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15H42 - dimanche 22 septembre 2024

Pourquoi changer une équipe et une politique qui perdent ? Tribune de Jean Marc Governatori

 

Tout cela pour cela ! Avec le gouvernement Barnier issu de seize jours d’arrangements politiciens, les Français avaient donné une opportunité extraordinaire à Emmanuel Macron et à son nouveau premier ministre de bâtir une nouvelle société.

Mais ces deux dirigeants politiques ont choisi de passer d’un gouvernement macroniste et de droite à un gouvernement de droite et macroniste.

Et quid des causes profondes de tant de désastres répétés et annoncés : malgré les problèmes démographiques, environnementaux, financiers, politiques, sanitaires, sociaux de plus en plus graves, malgré 1000 faits de violences par jour dans notre pays, malgré les ravages de l’alcool et de la drogue dans notre France dites civilisée, malgré les souffrances infligées à une partie de nos anciens et de nos enfants, malgré la gravité de la situation mondiale, malgré l’impact de quelques individus sur des milliards de personnes, tous les commentateurs se concentrent sur les noms des ministres, leur parti, la dette, la sécurité, sur les crises qui transpercent notre société.

Les réponses à ces vrais problèmes risquent fort d’être archi usitées. La gauche et le RN auraient fait de même. Et à noter que les orateurs politiques quotidiens marchent sur près de la moitié des votants (les LFI et les RN, partis pour lesquels je n’ai jamais votés) lorsqu’ils clament vouloir les associer à rien et cela ne choque pas les démocrates.

 

Les symboles de notre fiasco

Nous sommes le pays le plus socialiste du monde avec simultanément pléthore de mécontents et de pauvres (15% de la population essaie de survivre sous le seuil de pauvreté) : sur les critères du % du P.I.B (33% de dépenses sociales) et en valeur absolue (800 milliards), Cuba et les pays scandinaves sont loin derrière nous ! Et par conséquent, nous sommes champions des prélèvements obligatoires et des déficits, mais aussi champions des grèves et de la consommation d’alcool et médicaments pour essayer de dépasser un mal être conscient ou inconscient. Observez un bout de pain : le blé est taxé, le champ est taxé, le paysan est taxé, le camion de transports est taxé, l’essence est taxée, le chauffeur est taxé, la route est taxée, le boulanger est taxé, les locaux sont taxés… La puissance publique paie 17 millions de retraités, 6 millions de fonctionnaires, 3 millions de chômeurs sont indemnisés, 2 millions de personnes sont au RSA, 12 millions sont en « affection longue durée », la carte vitale fait fureur, 40 milliards d’euros consacrés à l’aide au logement… Notre pays doit emprunter 750 millions chaque jour pour assumer… Le social c’est très bien, mais faire savoir tout ce que notre pays fait et subit, responsabiliser, c’est indispensable.

 

La solution

C’est évidemment le logiciel sociétal qui est à changer : passer de la compétition à outrance, l’hyper consommation, l’individualisme, l’obsession technologique et de l’irresponsabilité, à la coopération, la responsabilité et la simplicité. Changer notre rapport à l’Autre, à l’animal, à la nature, au sacré, au temps, à l’invisible, donner un vrai sens à nos vies en passant de la culture du mépris à la culture du respect et du durable. Le pouvoir politique avait à donner cette impulsion et ce nouveau regard. Le sujet n’est plus la droite ou la gauche, mais la sortie du conventionnel et des actions suicidaires répétées. On sait que la qualité de notre système immunitaire est capitale pour notre santé, on sait moins qu’une organisation humaine a aussi besoin de son système immunitaire collectif : il est mis à mal par l’ignorance, l’individualisme, l’irresponsabilité, le manque de respect et les défauts de coopération. Or, des outils existent pour développer ce système immunitaire : une éducation fondée sur de la bienveillance et la fixation de limites, sur le savoir être, les classes vertes , l’économie circulaire, les entreprises coopératives, les petites exploitations agricoles, les circuits courts, les composteurs collectifs, les potagers communautaires, les poulaillers urbains, les habitats groupés, les systèmes d’échanges locaux où on prend l’habitude d’échanger son temps, ses biens et ses compétences, le covoiturage… Bref, la puissance publique et les citoyens ont leur part à faire pour un avenir et un présent enfin sereins.

 

Notre faim

Ce gouvernement volontaire, mais ordinaire, ne changera rien, même si la présence de ministres centristes est une bonne chose. Alors que nous sommes parvenus à créer une situation où une panne d ‘internet interdit à tous de communiquer, à un pillage en règle des dernières matières premières, à saboter air, biodiversité, eau et terres, à produire des hôpitaux et des prisons qui suffoquent sur fond d’impasse financière ; on projette des EPR qui vont coûter une fortune alors qu’on maîtrise mal cette technologie nucléaire et qu’elle sera obsolète lorsqu’ils seront opérationnels ! On veut ignorer l’éducation à la santé et la réduction des pollutions, alors que la maladie est de loin la première dépense publique autant que la première source de tant de souffrances émotionnelles évitables.

Les citoyens avaient faim de neuf et on repart avec les mêmes politiques et nos « élites » restent muettes. Mais ce qui a été peut-être le plus incroyable dans cette séquence politique est qu’on n’a entendu que les vieilles recettes de droite et de gauche qui ont produit tant de plats empoisonnés.

Dramatique.

Quand déciderons-nous de quitter le mythe de Sisyphe (ce rocher qu’on remonte sans cesse), le tonneau des Danaïdes (on veut le remplir alors qu’il n’a pas de fond) et la caverne de Platon (nous restons dans le terrier où nous souffrons et limitons l’avenir), sans vouloir aller voir ce qui se passe à l’air libre ?

 

Jean Marc Governatori

Élu écologiste niçois Coprésident Écologie au centre