À Châteaubriant, en Bretagne, les Allemands fusillent 27 détenus (dont le plus jeune d’entre eux, Guy Môquet) en riposte à l’assassinat du commandant allemand de Nantes, le Feldkommandant Fritz Holtz.
Lycéen parisien, Guy Môquet avait été arrêté à la gare de l’Est où il distribuait des tracts.
En août 2007, le président de la République nouvellement élu, Nicolas Sarkozy, avait rendu obligatoire la lecture de la lettre bouleversante du jeune lycéen à ses parents, suscitant la polémique. De nombreux enseignants avaient en effet refusé de se plier à une prescription du chef de l’État, accusant le pouvoir politique de « récupération ». La gauche, de son côté, avait dénoncé l’occultation de l’engagement communiste du jeune résistant. En 2009, cette obligation fut abandonnée en catimini par l’Éducation nationale.
Dans une France en quête de symboles vivants, faudrait-il en rétablir la lecture ?
En attendant, voici le texte intégral de la lettre de Guy Môquet…
Michel Taube
Châteaubriant, Camp de Choisel (Loire-Inférieure), 22 octobre 1941
Ma petite maman chérie, Mon tout petit frère adoré, Mon petit papa aimé,
Je vais mourir ! Ce que je vous demande, à toi en particulier petite maman, c’est d’être très courageuse. Je le suis et je veux l’être autant que ceux qui sont passés avant moi.
Certes, j’aurais voulu vivre, mais ce que je souhaite de tout mon cœur, c’est que ma mort serve à quelque chose. Je n’ai pas eu le temps d’embrasser Jean. J’ai embrassé mes deux frères Roger et René. Quant à mon véritable (Serge), je ne peux le faire, hélas ! J’espère que toutes mes affaires te seront renvoyées, elles pourront servir à Serge qui, je l’escompte, sera fier de les porter un jour.
À toi, petit papa, si je t’ai fait ainsi qu’à ma petite maman bien des peines, je te salue pour la dernière fois. Sache que j’ai fait de mon mieux pour suivre la voie que tu m’as tracée.
Un dernier adieu à tous mes amis, à mon frère que j’aime beaucoup, qu’il étudie, qu’il étudie bien pour être plus tard un homme.
17 ans et demi (sic), ma vie a été courte, je n’ai aucun regret, si ce n’est de vous quitter tous. Je vais mourir avec Tintin, Michels. Maman, ce que je te demande, ce que je veux que tu me promettes, c’est d’être courageuse et de surmonter ta peine.
Je ne peux pas en mettre davantage, je vous quitte tous, toutes, toi maman, Séserge, papa, en vous embrassant de tout mon cœur d’enfant. Courage !
Votre Guy qui vous aime.
Guy