Gérald Darmanin en Tunisie pour annoncer une aide bilatérale de 25,8 millions d’euros pour équiper et former les garde-côtes tunisiens, un doublement en 2022 du nombre d’arrivées sur les côtes italiennes, un navire qui chavire au large de la Grèce avec des centaines de victimes, un demandeur d’asile qui poignarde des enfants à Annecy, la plus forte augmentation jamais enregistrée d’une année à l’autre en 2022 avec 110 millions de réfugiés dans le monde recensés par le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés… C’est peu dire que les injonctions paradoxales qui font l’actualité secouent la bonne et la mauvaise consciences de nos concitoyens en cette Journée mondiale du réfugié du 20 juin.
Mais l’enfer est pavé de bonnes intentions et nous l’allons montrer tout à l’heure… C’est-à-dire de suite.
« Charité bien ordonnée commence par soi-même ». Pour la nouvelle intelligence suprême, ChatGPT, l’expression serait de Corneille. Vraiment ?! Pour d’autres esprits moins sophistiqués (genre humanoïde), elle émanerait de François Barthélemy Arlès-Dufour, un philanthrope saint-simonien du 19ème siècle. Parfois, des expressions voisines ont un sens analogue. Que penser de celle de Jean de La Fontaine dans ce vers de la fable L’alouette et ses Petits avec le Maître d’un champ : « Il n’est meilleur ami ni parent que soi-même ».
À y regarder de plus près (de ses sous ?), on retrouve l’expression sous d’autres cieux et donc dans d’autres langues. Dans le documentaire « Get Back » consacré aux Beatles, on entend le très spirituel Georges Harrison souligner que « Charity begins to the home », une expression a priori pas très chrétienne, puisque charité et amour de son prochain sont des valeurs chrétiennes essentielles, quoique partagées par d’autres cultes. Pourtant, la théologie s’est fort bien accommodée de ces menues réserves à la charité sans bornes. L’idée que pour (mieux) aider, il faille d’abord être en mesure de subvenir à ses propres besoins a fait école. La charité dans la sérénité, en quelques sortes.
La charité n’est pas toujours si morale, la piécette donnée au mendiant relevant parfois de la bonne action qui permet de se donner bonne conscience. Ma BA du jour, et on oublie… Et c’est encore mieux quand c’est dans un lieu public, comme un bus ou un métro : « regardez comme je suis bon ! ». Amen.
Le droit français a intégré ce principe dans le Code civil napoléonien, notamment s’agissant de la solidarité intergénérationnelle : l’obligation alimentaire ne doit avoir pour effet de mettre l’obligé dans le besoin. Du simple bon sens, sans doute, sachant que le bon sens n’est pas une source de droit.
De nos jours, plus que la charité, la générosité sans condition serait plutôt l’apanage des courants multiculturalistes, wokistes ou indigénistes, et plus largement de cette gauche drapée dans la morale, la repentance jusqu’au « Selbsthass », expression allemande désignant la haine de soi, « soi » étant la société occidentale et le capitalisme ». Cela étant, l’apôtre Jean-Luc Mélenchon a bien compris que la charité, bien ou mal ordonnée, commençait par soi-même : « À mon âge, je peux bien voyager en classe affaires ! » À chacun sa Rolex, en définitive.
La charité moderne porte souvent sur l’immigration. « Une chance pour la France » selon les uns (tel était le nom d’un livre de Bernard Stasi en 1992), la source de tous nos maux selon des Eric Zemmour. Même en excluant les migrants économiques ou opportunistes, que la gauche radicale souhaite accueillir sans limites et sans qu’ils n’aient d’obligation d’accepter les valeurs du pays d’accueil, il y a tant de conflits, de misère, de souffrance dans le monde que la France pourrait très vite compter quelques millions d’habitants de plus si on considérait que charité (ou générosité, entraide…) bien ordonnée ne commence finalement point par soi-même.
Ceux qui prétendent qu’il faut aider l’Afrique à se développer pour que les Africains n’aient plus l’envie ou le besoin de migrer vers le nord croient ou font croire au miroir aux alouettes. Et ceci pour quatre raisons précises…
Premièrement, la corruption endémique et exponentielle à la tête de nombreux pays africains prive de tout horizon d’espoir des millions d’habitants de ces pays. Les meilleurs élèves, les cadres les plus compétents ne rêvent que d’aller prospérer sur d’autres continents.
Ensuite, tout le système international de protection des demandeurs d’asile et des réfugiés est détourné massivement par des migrants économiques de confort. La preuve ? Le deuxième contingent de demandeurs d’asile en France, ce sont des Ivoiriens, alors que la Côte d’Ivoire est une démocratie robuste. La plupart sont déboutés de leur demande de protection mais ils sont appelés à rester éternellement sur le sol français, s’enlisant dans une impasse juridique et sociale insupportable pour eux comme pour les Français. Seconde preuve : les Afghans forment le contingent le plus important mais pourquoi 95% d’entre eux sont des hommes et non des femmes, alors que ce sont elles qui sont le plus persécutées ?
Troisième lame de fond, l’islamisme gagne du terrain jusqu’aux confins de l’Afrique ouest-occidentale : du Sénégal à l’Ouganda, du Bénin au Cameroun, l’islamisation de l’enseignement d’une part et les meurtres sanguinaires d’innocents, que des Etats corrompus n’arrivent pas à endiguer, annoncent de sombres années et pousseront encore plus de jeunes à partir et à tenter l’impossible pour goûter à la liberté.
Enfin, lorsque les migrations climatiques deviendront massives (ce sont des centaines de millions d’innocents qui sont guettées par la détresse hydrique), parce que certaines contrées très peuplées seront devenues inhabitables (l’emploi du conditionnel n’est hélas plus d’actualité), le dilemme deviendra insoutenable : se laisser submerger ou défendre nos frontières coûte que coûte. Ni l’un ni l’autre, évidemment, puisqu’on va arrêter le réchauffement en roulant en vélo !
Si on y ajoute une croissance démographique quasi exponentielle (les autorités nationales des Etats africains ne savent souvent même pas quelle est leur population réelle, des dizaines de millions d’enfants n’ayant même pas d’état civil), on peut considérer que l’illusion aveuglante de la charité qui voudrait accueillir toute la misère du monde et plus particulièrement de l’Afrique et du Moyen-Orient est politiquement criminelle.
L’aide au développement, surtout sous forme de subventions, est inopérante face à ces tsunamis annoncés.
Le concept de citoyen d’un monde sans frontières n’est donc même pas une utopie de doux rêveurs (de gauche bien sûr, les réalistes – de droite, bien sûr – étant des salauds !). Même dans le règne animal, toute société s’est toujours construite sur un territoire délimité par des frontières. L’homme s’est construit ainsi, jusqu’à forger le concept d’État-nation. Il est de la responsabilité des dirigeants, à fortiori dans une démocratie dont ils sont élus, de défendre en priorité leurs citoyens.
La vérité est cruelle : combien de criminels en puissance comme celui d’Annecy commettront-ils des actes irréparables dans les années qui viennent, devenus fous à force de s’être emmurés dans leur refus ou une impossible intégration à la France et à l’Europe ?
Intégrons et assimilons déjà les étrangers présents sur le sol européen qui travaillent depuis des années et qui exercent notamment les métiers de premiers de cordée, qui prouvent leur amour de la France et de la langue française, et expulsons ou isolons ceux qui refusent de s’intégrer ou commettent des délits ou des crimes, et la charité s’en portera beaucoup mieux.
Priorité ne veut pas dire exclusivité, mais inverser les priorités au nom d’une idéologie relève de la trahison.
Décidément, charité bien ordonnée commence par soi-même.
Michel Taube