La consultation organisée en ce mois de mai va rendre un premier verdict.
Qui seront nos deux porteurs de drapeau pour la cérémonie d’ouverture de Paris 2024 ? La publication de la liste, prévue en juin, précèdera l’élection. Seuls les sportifs sélectionnés pour les épreuves de Paris 2024 votent. Les lauréats seront connus à la mi-juillet. Ils doivent avoir déjà brillé lors d’éditions précédentes. Un homme et une femme assureront cette mission, nécessairement pour la première fois. Les judokas Teddy Riner (porteur en 2016) et Clarisse Agbegnenou (en 2021) ne peuvent ainsi pas postuler.
Depuis plusieurs semaines, la France multiplie les sondages. Celui de nos confrères du journal L’Équipe aura interpellé nos consciences. Le triple champion olympique, meilleur joueur de l’histoire du sport collectif le plus titré de notre pays, le handballeur Nikola Karabatic recevait un plébiscite.
Malheureusement une vieille erreur resurgit de son passé : en 2012, Nikola et quelques anciens coéquipiers montpelliérains ont parié sur un de leurs matches de championnat. Cela a toujours été interdit et la justice a condamné les fautifs, dont le handballeur star (deux mois de prison avec sursis et 10 000 euros d’amende). C’est « ballot » !
A priori le nouveau règlement du CNOSF, qui exige pourtant du futur porte drapeau une moralité sans tâche, n’exclut pas du casting les auteurs de ce type de délits. Mais les athlètes candidats doivent s’engager sur l’honneur à ne pas avoir été impliqués dans une affaire de manipulation sportive. Et pour plagier une célèbre émission, c’est là qu’« on refait le match » !
Oui Karabatic et ses potes avaient bêtement parié pour s’offrir une semaine de vacances. En revanche, le joueur pourrait certifier sur l’honneur qu’il n’a jamais « manipulé » un match : pari ou pas pari, il avait donné le meilleur de lui-même. Compte-rendu du document de justice à l’appui, vous imaginez le débat qui en découlerait devant le CNOSF, à quelques jours de l’ouverture de Paris 2024…
Dans cette sombre histoire de pieds nickelés parieurs, il s’avère effectivement impossible d’affirmer que le match en question a été truqué. J’ai moi-même témoigné lors de ce procès (en tant que commentateur des compétitions concernées) et j’avais précisé que l’équipe de Karabatic, diminuée par les blessures, avait tout intérêt à gérer ce match et à laisser son modeste adversaire, Cesson Rennes, mener au score dans un premier temps. La stratégie dans ce genre de rencontres consiste à laisser passer l’orage pour éviter les blessures puis gagner le match sur l’expérience, en fin de rencontre. C’est exactement ce qu’il s’est passé, et Montpellier a remporté le match.
Sauf que la société qui organisait les paris, avait proposé une côte pour parier sur le score à la mi-temps. Pour cette société, une équipe leader du championnat (Montpellier) était forcément favorite à la mi-temps du match. Or, comme expliqué précédemment, les chances de voir le leader du championnat mener à la pause restaient faibles. Les spécialistes peuvent justifier aisément ce scénario.
Les potes des frères Karabatic (Luka est aujourd’hui le capitaine de l’équipe de France) tout surpris à la lecture de cette côte, s’étaient stupidement engouffrés dans la brèche. Ils transgressaient le règlement, misaient sur un avantage de leur adversaire à la pause, histoire de rajouter un peu d’argent dans la caisse commune. Ils ne truquaient pas le match, répétons-le, puisqu’ ils l’ont gagné !
12 ans plus tard, ce rapport de force mal appréhendé par la société de paris et ce jugement rendu par un magistrat peu au fait des complexités de ce type de matches, privent l’immense Nikola Karabatic du rôle de porte-drapeau. Je vous laisse bien sûr en débattre.
Toutefois, ne nous affolons pas. Rien ne dit que Nikola Karabatic, âgé de 40 ans, incorpore la liste réduite de 14 joueurs français sélectionnés pour la grande fête de Paris 2024. Dans cette équipe, les champions olympiques de Tokyo se bousculent au portillon pour incarner le rôle : Quentin Mahé, Ludovic Fabregas, Nedim Remili, Dika Mem collectionnent les titres internationaux.
Et puis, le handball français a gagné l’or à Tokyo chez les garçons et les chez filles : Estelle N’Zé Minko, Pauletta Faupa, la maman de la petite Olympe Cléopâtre Darleux, s’imposent comme des candidates idéales.
Alors n’y voyez pas de malhonnêteté de ma part, mais je parie pour une handballeuse championne olympique, du monde et d’Europe comme porte drapeau. C’est une côte bien taillée.
Frédéric Brindelle
Journaliste, chef de rubrique « Opinion Paris 2024 »