Le G7 se réunit du 19 au 21 mai 2023 à Hiroshima, terre symbole pour le Japon comme pour l’ensemble de l’humanité. La centrale nucléaire de Fukushima-Daiichi sera-t-elle une fois de plus dans toutes les têtes des dirigeants occidentaux et des nombreux Etats et habitants du plus grand océan de la planète, le Pacifique ?
Les sushis risquent d’avoir un goût bizarre dans quelques décennies, a fortiori si le poisson est pêché au large des cotes japonaises, si tant est que les océans n’aient pas entre temps été vidés de leur poisson par la surpêche, nippone en particulier. Ils risquent même d’avoir un goût de poisson cuit, ce qui est un comble pour des sushis. Sushis Becquerel, cuits à la radioactivité.
Le gouvernement japonais a en effet accordé au groupe énergétique TEPCO l’autorisation de déverser les eaux usées de la centrale nucléaire de Fukushima-Daiichi dans l’Océan Pacifique, bien commun de l’humanité dont le Japon n’est pas le propriétaire. Erreur ou faute abyssale, précisément, en l’absence de garantie quant à l’innocuité à long terme de cette pollution programmée. Si garantie il devait y avoir, ce serait au contraire celle de graves problèmes pour les prochaines générations, ce dont les autorités japonaises ne semblent pas faire grand cas.
Comme le rapportaient récemment Reuters et TF1, « la démarche suscite l’inquiétude de l’industrie nationale de la pêche et de pays voisins. »
Les déchets nucléaires ont une « demi-vie » (délai pour perdre la moitié de leur radioactivité) variable selon leur nature. Le bouillon que Tokyo s’apprête à servir à l’océan pacifique aurait une demi-vie de plus de douze ans, et serait significativement radioactif durant un siècle. Plus qu’il n’en faut pour engendrer des dégâts irréparables et se retrouver tantôt dans la chaine alimentaire.
Quels seront les effets de ce déversage nauséabond à long terme sur les écosystèmes marins, la faune et la flore marines et sous-marines et au-delà, jusqu’aux nuages par évaporation. Et quelles seraient les répercussions économiques, notamment sur l’agriculture et l’industrie de la pêche si chère aux Japonais, si l’océan s’en retrouvait contaminé ?
Le gouvernement nippon a-t-il oublié qu’après la catastrophe de Fukushima, la rivière Abukuma avait été interdite de pêche pendant dix ans du fait de la radioactivité ? Cette fois, le déversement serait effectué directement dans l’océan, et il serait brutal, massif (un million de tonnes), s’ajoutant aux centaines de milliers de tonnes d’eau radioactive déjà déversées depuis 2011.
À cette échelle, il n’est pas exagéré d’évoquer un écocide, un crime écologique contre l’humanité, et ce d’autant plus qu’il existe des méthodes de décontamination, certes coûteuses et encore perfectibles, mais qui ne peuvent qu’être améliorées. Le gouvernement du Japon préfère-t-il jouer l’esquive, assurant que la soupe radioactive sera filtrée et diluée, et qu’elle serait donc inoffensive ?
Ces assertions sont contestées par des scientifiques qui affirment que les eaux de refroidissement contiennent du tritium, impossible à filtrer et diluer. Esquive ou mensonge et bientôt scandale d’État, ou désastre planétaire ? D’ici là, les auteurs du crime pourraient ne plus être là pour en répondre…
En 2020, le Premier ministre Yoshihide Suga avait refusé de boire de l’eau radioactive traitée. Son successeur Monsieur Fumio Kishida s’honorerait (l’honneur est d’ailleurs une vertu japonaise bien connue) de revenir sur cette initiative impardonnable, et d’investir dans l’assainissement de l’eau radioactive qui devrait être stockée le temps nécessaire.
Le Japon accueille donc le sommet du G7. Le lieu est certes bien choisi : Hiroshima ! Cela devrait éveiller quelques consciences, japonaises d’abord, mais pas seulement. D’autres pays du Pacifique, comme les États-Unis, la Corée du Sud, la Chine, Taiwan ou les Philippines vont sans doute se joindre à de nombreux Japonais pour réclamer des dirigeants de Tokyo que l’irréparable ne soit pas commis.
Respecter la planète, gérer la sécurité et les déchets, telles sont aujourd’hui les conditions de l’acceptation du nucléaire dans le mixte énergétique que la planète se destine à développer entre atome et énergies renouvelables.
Espérons que la France sera à l’unisson, ne serait-ce qu’au nom des îles françaises du Pacifique, et plus généralement, de tous les pays insulaires de plus vaste océan de la planète pour que le Japon ne déverse pas les déchets de Fukushima dans le Pacifique.
Michel Taube et Radouan Kourak
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