Réunis à Ottawa le 26 septembre 2024, Emmanuel Macron, Président de la République française et Justin Trudeau, premier ministre du Canada, ont annoncé leur intention de favoriser le développement d’un partenariat sur l’océan.
La France et le Canada sont des nations océaniques. Dotés de multiples littoraux, de vastes zones économiques exclusives et deriches communautés économiques et scientifiques qui ont développé une connaissance intime approfondie de l’océan, nos pays sont conscients des pressions croissantes et des dommages causés à l’océan dans le monde entier, notamment en raison des changements climatiques, de la pollution par le plastique et de la surexploitation des ressources marines.
Nous renforcerons notre coopération pour faire en sorte que l’océan, qui est un bien commun de l’humanité, continue de jouer unrôle crucial : il régule l’équilibre environnemental, y compris le climat, fournit des ressources alimentaires et énergétiquesessentielles, facilite les échanges économiques et sert de lien vital entre les pays et les communautés humaines. En tant que partenaires dans de nombreuses enceintes internationales, nous sommes déterminés à travailler ensemble pour continuer à être enpointe de la dynamique mondiale en ce qui concerne l’océan, y compris dans le cadre du G7, du G20 et d’autres enceintes multilatérales, et plus particulièrement dans le cadre de la Décennie des Nations Unies pour les sciences océaniques au service du développement durable (2021 à 2030) et de la troisième Conférence des Nations Unies sur l’Océan qui se tiendra à Nice en juin 2025.
Améliorer les connaissances sur l’océan
La France et le Canada reconnaissent l’importance de renforcer leur compréhension conjointe au sujet de l’océan et de continuer de l’améliorer, grâce à une solide collaboration scientifique et en matière de recherche, afin d’appuyer l’objectif commun d’avoir un océan sain et géré de manière durable.
Nous notons qu’à ce jour, la communauté mondiale n’a pas atteint les cibles et les objectifs fixés dans divers accords, traités et cadres internationaux. Pour assurer la réussite future des interventions face à l’aggravation de la crise de l’océan, les décideurs ont besoin à la fois de volonté politique et des meilleures connaissances qui soient pour orienter les décisions.
Pour relever ce défi, nous nous efforcerons de renforcer la base de connaissances aux fins de la prise de décisions, notamment au moyen de contributions aux processus existants, comme la deuxième Évaluation mondiale de l’océan, et nous examinerons la création d’un nouveau groupe international d’experts sur la durabilité de l’océan en tant qu’entité neutre et indépendante sous l’égide des Nations Unies pour combler toute lacune en matière de connaissances ou de politiques, et la transformation de Mercator Ocean, répertoire complet d’observations océaniques, en organisation intergouvernementale.
Nous poursuivrons nos échanges scientifiques pour améliorer la connaissance de l’océan, où l’étude et la compréhension de sonincidence sur le climat et la biodiversité restent largement incomplets. À cette fin, nous nous appuierons sur le groupe de travail franco-canadien sur l’océan, créé dans le cadre du Comité mixte Canada-France pour la science, la technologie et l’innovation lancé en 2023, sous la responsabilité du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada et du Centre national de la recherche scientifique français, qui recommande, entre autres, le partage d’infrastructures de recherche et la mise en commun de données scientifiques issues de campagnes de mesures.
L’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (IFREMER) et le ministère des Pêches et des Océans du Canada continueront à faire progresser leur coopération dans le domaine de la science océanique. Nous approfondirons également les initiatives de coopération existantes, comme le partenariat entre l’IFREMER et l’Université Laval et le partenariat entre l’Ocean Frontier Institute de l’Université Dalhousie et l’Interdisciplinary graduate school for the blue planet (ISBlue). Nous tirerons profit des travaux de l’Institut France-Québec pour la coopération scientifique en appui au secteur maritime, créé en 2016comme un organe essentiel à l’échange de connaissances et d’expertise sur l’océan entre scientifiques francophones.
Protéger l’océan
Afin d’atteindre l’Objectif de développement durable (ODD) des Nations Unies no 14, la France et le Canada réaffirment leur engagement de promouvoir un océan propre et sain tout en développant une économie océanique durable, et sont déterminés à protéger l’océan contre les effets des changements climatiques, de l’acidification de l’océan, de la pollution marine (notamment par les plastiques) et de la surexploitation des ressources marines, ainsi qu’à préserver les avantages environnementaux, climatiques, alimentaires, énergétiques et économiques procurés par l’océan.
Nous sommes déterminés à protéger l’océan en étendant les aires marines protégées (AMP), conformément à l’objectif du Cadre mondial de la biodiversité de Kunming-MontréaI, qui consiste à protéger les terres et 30 % de l’océan d’ici 2030. À cet égard, le Canada et la France continueront de soutenir les activités de la Coalition de la haute ambition pour la nature et les peuples en leurfournissant un soutien financier et une expertise. Nous reconnaissons que la réalisation de cet objectif mondial nécessitera unecollaboration efficace et devra reposer sur des normes qualitatives solides, comme celles qui sont élaborées au Canada et enFrance. Étant donné que la France a déjà atteint son objectif national, avec 33 % de ses eaux territoriales couvertes par au moins une AMP, et que le Canada collabore étroitement avec ses partenaires pour protéger 30 % de ses océans d’ici 2030, avec plus de 15 % de ses océans officiellement protégés, ensemble, les deux pays ont protégé plus de 4,3 millions de km2 de l’océan.
En nous appuyant sur le partenariat existant entre Parcs Canada et l’Office français de la biodiversité, nous approfondirons notre coopération en échangeant nos expériences respectives en ce qui concerne l’extension de notre réseau et la gestion efficace denos AMP, notamment pour atteindre l’objectif de 10% de zones fortement protégées.
Nous reconnaissons la nécessité de préserver la santé et l’intégrité de l’océan, notamment de la haute mer et des fonds marins,qui représentent plus de 60 % de la surface de l’océan et près de la moitié de la surface du globe. Nous avons joué un rôle crucial dans l’adoption du Traité sur la haute mer en 2023. Ayant déjà signé le traité, nos deux pays soutiennent son entrée en vigueur, qui nécessite la ratification d’au moins 60 États, d’ici juin 2025 (lors de la troisième Conférence des Nations Unies sur l’Océan). Nous poursuivrons notre coopération sur la mise en œuvre concrète des mesures du Traité, en soutenant l’adoption du développement d’AMP à grande échelle en haute mer, les évaluations d’impact environnemental des activités humaines au-delàdes juridictions nationales, un système d’accès équitable aux ressources génétiques marines ou le transfert de technologies marines aux pays en développement.
La France et le Canada continueront de prendre des mesures importantes pour lutter contre la pollution par les plastiques, notamment en milieu marin. Nous sommes déterminés à prendre des mesures ambitieuses à cet égard tout au long du cycle de viedes matières plastiques, afin de réduire la production et la consommation mondiales de polymères plastiques sous forme primaire, et nous appelons la communauté mondiale à faire de même. Nous soutenons la conclusion d’un accord international ambitieux et juridiquement contraignant pour mettre fin à la pollution par les plastiques et sommes fiers d’avoir accueilli des séances de négociations cruciales, notamment la deuxième à Paris en mai 2023 et la quatrième à Ottawa en avril 2024. En tant que membres fondateurs de la Charte sur les plastiques dans les océans, ainsi que de la nouvelle Alliance des pays hôtes, nous continuerons de promouvoir l’élan politique pour soutenir les efforts visant à conclure cet accord d’ici la fin de 2024. Nous continuerons d’aller de l’avant, notamment dans le cadre du G7, du G20 et d’autres enceintes multilatérales comme la troisièmeConférence des Nations Unies sur l’Océan qui aura lieu à Nice en juin 2025.
Étant donné que l’industrie de la pêche exerce une pression considérable sur les stocks de poissons ciblés et, plus largement, sur les écosystèmes marins connexes, la gestion durable des pêches de capture, fondée sur les meilleures données scientifiques disponibles, le principe de précaution et l’approche écosystémique, est au cœur de nos efforts individuels et collectifs pour protéger l’océan. Le Canada et la France s’engagent à poursuivre leur longue tradition de collaboration à cette fin, en ce qui concerne les ressources marines vivantes près de Terre-Neuve et Saint-Pierre et Miquelon, ainsi que, plus généralement, les stocks de poissons gérés par des organisations régionales de gestion des pêches.
La lutte contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN) est une priorité commune du Canada et de la France, carcette pratique constitue une importante menace pour les écosystèmes marins et la santé des stocks de poissons. Nouspoursuivrons notre coopération dans ce domaine pour échanger des informations, des pratiques exemplaires, de l’expertise et destechnologies, notamment satellitaires, afin de lutter contre ces pratiques dans nos eaux territoriales et de soutenir d’autres partenaires qui en font la demande.
Nous appuierons conjointement l’Alliance d’action contre la pêche INN, lancée par le Canada lors de la deuxième Conférences des Nations Unies sur l’Océan, et nous nous mobiliserons pour renforcer les cadres existants (Accord relatif aux mesures du ressort de l’État du port; organisations régionales de gestion des pêches), notamment en appliquant les règlements en vigueur. En outre, conscients de la nécessité de lutter à l’échelle mondiale contre les subventions nuisibles qui soutiennent la pêche INNet contribuent à d’autres pratiques de pêche non durables, nous encouragerons la ratification et la mise en œuvre de l’Accord sur les subventions à la pêche (2022) de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Nous poursuivrons également notre collaboration constructive au sein de l’OMC en vue de réaliser pleinement l’ODD 14.6.
Nous nous efforcerons de lutter contre les engins de pêche fantômes perdus ou abandonnés, qui nuisent considérablement à ladisponibilité de la ressource, piègent les animaux marins et polluent l’océan et les côtes.
Innover en faveur d’un océan sain
La France et le Canada bénéficient de riches écosystèmes de recherche et d’innovation dans le domaine des technologies marines, ce qui devrait les aider à atteindre leurs objectifs communs de protection de l’océan et de développement d’une économie bleue.
Nous souhaitons renforcer les synergies entre nos deux écosystèmes pour favoriser les échanges et l’innovation. À cette fin, laFrance mettra en place un expert technique international à Halifax, hébergé par l’Ocean Frontier Institute de l’Université Dalhousie, qui mettra son expertise à disposition pour établir des liens durables entre le Canada et la France en matière de recherche océanique, d’innovation dans les technologies marines, d’économie bleue et de soutien aux initiatives diplomatiques liées à l’océan.
Dans un monde touché par les changements climatiques, le secteur maritime offre des solutions pour lutter contrel’augmentation des émissions de gaz à effet de serre, notamment grâce à la décarbonisation du transport maritime. Pour ce faire, nous sommes déterminés à travailler ensemble pour accélérer la décarbonisation du transport maritime, conformément à la Stratégie de l’OMI sur la réduction des émissions de GES provenant des navires (2023), notamment par la conclusion d’unpartenariat bilatéral pour la coopération en matière de transports. Le Comité mixte Canada-France pour la science, la technologie et l’innovation a créé un groupe de travail sur la transition énergétique, dont les résultats pourraient contribuer à trouver des solutions.
La France et le Canada sont fermement résolus à développer les énergies marines renouvelables, qui offrent des possibilités prometteuses. Dans le cadre de son programme énergétique pluriannuel, la France s’est fixé l’objectif de mettre en service 50 parcs éoliens d’ici 2050, soit une puissance installée de 40 GW, dont plusieurs ont déjà été inaugurés grâce à la participation de sociétés d’énergie et d’investisseurs canadiens. De son côté, le Canada a précisé le cadre réglementaire applicable en 2023 et travaille au développement de parcs éoliens marins. Nous continuerons également à coopérer dans le domaine du développement des turbines marémotrices, en échangeant des informations sur nos projets respectifs, comme le projet pilote d’usine marémotrice au Raz Blanchard en France et les essais de turbines marémotrices dans la baie de Fundy en Nouvelle-Écosse.
Nous continuerons de renforcer notre partenariat en matière d’innovation en technologies marines, notamment grâce aux initiatives d’In2novation, la plateforme franco-canadienne dont l’appel à projets sur les technologies marines (« OceanTech »)soutiendra quatre entreprises canadiennes et françaises et leur collaboration avec des centres de recherche. Nous travaillerons à la construction d’une véritable communauté franco-canadienne innovante dans le domaine des technologies marines et chercherons à la promouvoir à l’occasion de l’UNOC de 2025 à Nice.