Dans quelques heures ou quelques jours, le Grand Maître des Horloges de l’Elysée nommera un nouveau Premier Ministre.
Trois compétiteurs ont distancé depuis le début de l’été le reste du peloton dans ce steeple chase politique inhabituel : par ordre alphabétique, Xavier Bertrand, Bernard Cazeneuve et Didier Migaud. Des profils très différents. Selon le choix Jupitérien, le coup d’après ne pourra être le même, et la suite politique de la fin du mandat sera très différente.
Parmi les trois, Bernard Cazeneuve semble avoir le moins de chances de son côté. Habile, tout en rondeur et en nuances, Il est cependant loin de faire l’unanimité dans le camp socialiste comme au centre gauche. Il est très respecté au centre droit et à droite pour son sérieux budgétaire, sa politique sécuritaire ferme lors des attentats de 2015 et pour son approche sans concession de la Laïcité. Mais cela ne suffit pas.
Didier Migaud a l’avantage d’être un excellent technicien qui connaît parfaitement les rouages et les pièges du marécage politique. La Droite garde un bon souvenir de son passage à la Commission des Finances de l’Assemblée, et il a conservé l’amitié et l’appui des réseaux de la Gauche Républicaine. Migaud à Matignon, ce serait un ou deux ans de gestion technique de l’Etat, une gestion des affaires courantes en attendant la prochaine présidentielle. Didier Migaud tentera de faire passer la loi de Finance 2025 et celle sur le financement de la Sécurité Sociale.
Il y a peu de chances que le Budget soit voté. Mais les dégâts seront minimes. Il n’y aura pas de « shutdown » à la française. La Quatrième République prévoyait une exécution budgétaire au mois le mois tant que le Budget n’était pas voté, avec le système du « douzième provisoire ».
La Constitution de la Cinquième République est tout autre. Tant qu’aucun budget n’est voté, après le 31 décembre 2024, le Gouvernement pourra demander au Parlement l’autorisation de percevoir les impôts et d’allouer les crédits permettant aux services de l’Etat de fonctionner, cela selon l’enveloppe de crédits votés dans le budget précédant et en fonction de ce qui est indispensable au bon fonctionnement des services publics.
Autrement dit, si l’Assemblée actuelle ne vote pas le Budget, l’Etat percevra bien les impôts, ses recettes, augmentées de l’inflation et de la croissance économique, car qui refusera à l’Etat de percevoir ce qui permet de payer les fonctionnaires, et, en même temps, ne pourra que dépenser moins, car l’Etat ne pourra dépenser plus que ce qui a déjà été voté. La rigueur budgétaire par construction !
Dans le même temps, la loi de financement de la Sécurité Sociale pourrait passer plus facilement encore, si le Budget n’est pas voté, car qui assumerait sinon de ne pas augmenter les retraites ou bloquer les remboursements des soins et médicaments ? Celui qui bloquerait alors le vote de la Sécurité Sociale serait immanquablement hors-jeu pour les prochaines élections.
Didier Migaud premier ministre permettrait d’avoir un ou deux ans sans grandes émotions politiques, sans grand risque, un ou deux ans pour alors restructurer la vie politique française, refonder des offres républicaines claires, modernisées et préparer une alternative crédible aux deux extrêmes. Pourquoi pas ! Il faudra néanmoins traiter la menace russe, le renforcement de nos armées, moderniser l’école, l’hôpital, la justice, les prisons, restaurer la Laïcité, instiller du Vouloir Vivre ensemble pour rebâtir notre Vivre Ensemble et faire de nouveau Nation. Des sujets brûlants qui ne sont pas, ou pas que budgétaires.
Mais Emmanuel Macron peut aussi faire un choix politique et nommer, enfin, Xavier Bertrand. Il aurait déjà dû le nommer en 2017, puis en 2022, et nous n’en serions alors pas là !
Xavier Bertrand Premier Ministre, ce n’est pas opter pour une gestion des affaires courantes mais au contraire traiter politiquement, et non seulement budgétairement, les défis qui se dressent devant nous.
C’est ne pas se laisser deux ans pour reconstruire une offre, car l’offre existe déjà, en fait, c’est ne pas attendre, ne pas procrastiner, ne pas remettre à plus tard, et dès demain traiter les vrais sujets : le pouvoir d’achat, la sécurité, l’immigration, sans oublier de mettre en place une véritable politique du logement et de la construction, l’angle mort de Macron depuis 2017 voire 2015, une non-politique qui coûte des dizaines de milliers d’emplois, un manque à gagner pour l’Etat, de la croissance économique et de la production de richesse nationale !
Sur le Logement il est grand temps de remettre au diapason toutes les politiques concernant l’Aménagement du Territoire, les Transports, les Equipements avec les besoins en logements. Il nous faudrait dès demain un MELATT, un grand Ministère de l’Equipement, du Logement, de l’Aménagement du Territoire et des Transports pour penser, créer et gérer, avec harmonie, intelligence et sagesse, la France d’aujourd’hui, de demain et d’après-demain.
Les Jeux Olympiques ont démontré qu’en matière de sécurité, si l’on veut on peut ! Pas besoin de grandes lois, « less is more », mais un impératif : de la Volonté. Et Xavier Bertrand a toujours incarné cette Volonté ! Le retour des Valeurs Radicalement Républicaines avec un esprit social, tourné vers les classes moyennes, les grands perdants de la dernière décennie. Un solidarisme du XXIème siècle, un nouveau contrat social en somme !
Nommer Xavier Bertrand dès demain, c’est montrer aux Français qu’on peut encore changer la vie par la Politique !
Bien sûr, dès Xavier Bertrand à Matignon, tous les jaloux et tous les candidats potentiels pour 2027 n’auront qu’une hâte, lui savonner la planche et l’empêcher de réussir. Mais ils prendront alors un risque fort, celui d’avoir empêché la France de réussir.
Pour Xavier Bertrand, le choix le moins risqué est certainement de laisser Migaud gouverner et s’occuper du budget, tout en préparant 2027, tout en construisant une nouvelle offre politique républicaine, à l’abri des pièges des amis comme des ennemis.
Mais si Emmanuel Macron choisit Xavier Bertrand, et si ce dernier accepte ce défi, gigantesque, avec les risques forts évoqués, il endossera alors l’habit d’Homme d’Etat, si rarement porté, il deviendra un nouveau Mendes France, un Premier Ministre de Courage et de Vérité, et, peut-être, un Mendes France qui réussit et qui gagne ensuite les élections !
Espérons…