
08H48 - mercredi 19 avril 2023

Allocution du Président  : les syndicats croient-ils encore au Progrès  ? La chronique de Patrick Pilcer

 

Le Président a absolument raison quand il propose Travail et Progrès comme piliers de la reconstruction de notre Vivre ensemble. Comme beaucoup, nous l’écrivions depuis quelques temps, depuis quelques années. Il est clair qu’il nous faut, collectivement, redonner le goût de l’Effort, le valoriser, le réapprendre dès l’Ecole. Il est patent que cette reconstruction collective passe par le Progrès. Il nous faut mieux encore intégrer le progrès scientifique dans nos vies, de la naissance à la fin de vie, de l’Ecole à la Retraite, et bien sûr dans les entreprises. Sans intégrer le Progrès, nous ne pourrons améliorer la Société, nous ne pourrons mieux vivre. Si nous n’avançons pas, si nous ne sommes plus en mouvement, « en marche », nous nous effondrerons. C’est là encore une évidence.

On peut s’interroger ensuite sur le troisième pilier, l’ordre républicain, que propose le Président. Chercher à attirer la sympathie des électeurs, et députés, de droite, est de bon aloi, mais il me semble qu’il aurait été plus justifié de faire de la Laïcité ce troisième pilier et de rassembler, en même temps, gauche républicaine, radicaux et droite républicaine.

Chercher l’ordre après le chaos, bien sûr, en faire un socle de la reconstruction républicaine, non.

L’ordre reviendra, naturellement, si on remet la mairie au milieu du village. La Laïcité, c’est-à-dire, permettre la liberté de conscience, permettre l’émergence de la liberté de conscience dès l’Ecole, la liberté de croire, de ne pas croire ou de ne plus croire, est la respiration de la République, elle lui donne l’oxygène nécessaire. Elle est un peu comme le silence, en musique. Sans les silences, la musique n’est que bruit, brouhaha.

La Laïcité nous permet de faire Nation et d’être indivisibles, unis ; notre République est forte et grande parce qu’indivisible, pas en se considérant comme la somme de communautés et d’intérêts particuliers. Depuis trop longtemps, notre République manque d’oxygène, elle est à bout de souffle !

La Laïcité, en somme, est le Vivre Ensemble à la Française, exactement ce que veut améliorer le Président !

Or, force est de constater que la Laïcité est souvent le parent pauvre des orientations des gouvernements Macron. Le choix de Pap N’diaye comme ministre de l’Education, en remplacement de Jean Michel Blanquer, défenseur acharné de la Laïcité, laissait présager déjà quelques renoncements et « accommodements raisonnables ». La nomination par Pap N’diaye d’Alain Policar au Comité des Sages de la Laïcité est un coup grave porté à la Laïcité, une faute lourde. Comme le dénonce à juste titre le Comité Laïcité République, ce sociologue ne cache pas ses sympathies « wokistes » et « résiste à renoncer » au concept de « racisme systémique » au sujet des institutions de la République.

Cette nomination, à elle seule, mériterait le renvoi du ministre et un remaniement.

Elisabeth Borne serait d’ailleurs bien inspirée de revoir son équipe. Exit Pap N’Diaye bien sûr, mais aussi quelques autres ministres et secrétaires d’état. Schiappa dans Playboy, un journal qui s’illustre plus par le choc des photos que par le poids des mots, ne nécessite aucun commentaire supplémentaire.

D’autres ministres, par contre, tirent remarquablement leur épingle du jeu : Attal, Darmanin, Lemaire, Lescure, Guerini, Retailleau, Oudéa Castéra, Beaune, et j’en oublie, mais la liste n’est pas si longue. La reconstruction que prône le Président passe aussi par là. Resserrer les rangs, récompenser l’effort, le travail des ministres, sanctionner leurs erreurs.

Et bravo aussi à Elisabeth Borne, qui face au chaos et au tumulte, a su être roseau et non chêne, a su plier sans être déracinée.

Alors pourquoi cette évocation présidentielle des 100 jours pour cadrer son action ? CEnt jours qui font écho dans la mémoire collective au Cent jours de Napoléon entre l’île d’Elbe et son abdication ? Non, madame Borne, n’abdiquez pas.

Enfin, pour avancer collectivement, encore faut-il avoir les bons partenaires ou interlocuteurs ?

L’attitude depuis plusieurs années des syndicats ne montre pas, loin s’en faut, un attachement à la notion même de progrès. Les syndicalistes devraient être à la pointe du combat, à l’avant-garde, pour intégrer les progrès et innovations dans l’amélioration des conditions de travail. Ils restent muets sur ces sujets, statiques, voire réactionnaires, en laissant penser qu’avant c’était mieux.

Ils devraient être les premiers à prendre le Président au mot, à accepter la main tendue, et dire « banco, oui au Progrès, travaillons ensemble à l’amélioration des conditions de travail, à l’amélioration de la société, au mieux travailler et au mieux vivre ». Et non, ils restent figés sur l’âge de la retraite.

Les syndicats devraient réfléchir avec le gouvernement, et surtout avec les entreprises, pour augmenter le nombre de seniors au travail, le nombre de jeunes en entreprise. En augmentant le nombre d’heures travaillées, au global, dans notre pays, on accroît la richesse de notre pays, on améliore le pouvoir d’achat des citoyens comme nos rentrées fiscales, et donc notre capacité à investir plus encore dans nos écoles, nos hôpitaux, nos infrastructures.

C’est comme si ces syndicats ne croyaient plus au Progrès, et sombraient dans le déclinisme. Ils se trompent gravement. Tous les jours, nos chercheurs trouvent des améliorations, petites ou grandes, à nos problèmes techniques, scientifiques, médicaux. Tous les jours, ils trouvent des solutions pour améliorer nos vies.

Alors un grand oui au triptyque Effort Progrès Laïcité qui renforcera la devise Liberté Egalité Fraternité et, au-delà, notre République !

 

Patrick Pilcer

Conseil et expert sur les marchés financiers, président de Pilcer & Associés,
Chroniqueur Opinion Internationale