Opinion
11H55 - mercredi 26 juin 2024

Emmanuel Macron : le déjà vu de 2017 peut-il encore fonctionner en 2024 ? La tribune de Sofiane Dahmani

 

À quelques jours des législatives de 2024, Emmanuel Macron a ravivé une rhétorique familière, déjà utilisée en 2017, en se présentant comme le rempart nécessaire face aux « extrêmes » politiques. Dans un podcast diffusé le 3 juillet sur (« Génération Do It Yourself »), le Président a mis en garde les Français contre ce qu’il considère être des dangers potentiels pour la société : les programmes du Rassemblement national (RN) et de La France insoumise (LFI), qu’il accuse de mener à la « guerre civile ». Mais cette stratégie de polarisation et de dramatisation peut-elle encore fonctionner en 2024 ? 


Le retour d’une stratégie bien connue
Il y a 7 ans, Macron avait réussi à convaincre une majorité d’électeurs que son mouvement centriste, La République En Marche, était la seule option viable face aux menaces que représentaient le RN de Marine Le Pen et les mouvements de gauche radicale. Cette tactique lui avait permis de s’imposer face à une classe politique traditionnelle désorientée, notamment en éclipsant les clivages traditionnels de droite et de gauche.

Cependant, la répétition de ce discours en 2024 suscite scepticisme et critiques. Certains analystes politiques et membres de l’opposition estiment que la menace d’une guerre civile est utilisée de manière opportuniste pour détourner l’attention des défis auxquels le gouvernement actuel est confronté.


Les réactions politiques
Les propos de Macron ont immédiatement déclenché une vague de réactions. Marine Le Pen a qualifié les déclarations de Macron de « manipulation grossière » visant à semer la peur parmi les électeurs, tandis que Jean-Luc Mélenchon a parlé de « discours alarmiste » déconnecté des réalités sociales.

Même au sein du camp présidentiel, certains ont exprimé des réserves. Des députés centristes ont rappelé la nécessité d’un débat plus serein et constructif, craignant que la surenchère verbale ne fasse qu’exacerber les tensions déjà palpables au sein de la société française.

 

 Fin de la macronie et retour des clivages ?
Les élections législatives du 7 juillet pourraient bien marquer un tournant. La fin de la « Macronie » semble de plus en plus plausible. Les électeurs, fatigués par les crises successives et les promesses non tenues, pourraient bien se tourner  vers de nouvelles alternatives.

Un retour des clivages droite-gauche est également envisagé. Depuis le début de son mandat, Macron a tenté de dépasser ces clivages, mais les récentes évolutions politiques suggèrent un retour des anciennes lignes de fracture. Les Républicains (LR) et le Parti Socialiste (PS), bien qu’affaiblis, tentent de se repositionner et de récupérer des électeurs déçus par le centrisme macronien.

 

Un climat politique tendu
Le contexte politique actuel est marqué par une montée des tensions sociales et une polarisation accrue. La crise des gilets jaunes, les manifestations contre la réforme des retraites, et plus récemment, les émeutes urbaines ont révélé une société française fracturée et en quête de nouvelles réponses.

Dans ce climat, la dramatisation du scrutin par Macron pourrait avoir des effets imprévisibles. Certains électeurs pourraient se rallier à lui par peur des « extrêmes », tandis que d’autres pourraient rejeter cette stratégie, la percevant comme une manœuvre politique désespérée. 


La stratégie d’Emmanuel Macron, consistant à se positionner comme le seul rempart contre les extrêmes, a fonctionné en 2017, mais son efficacité en 2024 est incertaine. Face à des critiques croissantes et à un paysage politique en mutation, le Président joue une partie risquée. Le 7 juillet sera un test crucial pour son avenir politique et pourrait bien marquer la fin de l’ère Macron, ouvrant la voie à un retour des clivages traditionnels ou à une recomposition politique majeure.
La France, divisée et en quête de stabilité, observe avec une attention accrue les développements de cette campagne électorale.

 

En 2017, on y avait cru ; en 2022, on avait voulu y croire ; en 2024, on ne peut plus y croire.

 

Sofiane Dahmani,
Étudiant, chroniqueur à Opinion Internationale