Il faut imaginer la scène. La police française arrête le premier ministre israélien Benjamin Netanyahou à sa descente d’avion à Paris et le remet à la Cour Pénale internationale (CPI) comme l’exige la loi. La loi serait respectée. La tradition aussi : celle qui voit les autorités françaises arrêter des juifs pour les remettre aux autorités étrangères qui en ont donné consigne.
On n’en n’est pas encore là, néanmoins le 21 mai 2024 est à marquer d’une pierre blanche. Un cran de plus franchi dans l’ignominie. Le procureur de la CPI (Cour Pénale Internationale) Karim Khan a demandé aux juges de l’institution de délivrer un mandat d’arrêt international contre le premier ministre israélien, son ministre de la défense, Yoav Gallant, ainsi que trois dirigeants du Hamas renvoyant ainsi dos à dos, les dirigeants élus d’une démocratie qui se défend et les terroristes sanguinaires qui se sont livrés le 7 octobre dernier à un pogrom, la plus grave agression anti-juifs depuis la seconde guerre mondiale.
Dans ce dossier ce qui nous intéresse en tant que français, c’est la position de notre pays. Contrairement aux Etats-Unis, à l’Allemagne, l’Italie et bien d’autres démocraties qui se sont offusqués de cette demande, la France a annoncé soutenir la CPI dans sa démarche.
Certes, le ministre Séjourné a beau déclarer – avec un art consommé de la contradiction- qu’il « n’est pas question de créer une équivalence entre Israël et le Hamas » alors que le principe du procureur est précisément de créer ce lien dans une requête commune, il n’en reste pas moins que cette position est conforme à la doctrine anti-israélienne du Quai d’Orsay depuis 1967. Elle s’inscrit surtout dans une tradition française de lâcheté vis-à-vis de ses citoyens de confession juive.
En 1940, la France de Vichy fût prompte à déchoir les Juifs de leur nationalité pour plaire aux nazis, puis ensuite ce fût 1967 ou, encore une fois par lâcheté, le Général de Gaulle n’hésita pas à imposer un embargo sur les armes qui devaient être livrées à Israël, pourtant allié de la France dans le conflit qui opposa celle-ci à l’Egypte lors de la crise du canal de Suez en 1956. De Gaulle avait la mémoire courte et bien peu de reconnaissance. Cela aurait pu appartenir au passé sauf que cela fait trente ans que notre pays continue de sacrifier ses concitoyens juifs en faisant preuve d’une incommensurable lâcheté à leur égard.
Alors que le déclaratif permanent est manifestement sympathique avec ce mantra infiniment répété par nos dirigeants « la France sans les Juifs, ce n’est pas la France », ceux-ci subissent depuis plusieurs décennies une haine et des persécutions dont le principal prétexte est la situation au Proche-Orient. Depuis 2000 et la seconde Intifada les agressions, meurtres et atteintes aux lieux de culte ont provoqué un exode des Juifs des quartiers populaires vers des quartiers plus sûrs pour certains et vers l’étranger pour d’autres.
Pour quelle raison ?
Parce que la peur de nommer et de montrer du doigt le mal a totalement inhibé les gouvernants français. En effet, ce qu’on appelle le nouvel antisémitisme est essentiellement une haine importée du Maghreb et d’Afrique Subsaharienne. Or par crainte de nuire à la « paix sociale », les pouvoirs publics ont pris, depuis des décennies le parti de ne pas contrarier certaines populations. La police est empêchée d’agir, les enseignants censurés, les homosexuels, les juifs et autres minorités sont menacés en toute impunité. Nous pensions le point d’orgue atteint avec le déni de justice subi par Sarah Halimi, massacrée et défenestrée par un islamiste qui ne sera pas jugé. Cette décision judiciairement très discutable est en fait une décision politique, celle de la crainte qu’un tel procès ne vire en tribune contre ce que l’on appelle pudiquement « le nouvel antisémitisme ». En outre, cette obsession de maintenir une illusoire paix sociale conduit à essentialiser de manière injuste nos concitoyens musulmans, en les faisant passer pour une communauté à la pensée monolithique que l’on flatterait en s’en prenant à leurs supposés ennemis.
Lâcheté donc et double langage.
Depuis le 7 octobre, le président français ne cesse de gesticuler lamentablement.
Quelques temps après l’attaque, il se rendait en Israël et y prônait contre toute attente et préparation, la constitution d’une coalition internationale contre le Hamas sur le même modèle que celle contre Daesh. L’idée a tenu 24 heures. A peine de retour en Europe, il déniait sur les ondes de la BBC le droit d’Israël à se défendre. Puis ce fût l’incompréhensible décision de ne pas participer à la marche contre l’antisémitisme.
Voilà aujourd’hui le soutien de la France à la démarche de la CPI qui renvoie dos à dos les terroristes du Hamas et la démocratie Israélienne tout en faisant dire l’inverse au ministre des affaires étrangères.
Inconstance, incohérence et comportement quasi-schizophrénique resteront les marqueurs de l’action présidentielle.
Sur le plan du droit, l’aboutissement de cette démarche constituerait une jurisprudence qui empêcherait désormais les démocraties de se défendre contre le terrorisme. Cela aurait par exemple empêché la France et les USA de vaincre Daesh. Une telle impuissance institutionnalisée serait un terrible signal envoyé aux thuriféraires du radicalisme religieux.
D’autres pays tels que l’Allemagne qui disposent pourtant d’une grande communauté musulmane ont pris des positions inverses sans aucun heurt. Cela démontre bien que c’est possible avec du courage et des convictions.
Agir comme le fait la France, c’est cautionner l’idée fausse que l’on pourrait s’économiser une explosion dans les banlieues à l’approche des JO de Paris en sacrifiant une fois de plus le reste des français. Car en agissant ainsi, ce n’est pas uniquement les juifs qui sont concernés mais bien l’ensemble de la communauté nationale. C’est en effet elle qui pâtit à chaque fois que la France se couche devant les islamistes. En rivalisant avec la France Insoumise dans l’essentialisation, le gouvernement se déshonore. Il prend des positions qui font penser à l’adage prêté à Churchill : « vous avez voulu éviter la guerre au prix du déshonneur, vous aurez la guerre et le déshonneur ». L’esprit munichois n’a décidément pas quitté notre pays malgré les leçons de l’histoire qui a pourtant enseigné une certaine idée de la lâcheté française.