A l’occasion de la révélation des candidats au poste de porte-drapeau pour les Jeux Olympiques et Paralympiques, Frédéric Brindelle a rencontré pour Opinion Internationale Astrid Guyart, secrétaire générale du Comité national olympique et sportif français, escrimeuse médaillée olympique spécialisée dans le fleuret.
Astrid Guyart, ce rôle de porte-drapeau prend de plus en plus d’ampleur. Est-ce que vous allez briefer les athlètes dans ce contexte si particulier ? En France, politiquement, c’est assez tendu. Est-ce que vous allez rappeler certains principes aux candidats ?
Être porte-drapeau aux Jeux Olympiques est toujours un honneur. Mais quand on est à la maison, cela prend une saveur toute particulière. La force du mouvement sportif et du mouvement olympique dans cette séquence d’instabilité politique et de conflits aux quatre coins du monde, est de renforcer le message que nous portons : un message de paix, de fraternité, d’universalité, de solidarité.
Quand les athlètes concourent aux Jeux Olympiques, ils s’engagent à respecter la charte olympique et notamment la règle 40 (NDLR : ses principes régissent l’utilisation de l’image des Participants aux Jeux Olympiques et Paralympiques, à des fins publicitaires, pendant les périodes des Jeux Olympiques et Paralympiques. Les performances des athlètes doivent, entre autres, rester la priorité). Cette règle est le garant d’une unité de lieu et de temps pour les 206 nations qui vont devoir donner le meilleur d’elles-mêmes, représenter avec fierté leur pays, tout en respectant les valeurs olympiques. Les athlètes connaissent cette règle. Ils se sont engagés en signant le guide de l’athlète.
Vous incarnez le sport qui ramène le plus de médailles à la France, l’escrime. Il y a eu beaucoup de porte-drapeaux escrimeurs, est-ce que votre volonté aujourd’hui, c’est de permettre un maximum de disciplines d’avoir cet honneur ?
Évidemment le but est de donner une multiplicité de visages à ces ambassadeurs du sport français à travers leur rôle de porte-drapeau. D’où cette règle qui dit qu’en cas d’égalité, deux athlètes d’une même discipline ne peuvent pas être désignés porte-drapeau simultanément. S’applique alors la règle qui favorise le plus âgé parce qu’ayant le plus d’expérience. Ensuite, nous cherchons un autre sportif pour le deuxième genre pour que ce soit représentatif de l’ensemble des disciplines olympiques et paralympiques du sport français.
Sur le paralympique, il y a moins de candidatures, il y a moins de fédérations, il y a une question aussi d’agenda. Mais c’est aussi important que ces athlètes s’imposent un peu plus médiatiquement ? On aurait aimé, finalement, qu’il y ait plus de candidatures. Ce n’est pas un regret ?
Aujourd’hui, si on regarde les campagnes de communication autour de l’équipe de France unifiée, olympique et paralympique, la représentativité est égalitaire. C’est important.
Quant à être porte-drapeau, c’est une responsabilité, c’est un engagement. Tous les athlètes ne le souhaitent pas. Je connais de grands athlètes paralympiques auxquels j’ai été tentée de dire « mais vas-y ! ». Et en fait, non, parce qu’ils ne le souhaitent pas particulièrement. Ils préfèrent se concentrer sur leurs performances, ou sur une compétition qui commence le lendemain. Il y a beaucoup de critères avant de se lancer dans cette aventure. Bien sûr que c’est une chance, une exposition médiatique qui s’ouvre. Mais il y a aussi une contrepartie. Il faut mettre de l’énergie dans cette candidature.
De nouveau la France opte pour la mixité des porte-drapeaux. De plus en plus de disciplines mixtes apparaissent, comme en triathlon, en athlétisme. Ça sera l’une des valeurs fondamentales des sportifs français, cette mixité ?
C’est l’évolution majeure de cette 33e édition des Jeux olympiques et paralympiques qui se déroule en France. Il y aura la parité totale parmi tous les participants. C’est la première fois dans l’histoire des JO que cela arrive. C’était 2% en 1904, 4% en 1924, c’est 50-50 en 2024. Ce chiffre il faut véritablement le garder en tête et surtout se dire qu’on ne reviendra jamais en arrière.
De fait, c’est dommage qu’on n’ait pas de candidats handballeurs pour porter le drapeau. Ils sont champions olympiques en titre, avec les femmes et les hommes.
Il ne faut pas le voir comme ça. Je pense vraiment qu’il faut avoir envie de se porter candidat pour être porte-drapeau. Il faut que ce soit compatible à l’agenda sportif, avec son lieu de résidence… Suite à une discussion avec le DTN (Directeur Technique National), avec le coach, avec le sélectionneur, avec le manager, l’athlète peut se dire, je pense, qu’il est plus raisonnable qu’il reste avec le collectif et focalisé sur sa performance.
Propos recueillis par Frédéric Brindelle
Journaliste, chef de rubrique « Opinion Paris 2024 »