La course pour les présidentielles de 2027 est lancée. Le meeting de Gérald Darmanin à Tourcoing en témoigne.
Darmanin hésite encore sur la meilleure stratégie à adopter pour les trois ans qu’il nous reste avant ce grand scrutin. En juin/juillet, il semblait privilégier la case Matignon pour atteindre le Graal suprême.
Il aurait bien tort de briguer le poste de Premier Ministre. Car enfin, quel premier ministre dans le passé a réussi à être élu président ? aucun !
Depuis Chaban Delmas, ce poste fait surtout perdre les élections. Chaban donc, Barre, Chirac première version, Balladur, Jospin, Fillon. Aucun ne l’a emporté. Et on pourrait ajouter Juppé, voire Fabius.
Quand un premier ministre peut afficher un bon bilan, cela profite au président en exercice, quand le bilan est mauvais, c’est de la faute du premier ministre ! un poste à éviter si l’on veut être élu président ! Sans oublier que le président en place voit toujours d’un mauvais œil, même dans son inconscient, lorsqu’un « collaborateur » veut le remplacer.
Ce poste est d’ailleurs le boulet d’Edouard Philippe, un mauvais bilan, avec en toile de fond la révolte des gilets jaunes qui démarre avec son entêtement, droit dans ses bottes, sur les 80km/h et les taxes sur l’essence. Un profil qui l’identifie à deux perdants, à son mentor, Juppé, comme à Fabius.
Gérald Darmanin a donc raison de ne pas passer par la case Matignon. Il a raison d’incarner le pouvoir régalien Place Beauvau. Sarkozy avait utilisé la même ficelle, être le premier flic de France, le Clémenceau des Temps Modernes, avec pour Darmanin la CRS 8 en guise de brigades du Tigre ! Bercy, et tenir les cordons de la bourse, peut aussi être utile. Mais surtout pas Matignon, où d’ailleurs Elizabeth Borne excelle. Il est bien plus intéressant pour Darmanin d’aider Borne et d’en faire une alliée. Cette alliance lui permettrait de grignoter le vote des femmes, qui lui fait encore cruellement défaut.
Ensuite, et surtout, il faut que Darmanin aille au-delà du yakafaukon. Il faut qu’il dise aux Français quelle France il veut dessiner pour 2030/2050. Il faut qu’il nous dise quel type d’Etat il souhaite. Un état policier, liberticide, xénophobe, replié sur lui-même, avec un programme économique qui ruinerait notre pays, comme le RN le propose ? Un état wokiste, indigéniste, collectiviste, digne de l’URSS des années 60, du Cuba de Castro ou du Vénézuela de Chavez et Maduro, comme LFI l’envisage ?
Ou un Etat moderne dont le rôle est de prendre en charge le Régalien, réduire les incertitudes, dresser un cadre pérenne qui permet aux libertés individuelles de s’exercer, pour le Bien Commun ? Un Etat qui organise le Vivre Ensemble, le liant, qui organise la solidarité ? Un Etat Solidariste moderne en somme ! Alors là oui !
Un Etat décentralisé aussi, avec comme exemple la réussite des Mutuelles. Comme l’Etat, les Mutuelles s’inscrivent dans le temps long et s’enracinent dans tous les territoires de notre pays, avec une gouvernance locale représentative sur laquelle la gouvernance nationale peut s’appuyer pour imaginer et développer ce qui peut être le plus utile pour tous ses sociétaires.
Un Etat mieux organisé aussi, grâce aux nouvelles technologies, grâce au bon sens surtout. Moins de personnels administratifs dans les écoles et les hôpitaux, plus d’instituteurs, de maîtres, de professeurs, de personnels soignants, moins de niveaux hiérarchiques, plus d’efficacité.
Mais pour proposer cette France moderne pour 2030-2050, Darmanin ne peut gagner seul, il doit rassembler autour de lui les meilleurs, et l’avenir dira ensuite s’il est le mieux placé pour l’emporter ou s’il doit aider un autre.
Il doit rassembler sans éliminer les égos, il doit au contraire être heureux si des profils très différents du sien ou partageant les mêmes ambitions personnelles le rejoignent. C’est un peu comme dans une entreprise bien gérée, le chef d’entreprise est heureux et fier d’embaucher des gens meilleurs que lui sur lesquels il peut s’appuyer et qui peuvent le suppléer au cas où.
Quelle dream team nous aurions si Bernard Cazeneuve, Carole Delga, Nicolas Mayer Rossignol, Laurent Hénart, Bruno Lemaire, Edouard Philippe, Jean Michel Blanquer, Gabriel Attal, François Bayrou, Elizabeth Borne, Xavier Bertrand, David Lisnard, voire Eric Ciotti et Laurent Wauquiez, se mettaient ensemble autour d’une table avec Darmanin, une table ronde bien sûr, pour viser une même quête du Graal ! et que le mieux placé gagne, sans primaire, par cooptation de ses pairs, afin que la France l’emporte…
Le rêve de deux Français sur trois ! A Darmanin de transformer cela en réalité pour aujourd’hui et demain !
Patrick Pilcer
Conseil et expert sur les marchés financiers, président de Pilcer & Associés, Chroniqueur Opinion Internationale