Pékin est en plein brouillard ! L’Asie inquiète les entrepreneurs français. Et elle les attire moins. Telles sont quelques-unes des conclusions du baromètre annuel de l’export réalisé par OpinionWay pour Capital Export. On y apprend notamment que 52% des dirigeants de PME ne souhaitent pas se développer en Asie (une hausse de 9 points en un an !). En outre, seuls 4% d’entre eux disent envisager de se développer en Chine.
Cette frilosité n’a rien de surprenant. La Chine a changé profondément et rapidement. L’économie n’y est plus la priorité des priorités : après avoir cherché à rebâtir des nouvelles routes de la Soie, « l’Empereur Xi » met désormais au même niveau que la croissance, la sécurité, une surveillance et un contrôle rapprochés des individus, et bien sûr, l’armement. Les déterminants de la Chine sont désormais principalement politiques.
En termes macro-économique cela se traduit par une croissance de 5,2% du PIB en 2023, la plus basse depuis 1990. Elle serait même plutôt proche des 3-4% selon certains experts. Le pays peine clairement à se remettre d’une politique « Zéro-Covid » très longue et très dure, marquée par la fermeture brutale de plusieurs villes et l’absence de plan de soutien aux entreprises, contrairement à ce qui s’est produit pour les économies occidentales.
Parmi les facteurs aggravant du ralentissement économique, la chute de près de 30% des prix dans l’immobilier, un secteur qui représente le quart de la croissance du PIB et constitue 70% du patrimoine des ménages. Cet effondrement, conjugué à celui de la bourse a ruiné de nombreux chinois.
Résultat, la consommation, qui représente un tiers du PIB, reste très en-deçà de celle de l’UE à 27% (50%), de la France (55%) et surtout des Etats-Unis (70%). C’est l’échec principal de la Chine : la consommation n’a jamais pris le relais de l’investissement. S’ajoute enfin le dernier pilier, les exportations, de plus en plus contraintes par les mesures protectionnistes, principalement aux Etats-Unis, mais qui poignent en Europe. Et nous pourrions ajouter la natalité (divisée quasiment par deux en 15 ans), le chômage des jeunes (le pays ne peut plus fournir sur le long terme des emplois à 12 millions de diplômés par an …), mais aussi la bombe à retardement du vieillissement, de la couverture sociale et médicale qui sont quasiment inexistantes …
Ce brouillard nous masque les immenses gisements commerciaux de la Chine. Difficile de négliger le 2èmemarché du monde : le quart du PIB mondial, 60% des capacités industrielles mondiales, 50% des chaînes de valeur critiques des entreprises américaines qui ne sont pas substituables et dépendent de la Chine. Difficile d’y percer. La préférence nationale se renforce et l’industrie chinoise monte en gamme rapidement.
Dans ce contexte, les entreprises proposant des produits à faible valeur ajoutée, peu différenciés, auront de réelles difficultés. Seules celles ayant des offres et des savoir-faire distinctifs peuvent réussir. C’est le cas de plusieurs entreprises que nous accompagnons qui prospèrent en Chine, ou envisagent de s’y implanter commercialement dans la santé, la métrologie, les capteurs, les équipements industriels de pointe …
Si les difficultés et les défis multiples auxquels fait face la Chine sont largement médiatisés chez nous, la Chine reste un immense marché, et représente des gisements de développement significatifs pour des produits distinctifs. Une transition qui ne change rien pour les entreprises disposant d’offres innovantes et techniques, à l’instar de HPS, dans le domaine des vérins de haute technicité, qui s’est implantée d’abord commercialement, puis a créé une usine à Shenzhen, de CÉLEC dans le domaine des détecteurs optiques, qui a suivi le même chemin en créant une usine à Ningbo, toutes deux pour servir efficacement la zone asiatique, ou encore de FOGALE (capteurs capacitifs) ou VERDOT (solution de chromatologie basse pression) qui sont présentes depuis plusieurs années par le biais de distributeurs spécialisés qui diffusent leurs solutions.
Autant de PME françaises qui ouvrent la voie et continuent à nous rappeler combien l’export, tout simplement, reste une route de croissance incontournable.