Edito
10H05 - mercredi 18 septembre 2024

Face à un État centralisateur, la riposte des communes et de l’AMF ? Heureusement ! L’édito de Michel Taube et Sofiane Dahmani

 

David Lisnard sera-t-il ministre dans le gouvernement Michel Barnier ? Telle n’est pas la question du jour, même si les deux hommes viennent de se rencontrer. Non, l’heure est à la rentrée de l’Association des Maires de France dont les dirigeants tenaient conférence de presse pour relayer les doléances et les enjeux des 34 000 édiles qui gèrent les territoires de France.

A moins de deux ans des élections municipales, – et alors que le nombre de maires qui renoncent à se représenter a cru de façon exponentielle -, l’AMF a peu de raisons d’espérer en cette période d’instabilité et, au mieux, de transition à la tête de l’exécutif, en attendant une autre échéance politique… 2027.

Cette rentrée 2024 marque-t-elle un tournant pour les communes de France ? Sous l’ère Macron encore plus qu’avec ses prédécesseurs, et derrière les discours officiels de l’Etat sur la décentralisation, la réalité est tout autre. L’État, méfiant, centralisateur, étouffe peu à peu les collectivités locales sous un déluge de règlements, de réformes et de coupes budgétaires.

Le manque de confiance de l’Etat à l’égard des élus locaux et l’hyper complexification des codes et des normes, tels sont les principaux griefs que David Lisnard a déroulés pour expliquer ce sentiment insupportable pour des femmes et des hommes de solutions d’être comme menottés par un système français étouffant.

« Suppression de la taxe d’habitation et de la CVAE : ne cherchez pas plus loin la cause des 36 milliards d’euros qui manquent ! », a expliqué le grand argentier des communes, André Laignel, vice-président presque éternel de l’AMF et maire d’Issoudun.

La confiance, déjà fragile, entre l’État et les élus locaux est aujourd’hui gravement érodée. Les maires, pourtant piliers de la démocratie locale, se retrouvent, année après année, confrontés à un pouvoir qui cherche à les reléguer au simple rang d’exécutants.

L’ère Macron a accentué cette pente malsaine : toujours selon André Laignel, « la loi de finances 2024 a été la pire pour les collectivités depuis trente ans. »

 

« Le centralisme démocratique est mort, vive le centralisme ! » Telle est un peu la doctrine folle dictée par Paris.

Mais soyons clairs : cette centralisation forcenée est contre-productive. Ce sont les communes, au quotidien, qui assurent les services publics de proximité. Ce sont elles qui, avec des budgets restreints et des moyens de plus en plus réduits, innovent, résolvent les problèmes, adaptent les solutions aux réalités locales. Et c’est précisément cette flexibilité, cette capacité d’adaptation qui est menacée par l’attitude du gouvernement. Une attitude qui ignore les besoins réels des territoires et cherche à uniformiser, à encadrer, à contrôler.

Pour David Lisnard, les communes ne sont pas, et de loin, les principales responsables des déficits publics. Tout d’abord parce que les collectivités locales s’endettent pour financer des investissements et non des frais de fonctionnement. Ensuite parce que leur dette relative par rapport au PIB est passée de 9 à 8% en trente ans, selon le président de l’AMF.

Dans une France marquée par les fractures sociales et territoriales, où la défiance vis-à-vis des institutions est à son paroxysme, l’État a bien tort de resserrer les boulons. Plutôt que de valoriser les élus locaux, ceux qui sont sur le terrain, qui connaissent leurs concitoyens, leurs besoins, leurs attentes, l’administration centrale préfère leur imposer ses vues depuis les ministères.

 

La campagne « Les communes… Heureusement ! » : un cri du cœur

Pour les maires, « trop, c’est trop ! »

Face à cette situation d’étouffement, l’AMF lance une grande campagne nationale intitulée « Les communes… Heureusement ! ». Ce slogan, qui sera le cri de ralliement du prochain Congrès des Maires de France du 18 au 20 novembre prochains, est bien plus qu’une simple formule. C’est un cri du cœur, un rappel que les communes sont, chaque jour, les piliers de la République.

Heureusement qu’elles sont là pour pallier les défaillances de l’État, pour maintenir le lien social, pour gérer les services publics.

Heureusement qu’elles sont là pour créer des solutions locales adaptées aux réalités du terrain.

Heureusement que les communes étaient là pour gérer la crise sanitaire, distribuer les masques, organiser la logistique des vaccinations, maintenir les écoles ouvertes, montrant qu’elles sont la clé de voûte de notre système démocratique et sociétal.

Les communes ne peuvent plus être réduites au rôle de simples exécutants d’un État centralisateur. Elles sont le cœur battant de la démocratie. Ce n’est pas en les méprisant ou en les étouffant que l’on résoudra les crises sociales ou les fractures territoriales. Bien au contraire.

Pire, les communes servent de plus en plus à pallier les défaillances de l’Etat. Le meilleur exemple, on le trouve dans les enjeux de sécurité publique : les polices municipales coûtent 2 milliards d’euros aux collectivités. Mais leur a-t-on donné les moyens de financer cette nouvelle mission ?

Et David Lisnard de conclure : « Les communes sont une chance pour la France » : heureusement que les 480 000 élus locaux de France sont là pour servir de relai entre les citoyens et les pouvoirs publics. Un maillon affaibli mais déterminé à sauver une République épuisée.

Liberté et responsabilité contre défiance et autorisations : telle est la doctrine de l’AMF qui en appelle à « la concrétisation d’une réelle décentralisation ». Tout un programme, peut-être plus consensuel que d’autres enjeux, pour un premier ministre en quête de projets pour gouverner utilement ?

 

Michel Taube et Sofiane Dahmani

 

Directeur de la publication

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