Un des principaux paradoxes du moment, en France, est le sentiment de pessimisme collectif face à un optimisme individuel. Churchill disait : « le pessimiste voit la difficulté dans chaque opportunité, l’optimiste voit l’opportunité dans chaque difficulté ». Dans la crise des gilets jaunes comme dans le non-débat sur les retraites, force est de constater le pessimisme collectif qui domine dans notre pays.
Qu’est-ce qu’être optimiste ? c’est voir le meilleur (optimus en latin) en soi et chez les autres. C’est espérer, oeuvrer et s’attendre au meilleur. C’est tirer le meilleur de chacun. C’est avoir une attitude positive et active face à l’incertitude et aux difficultés.
Individuellement, nos concitoyens sont optimistes. On le voit dans les sondages mais surtout dans les indicateurs de santé. L’optimisme et la pensée positive, que nous ne confondrons pas avec l’utopisme et l’irréalisme, ont des vertus sur notre santé : meilleure résistance au stress, plus grande confiance en nous, bien être global plus important, meilleure productivité, etc… Plusieurs études au Canada, sur 200 000 personnes, ont démontré que plus l’individu est optimiste, meilleur est son taux de coagulation, meilleure est sa santé. Moins de maladies cardiaques, meilleurs résultats après une chirurgie, meilleure résilience face au stress et à l’échec. Et en France, au niveau individuel, l’optimisme domine, le bonheur, personnel, l’emporte.
Bonheur personnel mais malheur public par contre, car, en tant que groupe, les Français semblent persuadés que tout va mal, qu’hier était mieux qu’aujourd’hui et encore plus que demain, pire ils ne croient plus au Progrès, au progrès scientifique comme médical ! les Français, collectivement, font l’inverse du raisonnable. Au niveau individuel, ils suivent le fameux adage : quand je me regarde je me désole, quand je me compare je me console. Mais au niveau collectif, ils ne font que se désoler, en se regardant comme en se comparant ! Ce phénomène peut devenir un problème de santé publique, et c’est dès à présent un problème de conscience publique, de conscience de groupe.
On peut dresser ce constat jusque dans les entreprises. Les entrepreneurs français, en grande majorité, prévoient une bonne progression de leur chiffre d’affaires et de leur marge, mais, la plupart pronostiquent une économie nationale en très faible croissance sinon en récession. Comme si la somme de bons résultats pouvait donner un chiffre médiocre… Ce que l’on retrouve au niveau des entrepreneurs, est vrai également au niveau des salariés et des citoyens en général.
Il faut dire que l’image des « premiers de cordée » n’aide pas beaucoup. Cette image sous-entend qu’il y a ceux qui hissent et se hissent, et ceux qui se font hisser, les actifs et les poids morts, et si ces poids morts nuisent à la vitesse du groupe, faut-il couper la corde ?
Dans une société, le lien n’est pas vertical, il n’y a pas de cordée, le lien est horizontal, nous sommes tous les maillons d’une même chaine humaine, et tous les maillons sont du même métal. Il y a bien sûr les maillons forts et les maillons faibles, mais la force de tous dépend du maillon le plus faible. Si nous voulons être plus forts, il nous faut solidifier les maillons les plus faibles. C’est aussi cela faire Nation, Vivre Ensemble. Mieux Vivre ensemble implique non pas que les premiers de cordée grimpent plus vite, mais que toute notre chaine soit plus solide.
Alors en quoi l’optimisme peut-il nous aider à solidifier la chaine ?
L’optimiste tient un peu de Prométhée, il pense que les recherches d’aujourd’hui feront les innovations et les remèdes de demain, il cherche le meilleur (optimus) en lui, il travaille à s’améliorer, à améliorer l’homme et la société, il pense résoudre les défis, climatiques, économiques, sociétaux. L’optimiste a soif de liberté, de liberté de pensée, liberté de conscience, liberté d’agir. L’optimiste s’arme de son courage quand le pessimiste s’enferme dans ses peurs. L’optimiste construit des ponts entre les hommes quand le pessimiste se réfugie derrière les murs.
Le premier de cordée peut se tromper et se prendre non pour Prométhée mais pour Icare, quand l’optimiste est sincère, « sans cire », son travail ne risque pas de fondre en se rapprochant du soleil. L’optimiste ne vise d’ailleurs pas le soleil mais sa lumière. Icare ne peut que s’écraser au sol, quand Prométhée nous permet de solidifier notre chaine humaine !
Alors, collectivement, retrouvons le courage de Prométhée ; retrouvons l’optimisme, tous ensemble !
Patrick Pilcer
Conseil et expert sur les marchés financiers, président de Pilcer & Associés,
Chroniqueur Opinion Internationale