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14H42 - jeudi 7 novembre 2024

Après la large élection de Trump, quelques leçons du scrutin. La chronique de Patrick Pilcer

 

On nous avait prédit l’élection la plus serrée et la plus indécise de l’histoire des Etats-Unis. Nous ne devions pas avoir les résultats avant plusieurs jours, voire semaines. On envisageait le chaos dans les rues de Washington, Atlanta ou Philadelphie.

Pas du tout. Contre l’attente de la plupart des journalistes et des commentateurs, des spécialistes du Covid le matin, de l’Ukraine le midi et des narcotrafics le soir, Donald Trump a remporté haut la main l’élection du 5 novembre. Mieux, le Sénat, si important sur les nominations comme dans les grands choix politiques sur le plan national comme international, est lui aussi tombé dans l’escarcelle des Républicains. Nous n’avons pas encore le résultat final pour la Chambre des Représentants, mais elle aussi pourrait connaître une majorité républicaine. Cerise sur le gâteau, Trump remporte le vote populaire, il devance Kamala Harris de plus de 5 millions de voix…

 

Il y aura de nombreuses leçons et conséquences à ce vote historique

Tout d’abord, les instituts de sondage américains sont devenus partisans. En fonction de leur proximité avec les partis et de leur financement, le résultat avant scrutin, dans le même état, pouvait être totalement différent. L’un pouvait donner Trump avec une avance de 5 points, l’autre afficher un résultat inverse en faveur de Harris. Prendre la moyenne des deux sondages, comme l’ont fait certains journalistes, et prédire ainsi une indécision totale, n’avait pas grand sens.

Ensuite, les principaux médias et journaux n’ont pas cherché à éclairer leurs lecteurs-électeurs. Chacun a pris parti. Idem pour les journaux français, qui auraient pourtant pu conserver une parfaite neutralité. Pire, quand le patron du Washington post, Jeff Bezos, décide de ne pas appeler à voter pour l’un ou pour l’autre des candidats, il est vilipendé. On y voit l’emprise des GAFAM.

En quoi afficher son choix aurait été plus éthique ? En fait, ne pas soutenir officiellement le Parti Démocrate et sa candidate n’était pas politiquement correct. Cela s’applique en France. Il est encore contraire au politiquement correct de se dire de centre droit, pire de droite. Ne pas soutenir Harris n’était pas acceptable par l’establishment, américain comme français…

Il faut que ces médias nous expliquent pourquoi ne pas éclairer correctement leurs lecteurs, leurs véritables clients, est plus éthique ? En quoi prendre leurs désirs pour la réalité est professionnel ? Si ces médias préfèrent choisir leurs propres vérités au lieu de travailler sur les faits, quelle est la différence avec l’industrie des fake news ?

Je citais Jeff Bezos ; il était commun dans les médias, y compris les nôtres, d’entendre que les milliardaires poussaient la candidature de Trump, et, bien sûr, de s’en offusquer. Mais quand des stars de la musique ou des idoles du sport soutenaient Harris, ces mêmes médias les applaudissaient et accordaient à ces soutiens une place importante dans leurs colonnes ou dans leur temps d’antenne. En quoi l’avis d’une chanteuse ou d’un rocker devrait être plus éthique que celui du créateur de Tesla, de Paypal ou d’Amazon ? D’un côté, quelqu’un qui a innové, qui a inventé, qui a créé des richesses et des emplois, qui a pris des risques, qui a éprouvé les vertus et les limites du système ; de l’autre, une belle voix, une image, dont la fortune n’a rien à envier à celle d’un grand dirigeant d’entreprise, qui est certes une icône des tabloïds, mais un véritable symbole du superflu, du paraître et non de l’être. Pourquoi l’un serait l’ange et l’autre le diable ? Sauf à considérer que le vote à gauche est bien, et celui à droite, est mauvais ! Le manichéisme le plus trivial…

Ces médias et l’establishment, des deux côtes de l’Atlantique, séparaient entre le bien et le mal ; entre les chanteuses, pourtant milliardaires elles-mêmes, et les patrons de la Silicon Valley ou des GAFAM ; entre le vote démocrate, bon par essence, et le vote républicain, mauvais par nature.

Pourtant tous ces médias, y compris en France, appartiennent à des milliardaires, dont l’intérêt à détenir un journal ou une chaîne ne repose en rien sur la philanthropie ou le souhait de financer une « danseuse ».

Il y a bien sûr de nombreuses autres leçons, aussi pour nous Français, à puiser dans cette remarquable, et large, élection-réélection, dans ce come-back que l’on disait impossible. C’était impossible, c’est pour cela qu’il a réussi…

 

Citons quelques leçons.

Tout d’abord, stigmatiser son adversaire, le traiter de fasciste, de nazi, de danger pour la démocratie, à longueur de journée, sans étayer le moins du monde ses accusations, renforce en fait le camp adverse. C’était palpable durant ces dernières semaines aux Etats-Unis. C’est aussi vrai à présent en France. Et puissance deux car en France les pourfendeurs des pseudo-fascistes sont surtout les principaux soutiens aux véritables nazis et fascistes du XXIème siècle, à savoir les islamistes, les réseaux fréristes, le Hamas, le Hezbollah, les Houthis, les Talibans et la Mollahchie encore en place en Iran.

Appeler à voter sur un programme compréhensible par tous, destiné à tous quelles que soient leur origine ou leur classe sociale, même contestable, comme le proposait Trump, cela fonctionne. N’évoquer que des idées floues, compter sur sa bonne tête et son sourire, ne marche pas. Les électeurs apprécieront toujours plus un candidat qui trace un cap, pointe l’horizon, a un plan sur plusieurs années, agit, plutôt que quelqu’un qui réagit, qui se limite à un « faites-moi confiance ».

On voit également cela aux réactions des différents pays européens. La Pologne, la Hongrie, la Tchéquie, la Slovénie,… auront toujours plus confiance en quelqu’un qui dit crûment les choses, qui n’hésite pas à révéler ses quatre vérités à Poutine, à Xi ou à Zelinsky, plutôt qu’à quelqu’un qui propose de faire un embargo sur les armes à son propre allié, lâchement attaqué par nos propres ennemis, quelqu’un qui n’hésite pas à boycotter plutôt qu’à aider. Trump aura toujours plus la confiance des pays de l’Europe de l’Est qu’un Européen béat qui cherche sa boussole, donne des leçons de bonne gestion tout en affichant des déficits hallucinants. À quoi bon être allié avec quelqu’un qui se défausse de ses engagements à la première occasion ? Que vaut l’engagement de quelqu’un qui dit oui et non, en même temps ?

La droite et le centre gagneront les prochaines élections en France si leurs candidats défendent leurs valeurs, avec clarté, avec constance, proposent un plan audible pour notre pays, un programme simple et efficace, compréhensible pour résoudre les problèmes de nos citoyens.

Nous connaissons tous ces problèmes : la sécurité des biens et des personnes, l’immigration illégale, l’entrisme des islamistes, les narcotrafics ; retrouver une souveraineté industrielle et économique, repenser l’Europe, dont nous avons tant besoin. Une Europe qui ne soit pas punitive, ou usine à normes, mais une Europe levier de toutes nos énergies pour retrouver le chemin de l’innovation et de la création de richesses ; repenser tous nos services publics, les redimensionner à l’heure de l’intelligence artificielle, renouer avec une école et un système de santé dignes de ce qu’était, est et sera la France ; solidifier la laïcité, socle de notre nation, refaire Nation… et surtout ne plus croire les mots, les belles paroles, la main sur le cœur, mais juger les actes.

Trump a réussi, à sa façon, malgré ses outrances, scandaleuses, inacceptables, en parlant aux électeurs de leurs vrais problèmes et en leur proposant des solutions. Il leur avait déjà prouvé qu’il savait passer des mots aux actes.

Harris, elle, a échoué. Elle a même fait pire que Biden car elle n’a pas porté haut les valeurs du Parti Démocrate. Biden, lui, a au moins toujours été clair sur ses valeurs et n’a jamais cédé à la vague wokiste. Il n’a jamais abandonné ses alliés. Elle n’a pas osé dire les choses franchement. Elle aurait dû, au nom des valeurs qu’elle porte, condamner les régimes ouvertement racistes, sexistes, homophobes, antidémocratiques, corrompus, comme Gaza, l’Afghanistan, l’Iran et tant d’autres. En flattant les islamistes, elle a perdu le vote des musulmans modérés, agnostiques ou athées, qui sont pourtant la très grande majorité des musulmans. Tristement, la gauche en France, en continuant d’être soumise à son ultragauche, commet la même erreur…

Bien sûr, et heureusement, il n’y aura pas de Trump en France, même s’il y a beaucoup de Kamala Harris. Mais celui qui fera « du Trump », en l’adaptant à la culture politique française, qui parlera directement au cœur des électeurs, qui leur proposera un plan clair pour résoudre leurs difficultés, qui leur montrera un cap, sans trahir ses valeurs mais au contraire en les portant en étendard, celui-là gagnera…

 

Patrick Pilcer
Conseil et expert sur les marchés financiers, président de Pilcer & Associés, Chroniqueur Opinion Internationale