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11H06 - lundi 17 juin 2024

Les Français ont parlé. La Tribune d’André Bellon

 

NDLR : 

C’est un luxe, c’est un choix : le pluralisme des opinions et parfois (pas trop souvent tout de même) des choix partisans est aussi important que l’affirmation de valeurs-repères dans lesquelles nous croyons avec force.

C’est pourquoi Opinion Internationale est fière de publier des analyses qu’elle ne partage pas forcément (dans la limite évidemment de l’intolérable que l’on ne saurait tolérer) et qui donc n’engagent pas nécessairement la Rédaction.

A chacun de forger ses convictions…

Michel Taube

 

Le vote des Français dimanche 9 juin 2024 a été plus important que prévu. Même s’il s’agissait d’élire des députés européens, il est clair qu’il a plutôt porté sur les enjeux nationaux. On doit d’autant plus en admettre la signification que le taux d’abstention est nettement inférieur à celui des législatives de 2022.

La question de la légitimité du pouvoir, depuis longtemps étouffée par le discours sur le barrage à l’extrême droite, est aujourd’hui inévitable. 

Il ne suffit pas de se présenter en défenseur de la démocratie. Encore faut-il cesser de soutenir des institutions nationales qui permettent d’imposer des lois combattues par une large majorité des Français, de bafouer les citoyens comme par le traité de Lisbonne et même de mépriser le Parlement aujourd’hui. Encore faut-il cesser de soutenir une construction européenne qui impose des règles juridiques contraires à nos principes républicains, qui demande de voter pour un Parlement sans peuple. 

La France, patrie des droits de l’homme et du citoyen, porteuse de principes universels, sort de son histoire au nom d’une uniformisation mondiale, essentiellement fondée sur les nécessités du commerce mondial. Un Président censé la représenter représente surtout ces intérêts économiques. La confusion qu’il entretient systématiquement sur le sens de la souveraineté a surtout pour but la destruction de la souveraineté du peuple. 

C’est cela qu’il faut proclamer avant toute analyse des rapports de force entre les partis politiques que révèle le vote de ce 9 mai. Car le vote n’a pas porté et ne pouvait pas porter sur ces questions essentielles. Vouloir, comme lors de chaque élection, s’attacher avant tout à analyser le score du RN n’est, pour les responsables des principaux partis, qu’une méthode pitoyable pour masquer leur propre faillite. C’est aussi cet alibi perpétuellement renouvelé pour empêcher toute analyse sérieuse des institutions tant nationales qu’européennes. Or, ce sont bien ces institutions qui détruisent la souveraineté du peuple, pourtant fondement de la République et de la démocratie, qui entrainent notre pays dans ce désastre politique et moral. 

La dissolution de l’Assemblée nationale était inévitable puisque la légitimité du pouvoir n’existe plus. Les questions essentielles des institutions, du rapport à l’Europe et donc de la souveraineté populaire restent posées quelle que soit l’issue des élections législatives. 

Est-ce pour autant la fin d’un cycle en France ?
Depuis des décennies, un système politique national autant qu’européen détruit la démocratie, la volonté du peuple, réprime tous les mouvements populaires… au nom de la démocratie. Toute volonté non conforme est baptisée « populiste ». Ainsi, les « Républicains » dont le chef de file de l’époque, Nicolas Sarkozy, avait bafoué la volonté populaire exprimée le 29 mai 2005, s’inquiètent-il aujourd’hui des dérives contre la démocratie. 

Nous arrivons au tournant : les institutions peuvent permettre d’officialiser le caractère autoritaire du régime qui se déguisait hier encore en défenseur des libertés. Je me permets, face à cette contradiction historique, de vous renvoyer l’article que j’avais publié en 2014 dans le monde diplomatique intitulé « Bonapartisme ou Constituante ». Je précise que, contrairement à certaines tentatives de récupération de la « Constituante » par tel ou tel parti politique, celle-ci n’a pas de sens en dehors de la volonté générale.

André Bellon homme politique, écrivain et philosophe français 

 

BonapartismeouConstituante